J-03-169
SAISIE IMMOBILIERE – AUDIENCE EVENTUELLE – REMISE – CAUSE GRAVE – CREANCE DERISOIRE ET PROPOSITION SERIEUSE DE REGLEMENT.
Le débiteur saisi qui se borne à invoquer le caractère dérisoire de la créance et l’absence de menace sur le recouvrement de la créance n’établit pas l’existence d’une cause grave justifiant la remise de l’audience éventuelle, celle-ci ayant pour objet non pas la vente de l’immeuble mais le règlement des contestations relatives à la régularité de la procédure.
(Tribunal régional de Dakar, CBAO c/ Moustapha LO).
TRIBUNAL EGIONAL HORS CLASSE DAKAR
JUGEMENT N° 1044 DU 7 JUIN 1999
CBAO C / MOUSTAPHA LO
LE TRIBUNAL STATUANT SUR DES DIRES
Attendu que par écritures reçues au greffe le 1er juin 1999, Me TALAM BOUSSO agissant pour le compte de MOUSTAPHA LO a consigné des dires au cahier des charges dressé par Maître FRANCOIS SARR & ASSOCIES pour le compte de la Compagnie Bancaire de l’Afrique Occidentale (CBAO) pour parvenir à la vente par expropriation forcée de l’immeuble objet du T.F n° 20.560/ DG appartenant à son débiteur;
Qu’il échet de déclarer lesdits dires recevables en la forme;
AU FOND
Attendu que le sieur Moustapha LO a sollicité la remise de l’audience éventuelle au motif qu’il a entrepris des démarches auprès de la banque pour un règlement amiable du litige; que les pourparlers sont très avancés et des propositions faites à la banque, par lui, sont sur le point d’aboutir;
Qu’en outre, la créance de la CBAO qui est de 7.020.628 francs est dérisoire par rapport à la valeur de la maison et même de la mise à prix; qu’enfin, ladite créance est nullement en péril parce qu’étant garantie par une hypothèque forcée inscrite sur son immeuble;
Qu’il estime ainsi qu’il causes graves et dûment justifiées qui doivent entraîner la remise de l’audience éventuelle en application des dispositions de l’article 273 de l’AU/PSRVE pour lui permettre de mener à leur termes les discussion en cours avec la banque;
Attendu que par écritures en date du 4 juin 1999 la CBAO résiste aux prétentions du disant en faisant d’abord observer que l’objet de l’audience éventuelle n’est pas la vente de l’immeuble mais permet seulement de vider les contestations de forme et de fond soulevées par le débiteur; Que c’est seulement à l’audience d’adjudication qu’il est procéder à la vente; Que par conséquent, c’est à cette audience seulement que le débiteur peut éventuellement formuler une demande tendant à avoir différé son expropriation;
Qu’ensuite la CBAO conteste être en discussion avec le sieur LO et soutient que la lettre que ce dernier dit lui avoir adressée ne peut établir la réalité de telles discussions;
Attendu que c’est à bon droit que la CBAO a fait observer que l’audience éventuelle a pour seul objet de vider les contestations tant de forme que de fond relatives à la régularité de la procédure d’expropriation engagée;
Qu’une décision sur les contestations ne porte nullement atteinte à la propriété de l’immeuble saisi qui ne sera vendu qu’à l’audience d’adjudication;
ATTENDU par ailleurs que les pourparlers invoqués par le disant ne sont point établis;
Qu’en l’espèce, il n’est établi l’existence d’aucune cause grave au sens de l’article 273 de l’AU/PSRVE;
Qu’il y a dès lors lieu de rejeter la demande de remise;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
Déclare les dires recevables en la forme;
AU FOND
Rejette la demande de remise formulée par le sieur Moustapha LO.
Ordonne la continuation des poursuites;
Renvoi la cause et les parties à l’audience du 13 juillet 1999.
Ainsi fait jugé et prononcé, les jours, mois et an que dessus.
Et ont signé, le Président et le greffier./.
Observations par Ndiaw DIOUF,
Agrégé des Facultés de droit,
Directeur du Centre de Recherche d’Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations africaines (CREDILA),
Faculté des Sciences Juridiques et Politiques de l’UCAD
Et Ibrahima SAMBE, magistrat
Dans cette affaire, la CBAO avait entrepris la réalisation de sa garantie inscrite sur le droit d’usage à temps octroyé à Moustapha LO sur l’immeuble objet du T.F 20.560 /DG. Pour se prévaloir des dispositions de l’article 273 de l’AU/PSRVE selon lesquelles une remise de l’audience éventuelle peut avoir lieu pour causes graves et dûment justifiées, Moustapha Lo a invoqué l’existence de pourparlers très avancés avec son créancier, le caractère dérisoire de la créance de la CBAO par rapport à la valeur de l’immeuble et même de la mise à prix et le fait qu’il n’y avait aucune menace sur le recouvrement de la créance.
Pour avoir rejeté la demande de remise aux motifs d’une part qu’une remise de la vente ne peut être formulée qu’à l’audience d’adjudication et d’autre part, que les pourparlers invoqués ne sont point établis, le tribunal s’est mépris sur le contenu de l’article 273 de l’AU/PSRVE en suivant la CBAO qui a invoqué l’impossibilité de demander la remise de la vente à l'audience éventuelle. Le tribunal a également manqué l’occasion de dire si l’existence des pourparlers peut s’analyser en causes graves au sens se l'article 273 de l’ AUPSRVE