J-03-199
droit commercial général – bail commercial – expulsion du locataire – incompétence du juge des référés.
Le Juge du fond étant, aux termes de l’article 101 de l’Acte Uniforme portant Droit Commercial Général, seul compétent pour prononcer la résiliation et par voie de conséquence, l’expulsion du preneur d’un local à usage commercial, le Juge des référés ne peut statuer sur une demande en expulsion.
En le faisant, il outrepasse sa compétence.
Article 101 AUDCG
[Cour d’appel d’Abidjan, arrêt n°301 du 09 mars 2001, O. c/ dame A. née M, Le Juris Ohada, n° 2/2003, avril-juin 2003, p. 46, note anonyme].
La Cour,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par exploit en date du 14 décembre 2000 comportant ajournement au 29 décembre 2000, O. a relevé appel de l'ordonnance de référé n° 4247 rendue le 08 novembre 2000 par la juridiction présidentielle du Tribunal d’Abidjan, qui a ordonné son expulsion des lieux qu’il occupe, pour non-paiement de loyer, et l’exécution provisoire de la présente décision;
Des pièces du dossier, il ressort que par exploit en date du 25 septembre 2000, dame A., née M., a fait assigner O. en référé, pour voir ordonner son expulsion, au motif qu’elle subit un préjudice, du fait du non paiement de loyers pendant dix mois, du local à usage commercial qu'elle a donné en location à ce dernier;
Le défendeur, cité à sa personne, ne s'étant pas présenté, n'a fait valoir aucun moyen de défense;
Le Juge des référés, au motif que O. est redevable de la somme de 750.000 FCFA, représentant des loyers échus et impayés, a ordonné son expulsion des lieux loués;
En cause d'appel, O. sollicite l'infirmation de l'ordonnance entreprise, en faisant valoir d'une part, que cette ordonnance a été prise sans que l'assignation ait été délivrée à sa personne et, d'autre part, l'incompétence du Juge des référés en se fondant sur l'article 101 de l'Acte Uniforme portant droit commercial;
En réponse, dame A. insiste sur la mauvaise foi de O., qui a émis plusieurs chèques qui sont revenus impayés, et sollicite sa condamnation au paiement de la somme de 1.880.000 FCFA.
DES MOTIFS
EN LA FORME
L'appel relevé par O., dans les forme et délai légaux, est recevable;
AU FOND
O. soulève l'incompétence du Juge des référés, en se fondant sur l'alinéa 5 de l'article 101 du Traité OHADA portant droit commercial général;
En effet, il est précisé en cet alinéa, que : "le jugement prononçant la résiliation ne peut
intervenir qu'après l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification de la demande aux
créanciers inscrits";
Le terme de jugement ne se réfère nullement à la juridiction des référés, mais plutôt au Juge du fond, qui est seul compétent, et ce en vertu de l'alinéa 2 de l'article 101 du Traité OHADA (sic), pour prononcer la résiliation et, par voie de conséquence, l'expulsion du preneur d'un local à usage commercial;
Il s'ensuit que le Juge des référés ne pouvait pas statuer sur la demande en expulsion qui lui était soumise par dame A.;
En le faisant, il a outrepassé sa compétence, de sorte que l'ordonnance entreprise doit être infirmée, et la Cour, statuant à nouveau, se déclarera incompétente;
L'intimée, qui succombe, doit être condamnée aux dépens..
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
– Déclare recevable et bien fondé, l’appel de O.;
– Infirme l’ordonnance de référé n° 4247 du 08 novembre 2000;
Statuant à nouveau :
– Déclare la juridiction des référés incompétente;
– Renvoie les parties à se pourvoir par-devant le Juge du fond, compétent.
– Président : M. KANGA REMOND Yao Mathurin.
Note
Quelle est la juridiction compétente pour prononcer la résiliation du bail commercial et partant, l’expulsion du locataire ?
Seul le Juge du fond est compétent, et ce, en vertu de l’alinéa 2 de l’article 101 de l’Acte Uniforme portant voies d’exécution.
Il en résulte que le Juge des référés n’a pas compétence pour connaître des demandes en résiliation du bail commercial et, partant, de l’expulsion du locataire.
S’il le fait, il outrepasse ses pouvoirs, et la Cour, saisie, doit le déclarer incompétent.