J-03-113
Droit commercial général – Contrat de bail – Résiliation – Mise en demeure préalable – Inobservation – Expulsion (non).
Article 101 AUPSRVE
Le propriétaire qui entend résilier le contrat de bail doit, conformément aux dispositions de l'article 101 de l'Acte Uniforme relatif au droit commercial, servir un mois au préalable, une mise en demeure à son locataire. Il doit être par conséquent, débouté de sa demande d'expulsion, dès lors que la preuve n’est pas faite qu’une mise en demeure a été servie au locataire.
[Cour d'Appel d'Abidjan, Arrêt N° 888 du 25 juillet 2000, N c/ dame T, Le Juris Ohada, 1/2003, janvier-mars 2003, p. 41 et note].
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Par un exploit d'huissier en date du 28 juin 2000, N., né en 1958 à Abidjan, Aboisso, demeurant à Abidjan Marcory BP 1477 Abidjan 18, a relevé appel de l’ordonnance de référé N° 1867 rendue le 12 mai 2000, qui a prononcé son expulsion du local que lui loue dame T., pour non-respect des clauses du contrat de bail;
Au soutien de son recours, N. déclare qu'il est locataire d’un local appartenant à dame TOURE, depuis 1990; qu’il a procédé à des travaux de modifications pour rendre le lieu fonctionnel; que ces travaux ont coûté douze millions et ont été réalisés entre 1991 et 1992; que le loyer, qui était de 60.000 F, est passé à 70.000 F et à 100.000 F en 1998; qu'il a toujours payé ses loyers, malgré ces modifications successives; que sous le prétexte qu'il se livrerait à une sous-location, le bailleur l’a assigné en référé expulsion, pour violation des clauses du contrat, le 05 mai 2002, pour l'audience du 12 mai 2000; que n'ayant pas reçu l'assignation à comparaître, il n’a pu faire valoir ses moyens, et il a été expulsé le 12 mai 2000, pour le motif susvisé;
Monsieur N. déclare que l’ordonnance d’expulsion est contraire à l’article 101 du Traité OHADA sur le droit commercial, qui impose au bailleur qui entend résilier le bail, à servir une mise en demeure à son locataire, un mois avant la demande; il déclare qu’il n’a pas reçu cette mise en demeure de se conformer aux clauses du contrat de bail, et que le texte de l'article 101 a été violé; qu’il s’agit d’une disposition d'ordre public dont la violation doit conduire à l'annulation de la décision critiquée;
L'appelant fait observer par ailleurs, que la prétendue sous-location alléguée est un prétexte pour faire expulser le locataire, sans payer l’indemnité d’éviction qui lui est légalement acquise;
L'ordonnance d'expulsion a été signifiée le 23 juin 2000 au comptable de la société TIMEL, dont N. est le Directeur;
Dame T., intimée, n'a pas comparu, bien que citée à Mairie.
MOTIFS DE L’ARRET
LA FORME DE L’ARRET
Dame T. veuve T. a été citée à Mairie, et aucune lettre recommandée ne semble lui avoir été expédiée pour l’informer, conformément aux dispositions de l'article 251 du code civil. Elle n'a donc pas eu connaissance de ce que son locataire a relevé appel de l'ordonnance d'expulsion rendue le 12 mai 2000; il convient en conséquence, de rendre un arrêt de défaut à son égard.
SUR LA RECEVABlLITE DE L’APPEL
L'ordonnance d'expulsion a été signifiée à Mr N. le 23 juin 2000, en ses bureaux sis en zone 4 rue Paul Langevin, et il a relevé appel de cette ordonnance par exploit d'huissier du 28 juin 2000;
En application de l'article 325 du code de procédure civile, qui prescrit un délai de huit jours pour interjeter appel des ordonnances de référé, il échet de constater que N. est recevable en son appel;
SUR LE FOND
L'ordonnance N° 1867 rendue le 12 mai 2000 a prononcé l'expulsion de Mr N., au motif que celui-ci a sous-loué le local que lui louait dame TOURE, et ce, en violation des clauses contractuelles, qui interdisent la sous-location;
Mr N. conteste la régularité de la décision et fait valoir qu'une mise en demeure devait lui être servie un mois avant la demande d'expulsion, pour respecter le caractère commercial du bail;
En effet, suivant les dispositions de l'article 101 du Traité OHADA relatif au droit commercial, le propriétaire qui entend résilier le contrat de bail, doit servir un mois au préalable une mise en demeure à son locataire; que c'est à juste raison que N., qui n'a pas bénéficié de cette clause légale, s'en prévaut, la preuve n'étant pas faite qu'une mise en demeure 1ui a été servie;
Qu'il y a lieu de la recevoir en sa contestation, et d'infirmer l'ordonnance querellée.
SUR LES DEPENS
Dame T. ayant succombé, il échet de 1a condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement par défaut, en matière civile et en dernier ressort;
– Reçoit N. en son appel relevé le 28 juin 2000 de l'ordonnance de référé rendue le 12 mai 2000 par la juridiction présidentielle du Tribunal d'Abidjan.
AU FOND :
– L'y dit bien fondé;
– Infirme l'ordonnance querellée;
Statuant à nouveau;
– Déboute dame T. de sa demande;
– Condamne dame T. aux dépens.
– Président : M. AGNINI Youssouf.
Note
et arrêt rappelle le caractère obligatoire de la mise en demeure du locataire avant toute expulsion par le bailleur (dans le même sens, voir CAA, Arrêt N° 331 du 20 mars 2001, Le Juris Ohada, n° 1/2003, janvier-mars 2003, p. 51 et Ohadata J-03-117).
A défaut, le bailleur doit être débouté de sa demande.