J-03-115
Droit commercial général – Bail commercial – Renouvellement – Location ayant continué après l'expiration du bail – Renouvellement implicite (oui) – Absence de congé du bailleur – Expulsion du locataire (non).
Article 92 AUDCG
Le bail est réputé avoir été renouvelé implicitement, le bailleur n'ayant délivré aucun congé au locataire, dès lors que la location a continué après l'expiration du bail.
Par conséquent, le bailleur doit être débouté de sa demande d'expulsion, la demande de renouvellement prévue par l'Acte Uniforme relatif au droit commercial général n'étant pas prescrite à peine de résiliation de plein droit ou d'expulsion du locataire.
[Cour d’Appel d’Abidjan. Arrêt N° 902 du 25 juillet 2000, SIRD c/ F., Le Juris Ohada, n° 1/2003, janvier-mars 2003, p. 46 et note].
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Suivant exploit d’huissier en date du 22 juin 2000, la société civile immobilière Résidence DIANA dite SIRD, a relevé appel de l’ordonnance N° 1064 rendue le 24 mars 2000 par le Juge des référés du Tribunal de Première Instance d'Abidjan, qui s'est déclaré incompétent;
Au soutien de son appel, la SIRD expose que le sieur F. est entré dans les locaux qu'il occupe à la Résidence DIANA, en vertu d'un contrat de bail en date du 1er janvier 1997, expirant au 31 décembre de la même année;
Des contrats successifs ont été conclus, dont le dernier expirait au 31 décembre 1999;
La SIRD fait valoir que l'article 92 du Traité OHADA relatif au bail commercial fait obligation au preneur, de demander à son bailleur le renouvellement dudit contrat, au plus tard trois mois avant la date d'expiration du bail;
F. n'ayant pas accompli cette formalité, le bailleur se voit dans l'obligation de saisir le Tribunal afin d'obtenir l’expulsion de son locataire, devenu un occupant sans titre ni droit;
La SIRD fait alors grief au premier Juge de s'être déclaré incompétent, au motif qu'il y aurait des difficultés sérieuses quant aux modalités d'application du bail;
Elle estime qu'il n'y a aucune difficulté relative à l'application d'un bail, puisqu'aussi bien F. n'était pas en possession d'un titre de location à jour pour la période allant du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2000;
De plus, dit-elle, le Juge de référé doit se déclarer incompétent, s'il existe une contestation sérieuse, laquelle n'est pas synonyme de difficulté sérieuse;
Il sollicite l'infirmation de l'ordonnance querellée et l'expulsion de F. des lieux qu'il occupe.
DES MOTIFS
Considérant que nulle part 1a SIRD ne fait état d'un quelconque arriéré de loyer à ce jour;
Dès lors, la location ayant continué après le 31 décembre 1999, le bail est réputé avoir été renouvelé implicitement, le bailleur n'ayant délivré aucun congé au locataire;
Considérant qu’en tout état de cause, la demande de renouvellement prévue par l'article 92 du Traité OHADA n'est pas prescrite, à peine de résiliation de plein droit du bail ou d'expulsion du locataire;
Qu'il échet d'infirmer la décision querellée et de débouter la SIRD de sa demande en expulsion.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
– Reçoit la SIRD en son appel relevé de l'ordonnance N° 1064 rendue le 24 mars 2000 par le Juge des référés du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
– Infirme l'ordonnance querellée;
Statuant à nouveau, déboute la SIRD de sa demande en expulsion.
– Président : M. SEKA ADON Jean-Baptiste.
Note
Quel est le sort du bail dont le renouvellement n'a pas été demandé par le preneur ? Est-il résilié de plein droit ?
La Cour répond que la demande de renouvellement n’est pas prescrite, à peine de résiliation de plein droit. Cette position s'explique certainement par le fait que la demande de renouvellement est facultative pour le preneur. La déchéance prévue par l'article 92 ne se conçoit que lorsque le preneur use du droit au renouvellement.
C'est pourquoi, lorsque la location a continué après l'expiration du bail, sans renouvellement express, il y a lieu de considérer que le bail a été renouvelé implicitement par les parties, le bailleur n'ayant pas de son côté donné congé au locataire.
En conséquence, il ne peut expulser 1e locataire, le bail n'étant pas résilié du fait de l’absence de renouvellement de la part de celui-ci.