J-03-06
Voir Ohadata J-03-62, Ohadata J-03-321,Ohadata J-03-323
SAISIE IMMOBILIRE – ADJUDICATION – APPEL CONTRE LA DECISION PAR LAQUELLE LE TRIBUNAL REJETTE LES DIRES ET ORDONNE LE RENVOI A L’AUDIENCE D’ADJUDICATION – EFFET SUSPENSIF DE L’APPEL – SURSIS A L’ADJUDICATION.
Article 72 AUPSRVE
Article 278 AUPSRVE
Article 281 AUPSRVE
Article 297 AUPSRVE
Article 299 AUPSRVE
Article 300 AUPSRVE
Article 301 AUPSRVE
En application de l’article 300 de l’AUPSRVE en vertu duquel l’appel est exercé dans les conditions de droit commun, on doit considérer que l’appel formé contre la décision par laquelle le tribunal rejette les dires et ordonne le renvoi à l’audience d’adjudication suspend l’exécution de celle-ci; par suite il y a lieu de surseoir à l’exécution d’une telle décision et donc à l’adjudication jusqu’à la décision de la Cour d’Appel.
(Tribunal Régional Hors classe de Dakar, jugement du 09 mars 1999 EGBEP, Cheikh Tidiane Niang c/ Abdoulye Niang).
LE TRIBUNAL
ATTENDU que par écrits en date du 25 février 1999, reçu le 26 février 1999 au Greffe du Tribunal de céans, Cheikh Ahmed Tidiane NIANG, Abdoulaye NIANG et la SARL Entreprise générale de Bâtiment et d’Eclairage Publics ont consigné de nouveaux dires aux cahier des charges établi et déposé par Maître Boubacar WADE pour le compte de la banque Islamique du Sénégal et ce, pour obtenir la vente du T.F n° 27.503/DG;
SUR LA RECEVABILITE DES DIRES :
ATTENDU que la banque Islamique du Sénégal a conclu à l’irrecevabilité des dires au motif que le dépôt de dires n’est prévu par l l’Acte Uniforme qu’à l’article 72 à l’occasion de l’audience éventuelle; Qu’elle a ajouté que les formalités tendant à la remise et prévues par l’article 281 de l’Acte Uniforme n’ont pas été respectées alors que l’article 297 de l’Acte Uniforme prévoit que les délais prévus à l’article 281 sont prescrits à peine de déchéance;
ATTENDU que le dépôt des dires a été fait en conformité avec les dispositions de l’article 299 de l’Acte Uniforme selon lesquelles les demandes fondées sur un fait ou un acte survenu ou révélé postérieurement à l’audience après cette audience, mais seulement, à peine de déchéance, jusqu’au même jour avant l’adjudication, Qu’il y a lieu de déclarer les dires recevables;
AU FOND :
ATTENDU que les disants ont d’abord sollicité le sursis à l’adjudication au motif que la décision du juge des Criées du 02 février 1999 rejetant les dires et ordonnant la poursuite de l’adjudication n’est pas exécutoire pour n’être pas assortie de l’exécution provisoire; Qu’or, appel a été interjeté contre cette décision par exploit de Maître Aloyse NDONG et ce, conformément à l’article 300 de l’Acte Uniforme; Que ce texte qui indique que les voies de recours sont exercées dans les conditions de droit commun est la preuve que l’appel et son délai sont suspensifs de l’exécution de la décision;
Qu’ils ont ajouté que même si la décision du 02 février 1999 était assortie de l’exécution provisoire, cela n’aurait pu permettre l’adjudication, puisqu’avec l’Acte Uniforme précité, l’adjudication ne peut être poursuivie qu’avec un titre définitivement exécutoire;
ATTENDU que les disants ont ensuite soutenu que l’article 278 de l’Acte Uniforme a été violé en ce que la Banque Islamique du Sénégal ne justifie d’aucun acte de publicité et, encore moins, qui respecte les dispositions susvisées; Qu’il en résulte, selon eux, que l’adjudication est impossible;
ATTENDU qu’il résulte des éléments du dossier que, par exploit en date du 24 février 1999 de Maître Aloyse NDONG, Huissier de justice à Dakar, les disants ont interjeté appel à l’encontre du jugement n°131 rendu le 2 février 1999 par le Tribunal des Criées qui a rejeté les dires comme mal fondés et ordonné le renvoi de la cause et des parties à l’audience d’adjudication du 9 mars 1999;
