J-02-126
saisie attribution – contestation – compétence du juge des référés – ARTICLE
49 AUPSRVE – ARTICLE
154 AUPSRVE – ARTICLE
169 AUPSRVE – article
170 AUPSRVE – ARTICLE
336 AUPSRVE – ARTICLEs 96, 97, 143, 171, 441, 458, 549 ET 715 DU CODE GABONAIS DE PROCEDURE CIVILE.
saisie attribution fondée sur un arrêt de condamnation en appel – pourvoi en cassation contre cet arrêt – demande de sursis à exécution devant la cour suprême – absence de preuve d'un sursis accordé – continuation des poursuites.
saisie attribution opérée sur plusieurs comptes bancaires – limitation de la saisie attribution à hauteur des sommes dues en vertu du titre exécutoire.
En application des articles 49, 169 et
336 AUPSRVE, les contestations de saisie sont portées devant la juridiction du domicile ou de la demeure du débiteur. Ratione materiae, c'est le juge des référés qui est compétent pour connaître des difficultés d'exécution.
Le recours en cassation contre une décision de condamnation ne suspend pas l'exécution de cette décision, sauf lorsque la Cour suprême saisie d'un pourvoi ordonne, avant de statuer au fond, qu'il soit sursis à l'exécution si celle-ci doit provoquer un préjudice irréparable. L'absence de production, aux débats, d'un tel arrêt de sursis, ne permet pas d'ordonner la discontinuation de la procédure de saisie-attribution.
En présence de saisies-attributions pratiquées sur plusieurs comptes bancaires du débiteur et de la demande de ce dernier de les cantonner à la somme de 4.000.000 F CFA correspondant au montant dû au créancier, il y a lieu de rappeler que la procédure de cantonnement est abrogée, la nouvelle législation de l'Ohada imposant que les saisies-attributions soient pratiquées à la seule hauteur des sommes indiquées dans le titre exécutoire. En conséquence, il est ordonné au tiers saisi, le paiement de la somme de 4.000.000 F CFA et la mainlevée pour le surplus.
(Tribunal de première instance de Libreville, ordonnance de référé n° 234/2001/2002 du 13 février 2002, ASSINCO c/ DIALLO Mamadou).
République Gabonaise
cour d'appel judiciaire de libreville
ordonnance de référé du 13 février 2002
Affaire :
ASSINCO (Me ITCHOLA)
contre :
Sieur DIALLO MAMADOU (Cab. MISSOU).
L’an deux mil deux;
Et le sept février;
Par-devant nous, Jacques LEBAMA, Président du Tribunal de Première Instance de Libreville, Juge des urgences statuant en matière d'exécution, tenant audience dans une salle d'audience dudit Tribunal;
Assisté de Maître NZAME MENZOGHE Josiane, Greffier civil;
Les FAITS :
Par acte d'huissier en date du 14 janvier 2002, une saisie attribution de créances a été pratiquée sur les comptes bancaires de la Compagnie d'Assurances ASSINCO, à la requête de sieur DIALLO MAMADOU, à hauteur de 4.696.600 FCFA, en vertu d'un arrêt de la Cour d'Appel de Libreville du 03 janvier 2002;
Qu'ayant reçu la dénonciation de ladite saisie, ASSINCO a fait assigner DIALLO MAMADOU devant le Juge des urgences aux fins de s'entendre :
– ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée sur les comptes bancaires de la société ASSINCO par exploit du 14.01.2002;
– interdire d'user de voie d'exécution jusqu'à droit connu sur la demande de sursis à exécution formée devant la Cour de Cassation;
– à titre infiniment subsidiaire, ordonner le cantonnement de la saisie dans une seule banque;
– ordonner l'exécution provisoire sur minute et avant enregistrement de la décision à venir nonobstant toutes voies de recours;
Prenant la parole in limine litis, sieur DIALLO MAMADOU, représenté par son Conseil Maître BONGHO MAVOUNGOU du Cabinet MISSOU, soulève une exception d'incompétence;
Il prétend que le Juge des référés ne peut trancher les contestations relatives aux saisies attributions; qu'en le faisant, il viole les dispositions des articles 169 de l'AUPSRVE du Code OHADA et 143 du Code de Procédure Civile; qu'en outre, il soutient que le Juge des référés n'est pas le juge de la contestation;
