J-03-168
Voir Ohadata J-03-324 et Ohadata J-03-328
SAISIE IMMOBILIERE – JUGEMENT RENDU A L'AUDIENCE EVENTUELLE – APPEL – INCAPACITE ET INSAISISSABILITE INVOQUEES A TORT – RECEVABILITE (NON).
L'appel contre une décision rendue à l'audience éventuelle doit être déclaré irrecevable lorsque l'appelant invoque à tort l'incapacité et l'insaisissabilité.
(Cour d’appel de Dakar, arrêt n° 394 du 8 septembre 2000, Issa SALL c/ SGBS).
COUR D’APPEL DE DAKAR
CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE 1
ARRET N°394 DU 08 SEPTEMBRE 2000
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Oui les parties en toutes leurs demandes, fins et conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
Suivant exploit servi les 15 & 16 mars 2000, Issa SALL a interjeté appel contre le jugement rendu par le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar en matière de saisie immobilière en son audience éventuelle du 07 mars 2000, exploit ayant été notifié à la SGBS et au Greffier en Chef du Tribunal conformément aux dispositions de l’article 301 de l’Acte Uniforme sur les procédures Simplifiées de Recouvrement et les Voies d’Exécution;
EN LA FORME
SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL
Moyens et prétentions des parties
La SGBS a suivant conclusions du 07 juillet 2000 soulevé à titre principal l’irrecevabilité de l’appel du sieur Issa SALL;
A l’appui de l’exception soulevée, ce dernier invoque les dispositions de l’article 300 de (AU/PSRVE) en ce qu’elles prévoient cinq cas d’ouverture d’appel en matière de criées;
– contestation sur le principe de créance;
– l’incapacité de l’une des parties;
– la propriété des biens;
– l’insaisissabilité des biens;
– l’inaliénabilité des biens;
Or les arguments soulevés par Issa SALL ne se fondent sur aucun des cas susvisés;
L’appelant pour sa part, soutient dans ses écritures du 10 août 2000, la recevabilité de son appel pour l’avoir fondé sur l’incapacité, d’une part, de l’insaisissabilité d’autre part, au regard des mêmes dispositions de l’article 300 AU/PSRVE;
Il fait plaider sur l’incapacité, le fait d’avoir soulevé en première instance l’irrecevabilité de l’action de la SGBS tirée d’une fin de non recevoir résultant de la novation intervenue dans les obligations des parties par suite de la signature d’un protocole d’accord daté du 24 janvier 1997;
Sur le moyen tiré de l’insaisissabilité, il déclare l’avoir soulevé devant le premier juge pour avoir rapporté la preuve de l’absence de titre exécutoire dès lors que le protocole d’accord emportant novation sous seing privé et n’a pas été résolu, il considère qu’un immeuble est insaisissable en l’absence de titre exécutoire, et lorsqu’il a été convenu entre les parties qu’il sera vendu à l’amiable;
Ainsi, il considère son appel recevable et fait plaider le rejet de l’exception d’irrecevabilité comme mal fondée;
MOTIFS DE LA DECISION
Mais considérant que les dispositions de l’article 300 alinéa 2 AU/PSRVE annoncent clairement que les décisions en matière de saisie -immobilière ne peuvent être frappées d’appel que lorsqu’elles statuent sur les cinq cas limitativement énumérés ci-dessus;
Que dès lors tout moyen d’appel contre tel jugement doit porter sur ces causes;
Mais considérant que les notions d’incapacité et d’insaisissabilité ont une signification juridique bien précise ne pouvant souffrir d’aucune forme d’interprétation circonstancielle; Que l’incapacité d’une partie s’entend de l’état d’un « litigant », privé par la loi de jouissance ou de l’exercice de certains droits;
Que l’insaisissabilité s’entend des biens que la loi fait échapper totalement ou partiellement à la saisie dans le but de protéger un intérêt individuel ou collectif;
Qu’en conséquence l’absence d’un titre exécutoire qui est une condition de l’exécution forcée, ne peut fonder l’état d’incapacité, non plus la convention des parties, une situation d’insaisissabilité des biens, au sens de l’esprit et de la lettre de l’article
300 AUPSRVE;
Considérant par ailleurs que le jugement entrepris n’a pas statué sur l’une des causes prévues par l’Acte Uniforme; qu’il ne s’est prononcé que sur l’argument de la novation et sur celui de la non reproduction des références de la décision administrative affectant un terrain, tous les deux rejetés comme mal fondés
Qu’il y a lieu de rejeter l’appel formé par Issa SALL contre la décision entreprise comme mal fondée;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de saisie – immobilière, et en cause d’appel :
Déclare irrecevable, l’appel interjeté par Issa SALL contre le jugement rendu en audience éventuelle le 07 mars 2000 par le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar;
AINSI fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 08 septembre 2000 séant au Palais de justice de ladite ville Bloc des Madeleines à laquelle siégeaient Monsieur Mouhamadou DIAWARA, Président, Messieurs Mamadou DEME et Mamadou DIAKHATE, Conseillers et avec l’assistance de Me Papa NDIAYE, Greffier.
ET ONT SIGNE LEPRESENT ARRET
LE PRESIDENT ET LE GREFFIER./.
Observations par Ndiaw DIOUF,
Agrégé des Faculté de droit,
Directeur du Centre de Recherche, d’Etude et de Documentation sur les Institutions et Législations Africaines (CREDILA),
Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’UCAD
Et Ibrahima SAMBE Magistrat
Il résulte de l'article 300 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution que les décisions rendues en matière de saisie immobilière ne sont susceptibles d'appel que si elles statuent sur le principe même de la créance ou sur des moyens de fond tirés de l'incapacité d'une partie, de la propriété, de l'insaisissabilité ou de l'inaliénabilité des biens saisis. Il faudrait cependant, pour que l'appel soit recevable que l'on se trouve réellement en présence de l'un des cas prévus par le texte; or il n'en est pas toujours ainsi. En effet, il arrive parfois que le débiteur saisi, pour faire admettre son appel invoque à tort l'un de ces cas. C'est ce qui s'est passé dans l'affaire qui a donné lieu à 'arrêt de la Cour d'Appel de Dakar ci-dessus reproduit.
Le débiteur saisi, qui a relevé appel contre le jugement rendu par le tribunal régional hors classe de Dakar en son audience éventuelle du 7 mars 2000 a conclu à la recevabilité aux motifs qu'il a soulevé devant le premier juge l'incapacité fondée sur la novation et l'insaisissabilité fondée sur l'absence de titre exécutoire. Il s'agit là de qualifications manifestement erronées et la Cour d'Appel l'a souligné en rappelant que l'absence de titre exécutoire ne peut fonder l'état d'incapacité, pas plus que la convention des parties ne peut fonder une situation d'insaisissabilité. Selon elle, en effet, l'incapacité s'entend de l'état d'un litigant privé de la jouissance et de l'exercice de ses droits alors que l'insaisissabilité s'entend de biens que la loi fait échapper totalement ou partiellement à la saisie.