J-03-22
INJONCTION DE PAYER – EXPLOIT DE SIGNIFICATION D’UNE ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – CONDITION DE VALIDITÉ.
Article 3 AUPSRVE
Article 4 AUPSRVE
Article 8 AUPSRVE
L’exploit de signification d’une ordonnance d’injonction de payer qui indique que « … l’opposition … est portée devant la juridiction compétente dont le Président a rendu la décision d’injonction de payer » est valable.
Cour d’Appel d’Abidjan. Arrêt N° 928 du 19 juillet 2002 BIAO (SCPA KANGA-OLAYE et Associés) c/ BOURDIER Gilbert Denis (SCPA KONATE-BAZIE et KOYO).
Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire)
Chambre civile et commerciale
Audience du vendredi 19 juillet 2002
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions;
Vu les conclusions écrites du Ministère Public;
Ensemble l’exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Par exploit en date du 11 janvier 2002, la BIAO-CI, ayant pour Conseil la SCPA KANGA-OLAYE et Associés, a relevé appel du jugement n° 215 du13/12/2001 rendu par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan, qui a débouté la BIAO de sa demande en recouvrement;
Au soutien de son action, la BIAO critique la décision et fait remarquer que BOURDIER Gilbert ne conteste pas avoir bénéficié d’un prêt d’un montant de 150.000.000 F de sa part, matérialisé par un acte d’aval consenti par la société COMAFRIQUE au profit de la banque;
Que ce prêt remboursable en 60 mensualités n’a bénéficié que du paiement de la somme correspondant à 35 échéances, soit 125.751.322 F, restant ainsi devoir 25 échéances de 88.075.222 F, comme cela ressort des tableaux d’amortissement produits; qu’à ce montant, s’ajoutent les agios dus au titre des impayés, évalués à 15.409.502 F, outre les frais de tenue de compte calculés à 217.957 F, soit un total de 103.702.682 F, dont elle réclame le paiement;
Par voie de conclusion en réplique de ses Conseils Mes KONATE-BAZIE et KOYO, en date du 8 février 2002, BOURDIER Gilbert soulève in limine litis l’incompétence du Tribunal de ce siège, en application de l’article 3 du Traité OHADA, son domicile étant à San Pedro;
Il soulève aussi l’irrecevabilité de la requête aux fins d’injonction de payer pour violation de l’article 4 de l’Acte Uniforme, la somme indiquée ne présentant aucun détail sur le principal et les intérêts;
Il conclut également à la nullité de l’exploit de signification de l’ordonnance, lequel a omis de préciser la juridiction devant laquelle l’opposition doit être formée en violation de l’article 8 de l’Acte Uniforme;
Il souligne enfin le caractère incertain de la créance qui ressort de la sommation de payer du 17 janvier 2001, avec un montant de 98.674.668 F devenu 103.702.682 F dans la requête; que pour toutes ces raisons, il sollicite la confirmation de la décision attaquée;
Par voie de conclusion en réplique de ses Conseils, en date du 13/02/2002, la BIAO estime le Tribunal d’Abidjan compétent, du fait que la société COMAFRIQUE, sise à Abidjan, s’est portée aval et caution solidaire de l’intimé; qu’il y a donc pluralité de débiteurs, et sollicite de ce fait le rejet de ce moyen;
Par ailleurs, souligne-t-elle, sa requête contient bien l’indication du montant de sa créance, avec décompte des différents éléments; elle fait valoir aussi que l’exploit de signification de l’ordonnance a été établi conformément à l’article 8 précité et demande à la Cour de restituer à l’ordonnance de condamnation , son plein et entier effet;
Le Ministère Public requis, a conclu s’en rapporter;
DES MOTIFS
SUR LA COMPÉTENCE DU TRIBUNAL DE 1ÈRE INSTANCE D’ABIDJAN
L’article 3 du Traité OHADA relatif au recouvrement simplifié, dispose que « la demande est formée par requête auprès de la juridiction compétente du domicile ou du lieu où demeure effectivement le débiteur ou l’un d’entre eux, en cas de pluralité des débiteurs »;
Il découle de ce qui précède, eu égard à la solidarité du cautionnement, que la prise en compte du siège social de la caution, la société SIFCOM-COMAFRIQUE par le premier Juge, procède d’une belle lecture de la loi, et que sa décision mérite confirmation sur ce chapitre;
DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 4 DU TRAITÉ OHADA
Dans sa requête à fin d’injonction de payer, la BIAO a spécifié qu’elle réclame 88.075.222 F en principal et intérêts, au titre du remboursement du prêt, + 15.409.502 F au titre des agios, et 217.958 F au titre des frais de tenue de compte; qu’il s’infère de ce qui précède, que la BIAO n’a pas violé le texte susvisé, et le jugement doit être confirmé sur cet autre point;
DE LA VIOLATION DE L’ARTICLE 8 ALINÉA 3
L’exploit de signification d’ordonnance porte mention que » cette ordonnance été rendue le 2 mai 2002 par le vice-Président du Tribunal de Première Instance d’Abidjan, et que le recours ordinaire contre cette décision est l’opposition, laquelle est portée devant la juridiction compétente, dont le Président a rendu la décision d’injonction de payer »;
Dès lors, c’est sans fondement que grief est fait à cet exploit d’avoir omis d’indiquer la juridiction compétente pour statuer sur l’opposition; il échet de rejeter ce moyen sans consistance;
SUR LE CARACTÈRE INCERTAIN DE LA CRÉANCE
Dans sa requête à fin d’injonction de payer, l’appelant a bien spécifié sa créance d’un montant total de 103.702.682 F, résultant d’un prêt accordé à BOURDIER Gilbert, sous la caution de la société SIFCOM-COMAFRIQUE; qu’il convient donc d’infirmer le jugement entrepris, qui a statué autrement, et restituer à l’ordonnance d’injonction de payer n° 3494 du 02 mai 2001 son plein et entier effet;
Les intimés succombant en la cause il convient de les condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en dernier ressort;
– Reçoit le BIAO en son appel relevé du jugement N° 215 du 13/12/2001, rendu par le Tribunal de Première Instance d’Abidjan;
AU FOND
– L’y déclare bien fondée;
– Infirme ledit jugement;
Statuant à nouveau;
– Restitue à l’ordonnance d’injonction de payer N° 3494 du 2 mai 2001, son plein et entier effet;
– Condamne les intimés aux dépens;
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan (1ère Chambre Civile) a été signé par le Président et le Greffier.