J-03-21
INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION COMPORTANT DATE PRÉCISE À COMPARAÎTRE – NON-ENRÔLEMENT – AVENIR D’AUDIENCE À UNE AUTRE DATE – DÉCHÉANCE (NON) – ARTICLE
11 AUPSRVE.
INJONCTION DE PAYER – PRETENDUE CREANCE DE REMBOURSEMENT DE PRET PAR LE DEMANDEUR A L’INJONCTION – CONTESTATION DE LA NATURE DE CETTE CREANCE PAR LE DEFENDEUR A L’INJONCTION QUI LA QUALIFIE D’APPORT EN NUMERAIRE A UNE SOCIETE CONSTITUEE ENTRE LES PARTIES – ABSENCE DU CARACTERE CERTAIN DE LA CREANCE.
L’article
11 de l’Acte Uniforme sur le recouvrement simplifié des créances prescrit qu’il doit, à peine de déchéance, y avoir entre l’opposition et l’assignation à comparaître, un délai d’un mois.
Satisfait à cette exigence, l’opposition faite le 12 novembre 2001 comportant assignation à comparaître le 28 novembre, même si celle-ci n’a pas été enrôlée. Cette opposition fait naître une instance que l’avenir d’audience ne fait que reprendre.
(Cour d’Appel d’Abidjan. Arrêt N° 987 du 26 juillet 2002. WALTED HAGEMAN (Mes YAO Maxime et BOUAH Yao) c/ Aron BRUNETIERE (Me SONTE)).
Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire)
Chambre civile et commerciale
Audience du vendredi 26 juillet 2002
LA COUR,
Vu les pièces du procès;
Ouï les parties en leurs conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en dernier ressort, sur l’appel de Walter HAGEMAN, ayant pour Conseils Maîtres YAO Joseph Maxime et BOUAH YAO Danièle, Avocats, relevé par exploit du 16 mai 2002 du jugement n° 496/2002 rendu le 3 avril 2002 par le Tribunal d’Abidjan Plateau, dont le positif est ainsi conçu :
« - Dit que HAGEMAN Walter est déchu de son opposition;
– Met les dépens à la charge de HAGEMAN Walter;
Considérant qu’aux termes de son acte d’appel valant premières conclusions, Walter HAGEMAN fait grief au premier Juge de l’avoir déchu de son opposition; qu’à cet effet, il fait valoir que selon l’Acte Uniforme, l’opposition est recevable 15 jours à compter de la signification de l’ordonnance;
Que l’ordonnance querellée a été signifiée le 02 novembre par exploit de Maître KACOU Yao, Huissier de justice;
Qu’il formait opposition à cette ordonnance le 09 novembre, soit sept (7) jours après la signification;
Que cette opposition a d’ailleurs été signifiée à toutes les parties, conformément à l’article 11 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures de recouvrement simplifiées;
Qu’en coutre, cette opposition régulièrement (formée) n’ayant pu être enrôlée à la date convenue, un avenir d’audience était servi à toutes les parties;
Que, dès lors, en déclarant déchu de son droit de faire opposition, le premier Juge a fait une mauvaise application de la loi et sa décision encourt immanquablement censure;
Considérant que sur le fond, il soutient que la somme réclamée n’est aucunement due;
Qu’en effet, les parties sont en relations d’affaires, et à ce titre, ayant créé un fonds de commerce avec différents apports, ils sont considérés comme associés;
Qu’ainsi, les 26.500.000 FCFA constituent un apport en numéraire, rémunérant les 40% de parts attribuées à Monsieur ARON BRUNETIERE Jean-Michel;
L’apport en numéraire ne peut et ne saurait en aucun cas être assimilé à un prêt remboursable;
Qu’en conséquence, toute convention stipulant un quelconque remboursement est nulle et de nul effet;
Qu’en l’espèce, Monsieur ARON BRUNETIERE Jean-Michel a la qualité d’associé et à ce titre, il a vocation au partage de bénéfice – 40% des bénéfices réalisés;
Que d’ailleurs, Monsieur ARON BRUNETIERE Jean-Michel reconnaît incontestablement cette qualité, dans son courrier du 04 octobre 2001;
Raison pour laquelle, il sollicitait la nomination d’un Administrateur provisoire;
C’est donc par pure mauvaise foi que Monsieur ARON BRUNETIERE Jean-Michel demande le remboursement de son apport;
Il ne peut prétendre valablement qu’à la répartition des bénéfices;
