J-02-129
recouvrement de créance – ordonnance de condamnation – rétractation – application des dispositions du code IVOIRIEN de procédure civile (non).
La procédure de rétractation ne visant que les ordonnances non prévues par un texte spécial, elle est inapplicable à une ordonnance prévue par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution.
Article 54 AUPSRVE
Article 55 AUPSRVE
(Cour d'appel d'Abidjan, arrêt n° 386 du 21 mars 2000, dame H. née D.S. c/ héritiers DDF, Bulletin Juris Ohada n° 1/2002, janvier-mars 2002, p. 30)
Cour d’Appel d’Abidjan
Arrêt N° 386 du 21 mars 2000
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions et moyens des parties et motifs ci-après;
Suivant exploit du 14 février 2000, Madame H. née D.S. a relevé appel de l'ordonnance N° 5757 rendue le 21 décembre 1999 par la juridiction présidentielle du Tribunal d'Abidjan qui, en la cause, a ordonné la mainlevée de la saisie conservatoire;
Elle expose au soutien de son appel, qu’elle bénéficiait d’un contrat de bail à construction avec feu D.D.F. dont les héritiers ont accepté la prorogation par acte sous seing privé;
Elle ajoute qu’en vertu de cet accord, elle a versé à ces ayants-droit la somme totale de 4.498.000 francs;
Cependant, précise-t-elle, ceux-ci ne se sont jamais présentés chez le notaire pour finaliser leur accord, de sorte qu’elle s’est rendu compte qu’elle était victime d’une arnaque;
Poursuivant, elle fait savoir que sur la base des articles 54 et 55 de l’Acte uniforme relatif au recouvrement de créances du traité OHADA, elle a obtenu une ordonnance l’autorisant à pratiquer saisie conservatoire sur les loyers appartenant aux ayants-droit de D.F.;
Elle fait ensuite observer que cette ordonnance, prévue par un texte spécial, n’est pas celle prévue aux articles 231 et suivants du code de procédure civile;
Dès lors, estime-t-elle, il est impossible de se fonder sur l’article 237 de ce code pour demander la rétractation de l’ordonnance du 18 octobre 1999 prévue, elle, par le traité OHADA;
Cette action en rétractation, poursuit-elle, est en conséquence irrecevable ou en tout état de cause mal fondée;
L’intimé, bien que cité en l’étude de son conseil régulièrement constitué, n’a pas conclu; il convient de statuer par décision contradictoire.
DES MOTIFS
Il résulte de façon non équivoque des pièces et écritures que l’ordonnance n° 4675 du 18 octobre 1999 dont la rétractation est demandée, est une ordonnance prévue par l’Acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution du traité OHADA;
Il s’ensuit que la procédure de rétractation prévue par l’article 237 du code de procédure civile est inapplicable en l’espèce, ladite procédure ne visant que les ordonnances non prévues par un texte spécial;
Dès lors, c’est à tort que le premier juge a fait droit à la demande de rétractation formulée par B.S.;
Il convient en conséquence d’infirmer la décision querellée et statuant à nouveau, déclare le demandeur irrecevable en son action fondée sur l’article 237 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort.
EN LA FORME
Reçoit Madame H. née D.S. en son appel.
AU FOND
– L'y dit bien fondée;
– Infirme l’ordonnance entreprise;
et statuant à nouveau;
– Déclare B.S.N. irrecevable en sa demande en rétractation;
– Le condamne aux dépens.
Président : Mr SEKA ADON Jean-Baptiste.
Note anonyme
Cet arrêt entre dans le cadre de l’application de l’Acte Uniforme, nonobstant toute disposition du droit interne, antérieure ou postérieure, même s’il ne paraît pas aussi explicite que l’arrêt n° 226 du 15 février 2000 (Ohadata J-02-128) dont la motivation est tirée de l’article 10 du traité OHADA. Avec l’Acte OHADA, la rétractation comme voie de recours contre l’ordonnance d’injonction de payer, a disparu (cf. BROU Kouakou Mathurin, La procédure d'injonction de payer en droit ivoirien : l'apport du droit OHADA, Revue de la recherche juridique, droit prospectif, 2001-2, p. 1143 s., notamment p. 1151. Faculté de droit et de science politique d'Aix-Marseille. Cette voie de recours avait été prévue par la loi 93-669 du 9 août 1993). Par ailleurs, l’article 237 c.pr.civ. (ivoirien) invoqué par l’appelant est une disposition de droit interne applicable, non pas en matière d’injonction de payer, mais plutôt aux ordonnances sur requête.
En tout état de cause, cette disposition de l’article 237 du droit interne étant contraire à l’Acte Uniforme, son application ne peut être écartée que sur le fondement de l’article 10 du traité, ce qui conforte son caractère spécial.