J-03-103
SAISIE IMMOBILIERE – JUGEMENT D’ADJUDICATION – DEMANDE DE REPORT DE L’AUDIENCE D’ADJUDICATION – ABSENCE DE COMMUNICATION DES ACTES DE LA PROCEDURE A L’ADRESSE ACTUELLE DU DEBITEUR – CONNAISSANCE DU DEBITEUR DE L’EXISTENCE DU CAHIER DE CHARGES PAR SOMMATION DE L’AUTORITE ADMINISTRATIVE – CONNAISSANCE DU CREANCIER DE L’ACTUELLE ADRESSE DU DEBITEUR A LAQUELLE IL A ADRESSE TOUTES LES CORRESPONDANCES – NON RESPECT DES DROITS DE LA DEFENSE ET RISQUE DE PREJUDICE INCOMMENSURABLE – PROPOSITION CONCRETE DE REGLEMENT DE LA CREANCE PAR ECHEANCIER – REPORT DE L’AUDIENCE D’ADJUDICATION (OUI).
Est constitutif d’une violation des droits de la défense, le fait pour le créancier qui, connaissant bien la nouvelle adresse de son débiteur, lui a volontairement servi les actes de poursuite par la voie de l’autorité administrative après les avoir envoyés aux anciennes adresses, l’empêchant ainsi de prendre connaissance, à temps, du dépôt du cahier des charges pour y consigner des dires de contestation dans le délai légal.
Ce fait est également constitutif d’une cause justifiant le report de l’audience d’adjudication d’autant plus que le débiteur a fait des propositions de paiement par un échéancier.
(Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, jugement du 11 février 2003, Babacar NIANG et Entreprise EBEN contre BST).
TRIBUNAL RÉGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR
Audience publique des criées du 11 février 2003
Sur quoi, LE TRIBUNAL, STATUANT SUR LES DIRES
Attendu que par écritures en date du 31.01.2003 reçues au greffe le même jour, l’entreprise EBEN, représentée par le sieur Babacar NIANG, ès-nom et ès-qualité de caution hypothécaire, a régulièrement consigné des dires au cahier des charges dressé par la Banque Sénégalo-Tunisienne (B.S.T.), aux fins d’obtenir le report de l’audience d’adjudication;
Attendu que dans sa requête, le sieur NIANG a soutenu que la B.S.T. est en train de poursuivre la vente forcée de son immeuble objet du T.F. N° 2 505/DP, alors qu’aucun acte de procédure ne lui a été servi, conformément à la loi qui est d’ordre public;
Qu’il n’a reçu la sommation d’avoir à prendre connaissance du cahier des charges que le 31.03.2003, par le biais de la préfecture de Dakar, après avoir été alerté par la parution de l’avis de vente du T.F. N° 2505/DP;
Que fait plus grave, la banque n’ignorait pas son adresse actuelle, qui est située au boulevard du Général De Gaulle, puisqu’elle lui a adressé toutes les correspondances à ladite adresse;
Que cet état de fait est contraire au respect des droits de la défense et risque de lui causer un préjudice incommensurable !
Que concrètement et en vue de régler cette affaire de manière définitive, il propose de régler immédiatement la somme de :
– 1.000.000 F en prenant en charge tous les frais de justice qui en découlent;
– 1.800.000 F en fin février 2003;
– 1.000.000 F par trimestre à terme échu, à compter de fin mai 2003;
Attendu qu’en réponse, la B.S.T a rétorqué que le sieur Babacar NIANG tente de se réfugier derrière les dispositions de l’article 289 de l’AU/PSRVE, pour assurer la défense correcte de ses intérêts, alors que paradoxalement, il formule dans le même temps, des propositions de règlement laissant clairement entrevoir ainsi qu’il n’a aucun moyen pertinent à faire valoir;
Que d’ailleurs, le sieur Babacar NIANG, qui a constitué conseil et déposé ses dires et observations, a eu tout le temps d’organiser sa défense;
Que le Tribunal relèvera aisément qu’avant de servir ses actes à Mairie, l’Huissier instrumentaire s’est constamment rendu au 12, rue Fleurus à Dakar (adresse indiquée dans la convention d’ouverture de compte, comme étant le siège social de son entreprise individuelle) et à la Sicap Liberté V villa N° 5383 (adresse indiquée sur la convention d’ouverture de crédit), où il lui a été déclaré que tant le sieur NIANG que la société EBEN y étaient inconnus;
Que le sieur NIANG ne peut en vouloir qu’à lui-même, s’il a changé d’adresse sans en informer la banque;
Que s’agissant des correspondances, elles ont été adressées plus précisément à la boîte postale N° 4278, comme cela s’est toujours fait, et ce, d’autant plus que la mention « boulevard Général De Gaulle » est à la fois vague et imprécise comme adresse et ne saurait suffire à localiser la société EBEN, en l’absence d’une notification claire et précise de la nouvelle adresse à la banque;
Attendu qu’il est constant comme cela résulte de la lette de clôture du compte et de la mise en demeure en date du 27 septembre 2001, que la banque connaissait bien la nouvelle adresse de la société EBEN, située au boulevard Général De Gaulle B.P. 4278;
Qu’en servant les actes de poursuite à Mairie après les avoir envoyés aux anciennes adresses, la banque a sciemment violé les droits de la défense, puisque la débitrice n’a pas pu prendre connaissance à temps du dépôt du cahier des charges, pour y consigner éventuellement des dires et contestation dans le délai légal;
Que cela est constitutif d’une cause grave justifiant le report, d’autant plus que le débiteur, pour se libérer, a fait des propositions de paiement;
Qu’il échet en conséquence de faire droit à la requête, en renvoyant l’affaire à l’audience d’adjudication du mois d’avril.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de criées et en dernier ressort;
EN LA FORME
– Déclare la requête recevable;
AU FOND
– Ordonne le report de la vente à l’audience d’adjudication du mois d’avril.
Ainsi fait, jugé et prononcé, les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.