J-03-212
DROIT COMMERCIAL – BAIL COMMERCIAL – DEMANDE DE RESILIATION – VIOLATION DU PRENEUR DE L’OBLIGATION D’USER DES LIEUX SUIVANT LA DESTINATION CONVENUE – DEMANDE DE RESILIATION DU BAIL.
CHANGEMENT DE DESTINATION DES LOCAUX SANS LE CONSENTEMENT DU BAILLEUR CONSTATE PAR VOIE D’HUISSIER – PREJUDICE DU FAIT DE L’INCOMPATIBILITE AVEC LA NATURE DE L’IMMEUBLE HABITE PAR D’AUTRES LOCATAIRES QUI SE PLAIGNENT.
BAIL VERBAL – ABSENCE D’OBJECTION DE LA PART DU BAILLEUR – PRESOMPTION DE BAIL MIXTE ET NON CHANGEMENT DE DESTINATION – ABSENCE DE PREUVE DE LA COMPLAITE DES LOCATAIRES – REJET DE LA DEMANDE DE RESILIATION (OUI).
Le bailleur peut faire résilier le contrat de bail lorsque le preneur emploie la chose louée à un usage autre que celui pour lequel il était destiné et qu’il en résulte un préjudice. Pour ce faire, le bailleur doit apporter la double preuve du changement et du préjudice souffert.
En l’espèce même si le changement de destination est implicitement reconnu par le preneur, il n’est point établi qu’il en est résulté un préjudice causé aux bailleur, ce dernier se contentant simplement d’invoquer une gêne non établie des voisins.
Tribunal Régional Hors Classe de Dakar , jugement du 05 mai 2003 héritiers de feu El Hadji Alpha Cissé contre Suhalihu Agendey.
REPUBLIQUE DU SENEGAL
TRIBUNAL REGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR
AUDIENCE PUBLIQUE DU 05 MAI 2003
SUR QUOI NOUS JUGE DES REFERES
Vu la demande d’expulsion présentée par les héritiers de feu El Hadji Alpha CISSE à l’encontre du défendeur;
Après avoir entendu les parties en leurs conclusions respectives;
Attendu que par acte en date du 23 janvier 2003 de Me Djily DIATTA, huissier de justice à Dakar, les héritiers de feu El Hadji Alpha CISSE à savoir Djibou CISSE, Aissatou CISE, Fatoumata CISSE, Fatime DIALOO, Ousmane, Aliou , Abdoulaye, Mouhamed Gandel, Fatoumata, Aramata, Amadou, Moulaye, Aissa, Salif, Oulèye, Amadou Djidio, Chérif, Diariétou, Khady, Moussa et Habsatou CISSE, ont régulièrement donné assignation à Suhalihu Agendy en résiliation du bail les liant et en expulsion des lieux loués, sous le bénéfice de l’exécution provisoire sur minute et avant enregistrement;
AU FOND
Attendu qu’à l’appui de leurs demandes, les Hoirs CISSE ont soutenu que le défendeur a changé la destination des locaux en y aménagent un télécentre et un espace lui servant d’atelier de confection de tableaux d’art décoratifs, sans leur consentement;
Que cet état de fait résulte du procès-verbal de constat dressé par l’huissier Djily DIATTA;
Qu’un tel changement leur cause un préjudice puisque les aménagements sont incompatibles avec la nature de l’immeuble qui est habité par d’autres locataires qui ne cessent de se plaindre;
Attendu qu’en réponse, le sieur Agendy a rétorqué que les parties sont liées par une convention de bail verbal depuis octobre 1989;
Que depuis cette date, il loge dans les locaux avec sa famille et y a toujours exercé des activités d’artiste peintre, sans la moindre obligation de la par du bailleur;
Qu’aux terme de l’article 554 du COCC (alinéa 1er), il y a une présomption de bail mixte;
Qu’il n’y donc pas eu changement de destination;
Qu’il n’y a pas non plus un préjudice souffert par le bailleur, faute de preuve des complaintes des co-locataires;
Qu’il en conclut au débouté des héritiers CISSE de leur action;
Attendu que l’article 554 du COCC dispose que « le preneur est tenu d’user de la chose loué en bon père de famille et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail ou suivant celle présumée d’après les circonstances à défaut de convention »;
Que « si le preneur emploie la chose loué à un autre usage que celui auquel elle a été destinée et qu’il en résulte un préjudice pour le bailleur, celui ci peut faire résilier le bail »;
Attendu qu’il s’infère de ce texte en son alinéa 2 que pour faire résilier le bail pour changement de destination, le bailleur doit impérativement apporter la double preuve du changement et du préjudice souffert qui en est résulté;
Attendu qu’en l’espèce, même si le changement de destination est implicitement reconnu par le preneur il n’est établi que cela a causé un préjudice aux bailleurs puisque ces derniers se sont simplement contenté d’invoquer une gêne pour les voisins qui n’est nullement établie;
Qu’il échet en conséquence de les débouter de leur action et de mettre les dépens à leur charge;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en matière de référé et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclarons l’action recevable
AU FOND
Déboutons les héritiers de feu El Hadj Alpha CISSE de toutes leurs demandes;
– Les condamnons aux dépens.