En réponse, la Compagnie d'Assurances ASSINCO, représentée par son Conseil Maître ITCHOLA, Avocat au Barreau du Gabon, plaide la compétence du Président du Tribunal à connaître toutes contestations inhérentes à une saisie attribution de créances; qu'il statue ainsi en matière d'urgence, donc en référé;
En réplique, sieur DIALLO MAMADOU soutient qu'en matière de contestation, on ne peut saisir le Juge des référés; que seul le Tribunal statuant en matière de contestation est compétent conformément à l'article 715 du Code de Procédure Civile à connaître ce type de différend;
Plaidant sur le fond de la contestation, la Compagnie d'Assurances ASSINCO fait état d'une demande de suspension à exécution qu'elle a formée contre l'arrêt dont l'exécution forcée est entreprise devant la Cour de Cassation sur requête en date du 18.01.2002;
Qu'elle ajoute qu'en vertu d'une note circulaire du Président de la Cour de Cassation N° 0083/CJG du 07.06.1995, "les demandes de sursis à exécution consécutives à un pourvoi suspendent l'exécution de la décision attaquée jusqu'au vidé de la saisine de la Haute Cour sur cette demande »;
Qu'elle conclut que la mainlevée de la saisie attribution s'impose en attendant le droit connu sur la demande de sursis à exécution qu'elle a introduite;
Que, subsidiairement, dans le cas où le Juge des référés, estimant ne pas être en mesure d'ordonner la mainlevée pure et simple, en vue de préserver ses intérêts, de cantonner la saisie dans une seule banque, et ce, dans la stricte application de l'article 154 §1 de l'AUPSRVE du Code (sic) OHADA;
En réponse, sieur DIALLO MAMADOU plaidant et représenté par son Conseil, plaide au principal le débouté de ASSINCO en sa demande;
Qu'il soutient que ordonner le sursis sollicité consisterait à se substituer au Juge de Cassation et violer l'article 441 du Code de Procédure Civile;
Qu'en outre, il plaide l'absence de preuve relative à l'existence de provision nécessaire au paiement de sa créance sur d'autres comptes;
Que, surabondamment, il sollicite reconventionnellement, sur la base des articles 96, 97 et 171 du Code de Procédure Civile de l'AUPSRVE OHADA, que le transport de créance soit ordonné en faveur de DIALLO MAMADOU et que ladite décision soit assortie de l'exécution sur minute.
Sur quoi
Les débats étant clos, nous avons mis l'affaire en délibéré pour notre ordonnance rendue le 13.02.2002;
Advenue cette date, nous avons statué ainsi qu'il suit :
Attendu que suivant une combinaison des articles 169, 49, 336 de l'AUPSRVE du Code OHADA, "les contestations sont portées devant la juridiction du domicile du lieu où demeure le débiteur; qu'en outre, la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute autre demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le Président de la juridiction statuant en matière d'urgence ou le Magistrat délégué par lui;
Qu'enfin, l'Acte uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution abroge toutes les dispositions relatives aux matières qu'il concerne;
Attendu qu'il résulte clairement des dispositions qui précèdent, que la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute autre demande portant sur une mesure d'exécution forcée parmi lesquelles une saisie attribution de créances, comme c'est le cas présentement, est le Président du Tribunal statuant en matière d'urgence;
Que d'ailleurs, le report en droit interne renseigne à travers l'article 458 du Code de Procédure Civile, que la compétence de la Juridiction du Président du Tribunal est acquise pour statuer en matière d'urgence, dans le cadre d'une procédure de référé ou le Juge délégué par lui;
Que, bien plus, en raison de l'avènement du Traité de l'OHADA ayant institué l'Acte Uniforme précité, lequel abroge les dispositions antérieures relatives aux matières qu'il concerne, notamment en matière de contestation de saisie arrêt sur titre régie antérieurement par l'article 715 du Code de Procédure Civile, lequel conférait au Tribunal la compétence pour statuer sur les contestations en mainlevée de saisie arrêt sur titre;
Qu'il s'ensuit de ce qui précède d'affirmer en conséquence notre compétence.
