J-02-105
voies d'exécution – saisie – vente – distraction d'objets saisis – restitution – restitution d'objets non compris dans la saisie – juge ayant statué au-delà de chose demandée (oui) – annulation
Doit être annulée l'ordonnance de restitution d'objets non compris du reste dans la saisie-vente litigieuse et dont l'énumération aux termes de la décision attaquée, paraît étrangère aux indications de l'acte d'assignation ayant saisi la juridiction.
Article 141 AUPSRVE
(Cour d’appel de Bouaké, arrêt n° 61 du 4 avril 2001, STIB et F c/ S. et L., Le Juris Ohada,n° 2/2002 avril mai juin 2002, p. 48, note anonyme).
Cour d'Appel de BOUAKE
Arrêt N° 61 du 04 avril 2001.
la cour,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions;
Le Ministère public entendu;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
EN LA FORME
Vu l'arrêt avant-dire droit de la Cour d'Appel de céans en date du 14 février 2001 ayant déclaré recevable l'appel interjeté par F. et la STIB;
AU FOND
DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES
Considérant que la Société Technique et Industrielle de Bouaké, dite STIB, SARL au capital de 1.000.000 de francs, dont le siège social est à Bouaké et ayant pour Directeur général le sieur F., créancière de L. de la somme de 7.734.641 Frs en principal, a obtenu contre celui-ci, une ordonnance d'injonction de payer n° 735/99 rendue par le Président du Tribunal de Bouaké le 31 août 1999; qu'en exécution de cette décision, la STIB a procédé le 09 mars 2000, à une saisie-vente de biens mobiliers de L.;
Que par exploit d'huissier en date du 13 avril 2000, le sieur S., se disant propriétaire de certains biens compris dans la saisie, a initié devant le juge des référés, une action en distraction d'objets saisis; qu'il a fait valoir que L., avec qui il était sociétaire d'une SARL, lui a cédé ses parts sociales à concurrence de 35.000.000 F comprenant une machine incubateur + accessoires de marque National; un fax de marque Sharp et un climatiseur; qu'il sollicite en conséquence leur distraction; que pour sa part, la STIB a relevé in limine litis que la demande en distraction n'ayant pas été signifiée, (a été) déclarée irrecevable en vertu des dispositions de l'article 141 du Traité OHADA (sic) sur les voies d'exécution; que, d'autre part, la cession des parts sociales intervenue n'a pas respecté les formalités légales de publicité relatives à la cession des fonds de commerce; qu'ainsi, elle est inopposable aux tiers;
Considérant que par ordonnance n° 97 rendue le 22 novembre 2000, le Président du Tribunal de Bouaké a décidé la distraction d'un incubateur Bretagne 26 n° 2646; un éclosoir Bretagne 144 n° 2647; un bac de refroidissement et accessoires; deux climatiseurs, un micro-ordinateur EMC + accessoires; deux moteurs réserves incubateur et éclosoir, une table de mirage et transfert d'œufs; un fax photocopieur de marque Sharp UX 500;
Considérant que la STIB et F., appelants aux termes des écritures de leur Conseil la SCPA KONATE BAZIE et KOYO, concluent d'une part à l'irrecevabilité de la demande de distraction, en ce qu'elle est initiée, selon eux, sans signification au débiteur saisi L., et au mépris des dispositions de l'article 141 du Code OHADA (sic) portant droit commercial général, tout acte de cession d'un fonds de commerce doit, dans un délai de 15 jours à compter de sa date, faire l'objet d'une publicité dans un journal d'annonces légales, à la diligence de l'acquéreur, lequel a l'obligation de payer le prix entre les mains d'un notaire ou d'un établissement bancaire; que le défaut de ces formalités rend selon eux, la vente intervenue inopposable aux tiers; qu'enfin, le Premier juge ayant ordonné la distraction de huit (8) objets saisis, alors que le prétendu propriétaire en avait revendiqué seulement quatre (4), a statué au-delà de chose demandée; qu'ainsi sa décision doit être infirmée;
Considérant que S. et L. ont été assignés à Mairie; qu'en l'état, il n'est pas absolument certain qu'ils aient eu connaissance de l'instance initiée contre eux; que, faute pour eux d'avoir conclu dans ces conditions, il y a lieu de statuer par défaut à leur égard;
Considérant que le Ministère public, dans ses conclusions écrites en date du 15 mars 2001, relève que si la cession a été constatée par écrit, elle n'a en revanche pas fait l'objet de publication au registre de commerce;
Que le défaut de cette formalité impérative en vertu de l'article 317 du Code OHADA (sic) portant droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique rend la cession inopposable aux tiers, en l'occurrence les créanciers poursuivants; que c'est donc à tort que le Premier juge a ordonné la restitution des biens saisis;
DES MOTIFS
Considérant qu'il ressort de la requête du demandeur en distraction d'objets saisis présentée le 11 avril 2000 à la juridiction statuant en matière d'urgence, qu'il a revendiqué une machine incubateur + accessoires de marque National, une machine Eclosoir + accessoires de même marque, un fax de marque Sharp et un climatiseur,; qu'au-delà de cette prétention, la juridiction susvisée a ordonné la restitution de dix (10) objets non compris du reste dans la saisie-vente litigieuse et dont l'énumération, aux termes mêmes de lé décision attaquée, paraît étrangère aux indications de l'acte d'assignation qui a saisi la juridiction; qu'il y a lieu de constater que le Premier juge a statué au-delà de chose demandée et que sa décision doit être annulée, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des appelants tirés de l'irrecevabilité de la demande en distraction et de l'inopposabilité de la cession;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l'égard de la Société Technique et Industrielle de Bouaké dite STIB et de F., et par défaut à l'égard de S. et L., en matière civile et en dernier ressort;
Vu l'arrêt avant-dire de droit de la Cour d'Appel de céans en date du 14 février 2001;
Vu les conclusions écrites du Ministère public en date du 15 mars 2001;
– Déclare les appelants bien fondés en leur action;
– Annule l'ordonnance N° 97 rendue le 22 novembre 2000 par le Président du Tribunal de Bouaké.
– Président : M. SEKA ADIKO Firmin.
Note
L'arrêt publié ci-dessus relatif à la distraction d'objets saisis n'aurait pas attiré l'attention si le Premier juge avait répondu à la demande du prétendu propriétaire, en ordonnant la distraction des objets revendiqués.
Or, il est apparu que le Premier juge, au lieu 04 objets revendiqués, a ordonné la distraction de 08 objets saisis, soit 04 objets saisis qui ne font pas partie de la demande.
Ainsi, le Premier juge a statué au-delà de la demande en distraction d'objets saisis.
C'est donc tout naturellement que la décision a été annulée par la Cour.
En conséquence, les autres moyens tirés d'une part de l'irrecevabilité de la demande (article 141, Acte uniforme relatif aux voies d'exécution) et, d'autre part, de l'inopposabilité de la cession (articles 121 et 125 de l'Acte uniforme portant droit commercial général), n'ont pu être examinés.
NB On peut s’étonner que l’arrêt parle de l’article 141 du Traité Ohada ou du code Ohada pour évoquer l’Acte uniforme sur les voies d’exécution ou sur le droit des sociétés commerciales. Les juges doivent s’accoutumer définitivement à faire la différence entre le Traité qui crée et organise la personne morale de droit international public OHADA et les Actes uniformes que ce sujet de droit élabore pour les imposer aux Etats et aux autres acteurs économiques.