J-03-232
VOIES D’EXECUTION – SAISIE IMMOBILIERE – JUGEMENT D’ADJUDICATION – CONDITIONS D’APPEL.
ACTES UNIFORMES – VIOLATION DES DISPOSITIONS D’UN ACTE UNIFORME – COUR SUPREME IVOIRIENNE COMPETENTE.
Les décisions judiciaires rendues en matière de saisie immobilière ne peuvent être frappées d’appel que lorsqu’elles statuent sur le principe même de la créance ou sur les moyens de fond tirés de l’incapacité des parties, de la propriété, de l’insaisissabilité ou de l’inaliénabilité des biens saisis.
Le jugement qui se borne à procéder à l’adjudication d’un immeuble saisi n’est, dès lors, pas susceptible d’appel.
Article 46 AUPSRVE
Article 223 AUPSRVE
Article 300 AUPSRVE
Article 313 AUPSRVE
Article 162 DU CODE IVOIRIEN DE PROCEDURE CIVILE, COMMERCIALE ET ADMINISTRATIVE
(Cour Suprême de Côte d’ivoire, Chambre Judiciaire, arrêt n°116 du 06 mars 2003, époux Diaby Niteh Mohamed c/ CFAO-CI).
LA COUR
Vu les pièces du dossier et les mémoires des parties;
Vu les conclusions écrites du Ministère Public en date du 18 avril 2002;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI
Attendu que la CFAO-CI conclut à l'irrecevabilité du pourvoi, l'exploit de pourvoi délivré à 19 heures étant, selon elle, entaché de nullité, comme intervenu en dehors des heures légales telles que déterminées par l'article 46 de l'Acte Uniforme relatif aux voies d'exécution;
Mais attendu que l'exploit de pourvoi n'est pas soumis aux dispositions de ce texte qui ne vise que les mesures d'exécution; que la nullité soulevée par la CFAO étant donc sans aucun fondement, il y a lieu de déclarer recevable le pourvoi des époux DIABY Niteh Mohamed;
Sur les deux moyens de cassation réunis pris d'une part de la violation de la loi notamment des articles 223, 300 alinéa 4, 313 de l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif aux voies d'exécution 162 et suivants du Code de Procédure Civile, Commerciale et Administrative et, d'autre part, du défaut de base légale résultant de l'obscurité des motifs;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt attaqué (Abidjan, 06 avril 2000) que la Compagnie Française de l'Afrique Occidentale en Côte d'Ivoire dite CFAO-CI, ayant obtenu la condamnation de DIABY EL HADJ Niteh Mohamed et de son épouse née DIABY Maïmouna au paiement des sommes représentant des reliquats de prix de véhicules qu'elle leur avait vendus, a entrepris à leur encontre une procédure d'expropriation forcée (sic) qui a abouti à un jugement d'adjudication rendu le 20 mars 2000 par le Tribunal Civil d'Abidjan et signifié le 20 mai 2000; que les époux DIABY ayant relevé appel de ce jugement, la Cour d'Appel d'Abidjan a déclaré leur appel irrecevable comme intervenu en violation des articles 293, 300 et 313 de l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution;
Attendu que le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, en statuant comme il l'a fait, alors selon le moyen que le jugement d'adjudication est bien susceptible d'appel dans les conditions du droit commun interne, d'une part, violé les articles 223, 300 alinéa 4, 313 de l'acte Uniforme relatif aux voies d'exécution et, d'autre part, opéré une confusion dans l'application des textes ci-dessus cités, laquelle a eu pour effet d'obscurcir les motifs de la décision et de la priver de base légale;
Mais attendu qu'il résulte de l'article 300 alinéa 2 de l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif aux procédures simplifiées de recouvrement et voies d'exécution que « les décisions judiciaires rendues en matière de saisie-immobilière ne peuvent être frappées d'appel que lorsqu'elles statuent sur le principe même de la créance ou sur des moyens de fond tirés de l'incapacité d'une des parties, de la propriété, de l'insaisissabilité ou de l'inaliénabilité des biens saisis »; qu'ainsi le jugement entrepris, pour s'être borné à procéder à l'adjudication de l'immeuble saisi, n'était pas susceptible d'appel; que par ces motifs de pur droit substitués à ceux critiqués par le pourvoi, l'arrêt se trouve justifié; d'où il suit qu'aucun des moyens ne peut être accueilli;
PAR CES MOTIFS
– Rejette le pourvoi formé par l'époux DIABY EL HADJ NITEH Mohamed contre l'arrêt n°379 en date du 06 Avril 2001 de la Cour d'Appel d'Abidjan Chambre Civile;
– Laisse les frais à la charge du Trésor Public;
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur agrégé, Consultant
On peut s’étonner qu’un pourvoi en cassation fondé sur la violation de plusieurs articles de l’Acte uniforme sur les voies d’exécution ait été formé devant la cour suprême ivoirienne et que celle-ci ne se soit pas déclarée incompétente. Voilà un sujet de méditation sur la captation d’une compétence dévolue, normalement, à la Cour commune de justice et d’arbitrage.