J-02-11
INJONCTION DE PAYER – SIGNIFICATION DE L'ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER – MENTION DANS LA SIGNIFICATION DE FRAIS NON PREVUS PAR L'ARTICLE 8 AUPSRVE – NULLITE DE LA SIGNIFICATION.
CONTESTATION DE LA SOMME DONT LE PAIEMENT EST ORDONNE – DEFAUT DE JUSTIFICATION DE LA CONTESTATION – REJET DE L'OPPOSITION – CONFIRMATION DE L'ORDONNANCE D'INJONCTION DE PAYER.
L'article 8 AUPSRVE, s’il ne prévoit pas la TPS (taxe de prestation de service) dans la liste des frais dont le montant doit être indiqué dans l'acte de signification, n'interdit pas, pour autant, la mention d'autres frais. Il s'ensuit que l'acte de signification de l'ordonnance d'injonction de payer contenant mention de la TPS n'est pas nulle.
A défaut de justifier sa contestation de la somme qu'il lui a été enjoint de payer par ordonnance, alors que le créancier fournit le détail de sa créance, il y a lieu de confirmer ladite ordonnance
Article 8 AUPSRVE
(Tribunal de 1ère instance d'Abidjan, jugement n° 35 du 22 février 2001, Eburnéa c/ SIB, Revue Ecodroit n°1, juillet-août 2001, p. 37)
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE D'ABIDJAN
Jugement n°35 du 22 Février 2001
LE TRIBUNAL
Vu les pièce du dossier;
Oui les parties en leurs moyens, fins et conclusions; le Ministère Public en ses réquisitions écrites du 24 novembre 2000;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que par exploit du 23 mai 2000 de Maître Lacombe T.Hélène, huissier de justice à Abidjan, la société Eburnea a formé opposition contre l'ordonnance n°3140/2000 du 12 avril 2000, signifiée le 10 mai 2000, l'ayant condamnée à payer à la société Ivoirienne de Banque une somme de 197 279 242 francs CFA outre les intérêts de droit, la TPS et les dépens;
Attendu qu'au soutien de son recours, la société Eburnea fait valoir à titre principal que l'acte de signification de l'ordonnance partant injection de payer est nul parce que contenant mention de frais non prévu par l'article 8 de l'Acte uniforme du traité OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, notamment la TPS, que ce faisant, l'ordonnance querellée doit être purement et simplement rétractée; que subsidiairement, au fond, poursuit Eburnea, la créance dont se prévaut la SIB n'est pas liquide parce que son quantum est contesté; que dès lors, conclut l'opposante, c'est en violation de l'article 1er de l'acte uniforme précisé que la décision a été rendue;
Attendu que la SIB, en réponse, soutient que l'énumération par l'article 8 des mentions devant figurer sur l'exploit de signification n'est pas limitative et exclusive et que le législateur de l'OHADA a édicté que la sommation de payer doit porter sur le montant de la somme fixée par la décision ainsi que les intérêts et frais de Greffe, cela n'a pas pour effet d'exclure d'éventuels frais exposés en dehors du Greffe, encore moins les émoluments, débours et taxes auxquelles est assujetti l'huissier instrumentaire, en l'occurrence la TPS, que le Tribunal voudra bien noter que toutes les mentions exigées par l'articles 8 précité figurent bel et bien dans l'acte critiqué et que c'est bien à tort que la société Eburnea plaide sa nullité qu'au fond, relève le Sib, si Eburnea dit contester le quantum de la créance, c'est qu'elle reconnaît implicitement devoir des sommes d'argent; qu'elle se garde cependant d'indiquer les raisons de sa contestation; que son recours en conséquence devra déclarer mal fondé;
Sur ce :
Motifs de la décision :
en la forme :
Attendu que les parties comparaissent et concluent; qu'il échet de statuer contradictoirement;
Attendu que la société Eburnea a formé son opposition dans le délai légal et par acte régulier; qu'il échet de déclarer recevable;
Examen du mérite de l'opposition :
Attendu qu'il ressort des productions que suite à une ouverture de crédit accordée par la SIB le 18 novembre 1998 la société Eburnea s'est trouvée débitrice dans le courant du mois d'avril 2000 de la somme de 197 279 242 francs; que par ordonnance n°3140/2000 du 12 Avril 2000, elle a été condamnée à payer ladite somme; que par exploit du 23 mai 2000, elle a introduit le présent recours contre la décision à elle signifiée le 10 mai 2000;
Attendu que certes l'article 8 ne prévoit pas la TPS dans la liste des frais dont le montant doit être indiqué dans l'acte de signification, que cependant ledit texte n'a nullement interdit la mention d'autres frais; que le moyen de la société Eburnea, dans ces conditions est sans fondement;
Attendu qu'au fond, Eburnea ne conteste pas la créance;
Qu'elle ne produit aucune pièce pour indiquer le montant qu'elle estime être celui de sa dette; qu'elle n'explique même pas sa contestation du montant de sa dette, alors que la SIB, elle, ne fournit le détail de sa créance; qu'il s'ensuit que les preuves de la créance fournies au Tribunal n'ont pu être détruites par Eburnea; que dès lors il y a eu lieu de confirmer l'ordonnance critiquée;
Sur les dépens
Attendu que la société Eburnea succombe; qu'il échet de la condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement, en matière civile et commerciale et en premier ressort;
Reçoit la société Eburnea en son opposition;
L'y dit mal fondée et l'on déboute;
Restitue à l'ordonnance n°3140/2000 du 12 avril 2000 son plein entier effet;
Condamne la société Eburnea aux dépens;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement, les jours, mois et an que dessus;
Et ont signé le Président et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur, Consultant
Ce jugement doit être totalement approuvé sur les deux points de droit et de fait qu'il tranche.
Les exigences de l'article 8 AUVE ont pour but de renseigner le débiteur sur le montant des frais qui lui sont réclamés par son créancier. Il n'y a donc aucun préjudice pour lui de se voir signifier la TPS non prévue expressément par le texte uniforme, si cette taxe est due par lui. Reste à savoir si la TPS figurant dans l'acte de signification avait été indiquée dans la requête du créancier et l'ordonnance du juge. Dans l'affirmative, il n'y a pas signification ultra petita; dans la négative, il y aurait réclamation d'une somme supérieure à celle dont le paiement a été ordonné.
Sur le fond, le rejet de l'opposition du débiteur est tout à fait justifié dans la mesure où l'opposant n'argumente pas du tout la contestation de sa dette alors que le créancier en établit l'existence et le détail.