J-02-143
voies d’exécution – saisie conservatoire – existence de procédure de validation (non) – observation de la conversion de saisie conservatoire en saisie vente (oui).
L’Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution ne prévoyant pas de procédure de validation de saisie conservatoire, il appartient au créancier d’observer la procédure de conversion de la saisie conservatoire en saisie vente, telle que prévue par l’article 69 dudit Acte.
(Cour d’appel d’Abidjan, arrêt n° 363 du 17 mars 2000, AAA c/ COTUVA, Bulletin Juris Ohada, 3/2002, juillet-septembre 2002, p. 44, note anonyme).
Cour d’Appel d’Abidjan
Arrêt N° 363 du 17 mars 2000
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions et moyens des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort, sur l'appel de l'Alliance Africaine d'Assurances dite 3A, ayant pour conseils Maîtres BONFIN et Associés, Avocats à la Cour, relevé par exploit du 26 novembre 1999 du jugement n° 137 rendu le 26 novembre 1998 par la Section du Tribunal d’Aboisso, qui a déclaré nul l'acte de conversion de la saisie conservatoire en saisie-vente;
Considérant qu'au terme de son appel, la Compagnie d'Assurances 3A expose :
Qu'elle est créancière de la Coopérative de Transport Urbain et Interurbain de la ville d'Aboisso dite COTUVA de la somme de 2.831.824 F;
Que cette somme représente la valeur des différentes attestations d'assurances à elle vendues à crédit;
Que toutes les démarches amiables entreprises par elle auprès de la COTUVA en vue du recouvrement de sa créance sont restées vaines;
Que pour la sauvegarde de ses droits et intérêts, elle a sollicité et obtenu l'autorisation de pratiquer saisie-conservatoire sur l'ensemble des biens de la COTUVA, suivant ordonnance N° 043 du 8 septembre 1998, par le Président de la Section du Tribunal d'Aboisso;
Que l'appelante soutient que cette saisie conservatoire a effectivement été pratiquée le 15 septembre 1998 par les soins de Maître GOSSET Jena-Paul, Huissier de justice;
Que le même jour, ledit huissier assignait la COTUVA par-devant la Section du Tribunal d'Aboisso, aux fins de la validation de la saisie conservatoire pratiquée à son détriment et la voir condamner au paiement de la somme de 2.831.824 F;
Que l'appelante fait grief au jugement querellé de l'avoir déboutée en se fondant sur l'article 69 de l'Acte uniforme portant procédures simplifiées de recouvrement de créance et voies d'exécution, qui réglemente la procédure de la conversion de la saisie conservatoire en saisie vente;
Que la Compagnie 3A fait observer qu'il y a manifestement mauvaise interprétation des dispositions de l'Acte uniforme précité;
Qu'elle soutient que son action devant le premier juge était fondée sur l'article 61 de l'Acte uniforme;
Que c'est en conformité avec ce texte qu'elle a pratiqué une saisie conservatoire sans titre exécutoire, avec l'autorisation du Président de la Section du Tribunal d'Aboisso, résultant de l'ordonnance n° 043; qu'elle a donc introduit une action aux fins d'obtenir un jugement validant la saisie conservatoire pratiquée et condamnant la COTUVA au paiement de la somme de 2.831.824 F;
Que c'est seulement avec ce jugement, lorsqu'il aura force exécutoire, qu'elle sera habilitée à utiliser la procédure de conversion en saisie-vente de l'article 69;
Qu'elle plaide conséquemment la réformation du jugement querellé, la condamnation de la COTUVA au paiement de la somme de 2.831.824 F et dire que la saisie conservatoire pratiquée le 19 septembre 1998 est valable;
Que la Compagnie 3A produit des pièces;
Considérant que pour sa part, la COTUVA concluant personnellement au principal, sollicite la confirmation du jugement querellé;
Qu'elle allègue que l'appelante a violé les dispositions de l'article 64 du Traité OHADA (sic);
Que subsidiairement, l'intimée soutient que des zones d'ombre subsistent sur le quantum à la créance;
Que dame B., sa trésorière, était en même temps actionnaire et représentante de 3A auprès de l'intimée;
Qu'à ce titre, elle a reçu différentes sommes pour le compte de l'appelante;
Qu'elle sollicite une mise en état à l'effet de savoir réellement le montant des sommes perçues par dame B.;
DES MOTIFS
EN LA FORME
Considérant que l'appel interjeté par la Compagnie d'Assurances a respecté les dispositions légales; qu'il y a lieu de le déclarer recevable;
AU FOND
Considérant que d'une part, pour rejeter la demande en paiement de la somme de 2.831.824 F, le premier juge a estimé que le Tribunal a déjà ordonné à la COTUVA le paiement de cette somme;
Mais considérant qu'il ne résulte nulle part des pièces de la procédure que le Tribunal ait ordonné un tel paiement;
Que, d'autre part, pour constater la nullité de l'acte de conversion et rejeter la demande de ce chef, ce premier juge a estimé que la Société 3A n'a pas respecté les dispositions de l'article 69 du Traité OHADA (sic);
Mais considérant que l'appelant devant le premier juge n'a pas demandé la conversion en saisie vente;
Qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement querellé puis de statuer à nouveau.
Sur la demande en paiement
Considérant qu'il est constant, comme résultant des pièces produites par la Compagnie Les 3A, que la Société COTUVA lui est redevable de la somme de 2.381.824 F; qu'i1 y a donc lieu de condamner la COTUVA à lui payer cette somme.
Sur la validation
Considérant que la procédure de validation de saisie conservatoire n'est pas prévue par le Traité OHADA (sic);
Que dès lors, il convient de renvoyer la Compagnie Les 3A à se conformer aux dispositions de l'article 69 du Traité OHADA (sic).
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
– Déclare la Compagnie d’Assurances Les 3A recevable en son appel relevé du jugement civil N° 137 rendu le 26 novembre 1998 par la Section du Tribunal d’Aboisso.
AU FOND
– L’y dit partiellement fondé;
– Infirme le jugement querellé en toutes ses dispositions;
Statuant à nouveau :
– Condamne la COTUVA à payer à la Compagnie Les 3A la somme de 2.831.821 francs;
– Renvoie Les 3A à se conformer aux dispositions de l’article 69 du Traite OHADA s’agissant de la conversion de saisie conservatoire en saisie vente.
Président : M. CHAUDRON Maurice.
Note anonyme
Lorsque le créancier saisissant veut transformer la saisie conservatoire en saisie vente, doit-il, au préalable, faire valider la saisie conservatoire ? C’est à cette question que répond par la négative la Cour d’Appel, en disant que pareille procédure n’est pas prévue par l’Acte Uniforme portant voies d’exécution. C’est pourquoi, elle renvoie le créancier saisissant à se conformer à l’article 69 de l’Acte Uniforme qui prévoit que pour arriver à la saisie vente, à partir de la saisie conservatoire, il suffit pour le créancier de demander la conversion de la saisie conservatoire en saisie vente.
NDRS. On peut regretter que les juges confondent le Traité OHADA avec les Actes uniformes de cette organisation.