Car l’apport n’est pas un prêt, il participe au capital de la société et est rémunéré par des parts sociales;
Conséquemment, il conclut au rejet de la demande de Monsieur ARON BRUNETIERE Jean-Michel et partant, à l’infirmation pure et simple du jugement querellé;
Considérant que, pour sa part, ARON BRUNETIERE Jean-Michel, intimé, comparaissant en personne, liminairement soulève la nullité de l’acte d’appel pour violation de l’article 246 du code de procédure civile;
Que, subsidiairement, il conclut à la confirmation du jugement attaqué;
Considérant que les parties comparaissent et concluent par Conseil et en personne, il y a lieu de statuer contradictoirement à leur égard;
DES MOTIFS
DE LA RECEVABILITÉ DE L’APPEL
Considérant que l’acte d’appel du 16 mai 2002 ne comporte aucun vice susceptible d’entraîner son annulation;
Qu’en tout état de cause, les dispositions de l’article 246 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité absolue; que la sanction étant la nullité relative, l’intimé ne fait pas la preuve de l’existence d’un quelconque préjudice résultant du vice qu’il invoque;
Qu’au total, l’appel relevé dans les forme et délai, est recevable;
SUR LA RECEVABILITÉ DE L’OPPOSITION
Considérant que la déchéance visée par l’article 11 du Traité OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution concerne exclusivement, d’une part, la notification du recours au Greffe de la Juridiction ayant rendu la décision d’injonction de payer et, d’autre part, l’assignation à comparaître dont le délai d’ajournement ne saurait excéder trente jours à compter de l’opposition;
Qu’ainsi, l’acte du 12 novembre 2001 a été notifié au Greffe du Tribunal et comporte ajournement au 28 novembre, soit dans le délai prescrit;
Que le texte invoqué ne sanctionne nullement le non-enrôlement de l’opposition;
Qu’ainsi, cette opposition conforme aux dispositions de l’article 11 précité, fait naître une instance qui ne peut être reprise tant qu’elle n’est pas périmée;
Conséquemment, l’exploit de reprise d’instance du 3 janvier 2002 ne peut donc pas être censuré par l’article 11 précité;
Qu’il s’ensuit que c’est à tort que le premier Juge a retenu la déchéance;
Qu’il y a lieu d’infirmer le jugement attaqué et, conséquemment, de déclarer l’opposition recevable;
SUR LE BIEN-FONDÉ DE L’OPPOSITION
Considérant qu’il est constant comme résultant des productions que les parties se sont associées pour la création d’un fonds de commerce de restauration dénommé le WAWI, chaque partie ayant fait les apports suivants;
L’appelant un apport en nature évalué à 15 millions;
Et l’intimé un apport en numéraire de 26.500.000 F;
Considérant qu’un apport dans le cadre d’une société, apport qui confère la qualité d’associé, ne peut pas être assimilé en même temps comme un prêt remboursable;
Qu’en raison de cette contestation sérieuse quant à la nature exacte des sommes apportées par l’intimé, il y a remise en cause de la certitude, de la liquidité et de l’exigibilité de cette créance;
Conséquemment, les conditions de l’article 1er du Traité OHADA, déjà cité, ne sont pas réunies, de sorte qu’il convient de rétracter purement et simplement l’ordonnance d’injonction de payer attaquée.
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
– Déclare Walter HAGEMAN recevable en son appel relevé du jugement N° 605 CIV rendu le 17 avril 2002 par le Tribunal d’Abidjan;
AU FOND
– L’y dit bien fondé;
– Infirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué;
Statuant à nouveau :
– Déclare Walter HAGEMAN recevable et fondé en son opposition.
En conséquence :
– Rétracte l’ordonnance d’injonction de payer N° 10944/2001 du 22 septembre 2001;
– Condamne l’intimé aux dépens;
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan (2ème Chambre Civile), a été signé par le Président et le Greffier.