ATTENDU que l’appel précité a été exercé sur le fondement de l’article 300 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; Que ce texte précise que l’appel est exercé dans les conditions de droit commun;
ATTENDU qu’il est de principe qu’aussi bien le délai d’appel que l’appel lui-même sont suspensifs de l’exécution de décision querellée sauf disposition contraire de la loi;
ATTENDU qu’au surplus, si l’article 300 précité dispose que la voie d’appel n’est ouverte que lorsque le Tribunal des Criées statue sur le principe même de la créance ou sur les moyens de fond tirés de l’incapacité d’une des parties, de la propriété, de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité des biens saisis, il n’appartient pas au juge des Criées saisi d’une demande d’adjudication de se prononcer sur la recevabilité de l’appel;
Qu’il s’y ajoute que le fait que l’article 301 de l’Acte Uniforme précité impartisse un délai de 15 jours à compter de l’Acte d’appel pour statuer conforte la thèse du caractère suspensif de l’appel prévu par l’article 300;
Qu’il échet de surseoir à statuer jusqu’à ce que la Cour d’Appel se prononce;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de Criées et en premier ressort;
Déclare les dires recevables :
Vu l’Acte d’appel versé aux débats et les dispositions des articles 300 et 3001 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
Ordonne le sursis à statuer jusqu’à ce que la Cour d’Appel rende sa décision;
Ainsi fait jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier
Observations par Ndiaw DIOUF,
Agrégé des Facultés de droit,
Directeur du Centre de Recherche, d’Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA),
Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’UCAD
L’appel dirigé contre la décision rendue sur incident a-t-il pour effet d’obliger le tribunal à surseoir à l’adjudication ? C’est la question à laquelle le tribunal régional hors classe de Dakar devait répondre dans l’affaire opposant Abdoulaye Niang à Cheikh Tidiane Niang et la société à Responsabilité limitée EGBEP. Dans le cadre d’une procédure d’expropriation forcée initiée par Cheikh Tidiane Niang et la SARL, le débiteur saisi a formulé des dires qui ont été rejetés par le tribunal lors de l’audience éventuelle. Ce débiteur a relevé appel de la décision et soumis au tribunal un autre dire pour lui demander qu’il soit sursis à l’adjudication.
Le tribunal régional hors classe de Dakar fait droit à sa demande aux motifs que, lorsque des dires sont rejetés à l’occasion de l’audience éventuelle, le délai d’exercice de l’appel et l’exercice de l’appel dans le délai suspendent l’exécution de la décision et qu’il y a lieu, dés lors, de surseoir à l’adjudication; il se fonde sur le dernier alinéa de l’article 300 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution qui prévoit que l’appel est exercé selon les conditions du droit commun. Selon le tribunal, par cette formule, l’Acte uniforme renvoie au droit commun de la procédure civile; or, il résulte de ces règles que l’appel dans le délai ainsi que le délai d’appel ont un caractère suspensif (V. sur cette question Obs. Ndiaw DIOUF ss Trib. Régional hors classe de Dakar, jugement n° 1.811 du 13 juillet 1994 Adama Thiam c/ SNR, Ohadata J-03-*).
Le tribunal ajoute que cette règle ne cède même pas si l’appel est irrecevable parce que formé contre une décision qui ne fait pas partie de celles qui sont visées par l’article 300. Rappelons que ce texte n’admet l’appel que contre les décisions statuant sur le principe même de la créance ou sur les moyens de fond tirés de l’incapacité d’une des parties, de la propriété, de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité des biens saisis. Cette solution se justifie selon le tribunal par le fait qu’il n’appartient pas au juge des criées saisi d’une demande d’adjudication de se prononcer sur la recevabilité de l’appel.