J-03-17
SAISIE ATTRIBUTION – ERREUR COMMISE PAR LE TIERS SAISI SUR L’IDENTITÉ DU DÉBITEUR SAISI – FAUSSE DÉCLARATION (NON) – RESPONSABILITÉ DU TIERS SAISI (NON) – ARTICLE 156 AUPSRVE.
Lorsqu’au cours d’une saisie attribution, la banque tiers saisi commet de bonne foi une erreur sur l’identité du débiteur, elle ne fait pas une déclaration inexacte, incomplète ou tardive susceptible d’engager sa responsabilité.
Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt N° 584 du 03 mai 2002. CITIBANK (Me Jean-Pierre ELISHA) c/ AFROCOM (Me VIEIRA).
Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire)
Chambre civile et commerciale
Audience du vendredi 03 mai 2002
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCÉDURES ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit en date du 21 janvier 2002, la CITIBANK a relevé appel du jugement n° 410 rendu le 16 mai 2001 par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu’il suit :
« - Reçoit la Société AFROCOM-CI en son action;
– L’y dit bien fondée;
– Condamne la CITIBANK au paiement des causes de la saisie; »
La CITIBANK expose que par acte du 5 juillet 1999, la Société AFROCOM-CI a pratiqué saisie attribution entre les mains de diverses banques et sur le compte de son débiteur DARWICHE Nassrat Moussa;
Poursuivant, elle indique avoir déclaré sur l’acte de saisie, la mention suivante :
« Compte créditeur de 14.696.545 francs »;
Après vérification, poursuit-elle, elle s’est aperçue que son client était DARWICHE Nassrat Ali et non pas DARWICHE Nassrat Moussa qui lui, n’a pas de compte ouvert dans ses livres;
Elle précise qu’elle a porté cette erreur à la connaissance du créancier saisissant, par exploit du 19 juillet 1999;
En cause d’appel, la CITIBANK reproche au premier Juge d’avoir fait une mauvaise interprétation de l’article 156 de l’Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution;
Elle explique à cet effet, que ce texte vise une déclaration intentionnellement fausse, ce qui n’est pas assimilable à une erreur sur l’identité du client, erreur commise de bonne foi;
Par ailleurs, CITIBANK soutient que les conditions d’une saisie attribution ne sont pas réunies, en ce sens que son client DARWICHE Nassrat Ali n’est pas le débiteur de la Société AFROCOM-CI, et par conséquent, CITIBANK ne saurait avoir la qualité de tiers saisi;
Elle sollicite en conséquence l’infirmation pure et simple du jugement attaqué, ou à défaut, une mise en état de la procédure;
La Société AFROCOM-CI, pour sa part, fait plaider que l’acte d’appel du 21 juin 2002 est nul, au motif qu’aucune copie dudit acte n’a été déposée à la mairie, conformément aux dispositions des articles 250 et 251 du code de procédure civile;
De surcroît, indique-t-elle, l’acte d’appel ne contient pas les émoluments de l’Huissier instrumentaire, comme l’exige l’article 246 alinéa 8 du code de procédure civile;
Au fond, elle fait valoir qu’il y a bien eu de la part de CITIBANK une déclaration inexacte et la rectification intervenue en est la preuve;
Elle estime que le tribunal a fait une juste application des dispositions de l’article 156 alinéa 3 de l’Acte Uniforme relatif aux voies d’exécution, et elle demande en conséquence la confirmation pure et simple du jugement déféré;
En réplique et relativement à l’exception de nullité de l’acte d’appel soulevée par l’intimé, la CITIBANK fait observer qu’elle a bien déposé l’acte à la Mairie et averti l’intimée par lettre recommandée avec accusé de réception du 22 janvier 2002;
Elle produit à l’appui de cette affirmation, une attestation du chef du bureau des huissiers de la ville d’Abidjan et une sommation interpellative dans laquelle la Mairie a reconnu détenir l’exploit d’appel du 21 janvier 2002;
S’agissant de l’omission des émoluments sur l’acte, CITIBANK fait remarquer que l’article 246 du code de procédure civile ne prévoit pas de nullité et que par ailleurs, cette omission n’a causé à l’intimée aucun préjudice pouvant justifier l’annulation de l’acte;
DES MOTIFS
SUR LA NULLITÉ DE L’ACTE D’APPEL
Il résulte des pièces versées aux débats qu’une copie de l’acte d’appel a bel et bien été déposée à la Mairie;
Par ailleurs, s’il est exact que cet acte ne contient pas les émoluments de l’Huissier, une telle omission n’est pas sanctionnée par la nullité;
De surcroît, elle n’a causé aucun préjudice à l’intimée;
L’appel relevé par La CITIBANK est en conséquence régulier et recevable;
AU FOND
Il résulte des productions que CITIBANK a commis une erreur sur l’identité du débiteur saisi;
Il n’est pas contesté par la Société AFROCOM-CI que le client de CITIBANK nommé DARWICHE Nassrat Ali n’est pas son débiteur;
Dès lors, c’est à juste titre que CITIBANK soutient que DARWICHE Nassrat Ali n’est pas le débiteur saisi, et en conséquence, elle ne saurait être tiers saisi;
En tout état de cause, il se manifeste que le premier Juge a fait une mauvaise interprétation des dispositions de l’article 156;
En effet, la déclaration inexacte, incomplète ou tardive concerne incontestablement la situation du débiteur;
En l’espèce, il n’y a pas eu déclaration inexacte concernant le débiteur de la société AFROCOM-CI, mais tout simplement une erreur sur les identités, erreur commise de surcroît de bonne foi;
Il convient en conséquence d’infirmer purement et simplement le jugement attaqué et débouter la société AFROCOM-CI de sa demande;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
– Reçoit CITIBANK en son appel;
AU FOND
– L’y dit bien fondée;
– Infirme le jugement entrepris;
Et statuant à nouveau;
– Déboute la société AFROCOM-CI de sa demande;
– La condamne aux dépens;
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan (1ère Chambre Civile), a été signé par le Président et le Greffier.