J-02-100
injonction de payer – signification DE L’ORDONNANCE faite à la personne du débiteur (non) – opposition – opposition faite suivant la première mesure d'exécution – recevabilité (oui) – respect du délai (non) – irrecevabilité de l'opposition.
Lorsque l'ordonnance d'injonction de payer n'a pas été signifiée à la personne du débiteur, l'opposition reste recevable si elle est faite suivant la première mesure d'exécution, en l'espèce la saisie.
Encore faut-il que l'opposant respecte le délai de quinze jours prévu par l'article 10 alinéa 2 de l'Acte uniforme portant recouvrement de créance.
Tel n'est pas le cas lorsqu'il s'écoule plus de quinze jours depuis la date de la saisie, première mesure d'exécution.
(Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt n° 260 du 25 février 2000, T…c/ G…,Juris-OHADA, n° 2/2002, avril-mai-juin, p. 37; Revue des jurisprudences nationales, n° 1, décembre 2004, p. 151).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Le Ministère Public en ses réquisitions écrites;
Ensemble l'exposé de la procédure, des faits, prétentions des parties et des motifs ci-après;
exposé de la PROCEDURE, DES FAITS ET PRETENTIONS DES PARTIES
Considérant que par exploit d'huissier en date du 14 juillet 1999, Monsieur T. a relevé appel du jugement n° 224 rendu le 21 juin 1999 par le Tribunal de Première Instance d'Abidjan, dont le dispositif est ainsi libellé :
– Déclare T. irrecevable;
– Restitue à l'ordonnance n° 2179 du 28 octobre 1998 son plein et entier effet;
– Le condamne aux dépens;
Considérant qu'il résulte des productions, des écritures des parties et des énonciations du jugement à Monsieur T. (sic) la somme de 85.500.000 francs; que Monsieur T. s'est engagé à rembourser cette somme au plus tard le 31 décembre 1997, soit 19 jours plus tard;
Que le remboursement de cette somme a été garanti par des véhicules appartenant à Monsieur T déposés dans son garage;
Que 19 jours plus tard, Monsieur T. n'a pas honoré ses engagements;
Ainsi par une ordonnance en date du 28 octobre 1998 rendue par le Président du Tribunal d'Abidjan sous le n° 2179/98, Monsieur T. a été condamné à payer à Monsieur G. la somme principale de 85.500.000 francs;
Par exploit en date du 5 janvier 1999, Monsieur T. a assigné Monsieur G. devant le Tribunal civil d'Abidjan pour voir rétracter l'ordonnance ° 2179 du 28 octobre 1998 portant condamnation au paiement de la somme principale de 85.500.000 francs;
Que le Tribunal, statuant donc sur le mérite de cette opposition, l'a déclarée irrecevable en application des dispositions de l'article 10 alinéa 2 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Que c'est donc cette décision qui est frappée d'appel;
Considérant que Monsieur T, appelant,soutient que son opposition est recevable;
Qu'en effet, les exploits en date du 26 mai 1998 de sommation et de mise en demeure lui ont été signifiés régulièrement à son domicile et à sa personne, alors que les exploits de signification commandements de l'injonction de payer, du procès-verbal de saisie-vente du 8 décembre 1998 ont été délivrés au garage à la personne de K.;
Que dès lors, les exploits n'ayant (pas) été signifiés, l'opposition à l'injonction de payer est donc valable;
Qu'il soutient aussi que le délai de 15 jours commence à courir à compter de la saisie-vente; le délai ne pouvait donc pas courir;
Que de tout ce qui précède, la Cour déclarera son opposition recevable;
Que sur le fond, l'appelant sollicite le sursis à statuer pour procédure pénale en cours relativement à la pièce qui fonde la prétendue créance du sieur G.;
Pour sa part, Monsieur G. intimé soutient que les dispositions de l'article 10 du Traité de l'OHADA (sic) sont applicables en l'espèce;
Que dès lors, l'opposition de Monsieur T. est irrecevable;
Qu'en ce qui concerne le fond, l'intimé fait observer que l'appelant ne rapporte pas la preuve qu'il s'est acquitté de sa dette;
Qu'il prie donc la Cour de restituer à l'ordonnance querellée son plein et entier effet;
Considérant que le Ministère Public a requis à la confirmation du jugement querellé;
DES MOTIFS
Considérant que les parties ont conclu;
Qu'il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard;
EN LA FORME
Considérant que l'appel de Monsieur T. ayant été relevé selon les formes et délais de la loi, il convient de le déclarer recevable;
AU FOND
Considérant qu'en l'espèce, il est établi que l'ordonnance d'injonction de payer n'a pas été signifiée à la personne de l'appelant;
Que, dès lors, en application des dispositions de l'article 10 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, l'opposition reste recevable si elle est faite suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou partie, les biens du débiteur;
Qu'en l'espèce, la première mesure d'exécution qui est la saisie, datant du 3 décembre 1998, l'opposition faite le 5 janvier 1999 est irrecevable pour avoir été relevée hors délai, c'est-à-dire plus de 15 jours comme le prévoit le texte précité;
Que dans ces conditions, c'est à juste titre que le Premier Juge a déclaré irrecevable l'opposition de Monsieur T.;
En conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions;
SUR LES DEPENS
Considérant que Monsieur T. succombe;
Qu'il y a lieu de le condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare Monsieur T. recevable en son opposition;
AU FOND
– L'y dit mal fondé;
– L'en déboute;
– Confirme le jugement N° 224 du 21 juin 1999 rendu par le Tribunal de Première Instance en toutes ses dispositions;
– Président : M. KHOUADIANI Kouadio Bertin.
Observations anonymes
Quel est le sort de l'opposition lorsque la signification de la décision d'injonction de payer n'a pas été reçue personnellement par le débiteur ?
En application de l'article 10 alinéa 2 de l'Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, la Cour d'Appel répond que l'opposition reste valable si elle est faite suivant la première mesure d'exécution ayant pour effet de rendre indisponible en tout ou en partie les biens du débiteur.
Par cette mesure, les rédacteurs de l'Acte OHADA ont opté pour la préservation des droits de la défense, comme en droit commun.
Il en résulte que la saisie, présumée mesure d'exécution opérée, datant du 3 décembre 1998, le délai de 15 jours prévu commençait à courir à partir de cette date. Or, l'opposition a été formée le 5 janvier 1999, c'est-à-dire plus de 15 jours après la saisie.
Dès lors, c'est de façon tardive que l'opposition est faite. Ce qui explique son irrecevabilité par le premier juge.