2°) sur la recevabilité de la contestation
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier que ladite contestation a été formée dans le délai légal de 01 mois requis par l'article 170 de l'AUPSRVE du Code OHADA, qu'il y a lieu de la déclarer recevable.
3°) sur la mainlevée de la saisie attribution
a.- Sur le moyen fondé sur la requête aux fins de surseoir à exécution de l'arrêt du 03.01.2002
Attendu suivant l'article 549 du Code de Procédure, que le recours en cassation ne suspend pas l'exécution, sauf dans les cas suivants :
– en matière d'Etat
– en matière d'immatriculation foncière;
Que toutefois, la Cour saisie d'un pourvoi peut, à la demande de la partie et sans autre forme ordonner avant de statuer au fond, qu'il soit sursis à l'exécution (si celle-ci) doit provoquer un préjudice irréparable;
Attendu, quoi qu'il résulte de la cause, que la Compagnie d'Assurances ASSINCO a déposé une requête aux fins de suspension à exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel en date du 02.01.2002 confirmant une ordonnance du Juge des référés;
Que, cependant, il n'est nullement produit aux débats un arrêt de la Cour de Cassation ordonnant la suspension de l'exécution sollicitée; lequel, conformément au texte qui précède, nous aurait autorisé légalement à accueillir ledit moyen;
Que dans ces conditions, il y a lieu de constater cette inexistence, de tirer les conséquences juridiques qui s'imposent.
b.- Sur le moyen fondé sur le cantonnement de la saisie dans une seule banque
Attendu que le cantonnement de la saisie sollicitée a pour but de préserver essentiellement les intérêts de la demanderesse et, dans une moindre mesure, ceux du défendeur;
Mais attendu qu’en la cause, dès lors que nous avons constaté l'inexistence aux débats d'un arrêt de la Cour de Cassation ordonnant le sursis à exécution, il devient manifestement sans objet d'accéder à ladite demande, dans la mesure où l'exécution forcée entreprise est en conformité avec la légalité en la matière;
Mais attendu cependant que l'assiette de la saisie attribution doit porter uniquement à hauteur de la somme due, ainsi que ses accessoires que la saisie s'étendant au-delà de la somme de 4.000.000 FCFA due ne se justifie guère;
Qu'en définitive, il y a lieu d'ordonner la mainlevée du surplus du montant dû;
sur la demande reconventionnelle
Attendu qu'en raison du constat sur l'absence d'un arrêt de sursis à exécution de la décision dont l'exécution forcée est entreprise, d'une part, et de l'inopportunité de cantonner la somme dont le recouvrement est entrepris, qu'il y a lieu d'ordonner au tiers saisi le paiement de la somme correspondant au montant dû par ASSINCO à DIALLO MAMADOU SALIOU, soit 4.000.000 FCFA;
PAR CES MOTIFS
Le Juge des référés,
Statuant par ordonnance contradictoire en matière civile et en premier ressort;
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront;
Mais dès à présent;
Vu l'urgence;
Nous déclarons compétent;
Déclarons recevable la contestation forcée par la Compagnie d'Assurances ASSINCO;
Constatons l'inexistence d'un arrêt de la Cour de Cassation ordonnant le sursis à exécution de l'arrêt de la Cour d'Appel du 03/01/2002;
Disons inopportun le cantonnement de la saisie attribution à hauteur de 4.000.000 Frs cfa;
Ordonnons le paiement par le tiers saisi au profit de DIALLO MAMADOU SALIOU, le montant de ladite somme;
En conséquence, ordonnons la mainlevée pour le surplus des avoirs bancaires de la Compagnie d'Assurances ASSINCO;
Ordonnons l'exécution sur minute de notre ordonnance nonobstant appel et avant enregistrement;
Condamnons ASSINCO aux dépens;
Et avons signé avec le Greffier.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur agrégé, Consultant
Il est rare et plaisant de voir des décisions aussi concises, pertinentes et bien rédigées.
Faisons simplement observer que :
– même si le débiteur avait pu produire un arrêt de la Cour suprême suspendant l’exécution, celle-ci serait de peu d’effet au regard de la jurisprudence KARNIB (V. Ohadata J-02-06);
– la demande de cantonnement ne doit pas être jugée inopportune mais sans objet puisque cette procédure a définitivement disparu des textes actuels;
– la référence au « Code » Ohada est inappropriée.