J-03-240
SOCIETES COMMERCIALES – ACTION SOCIALE EXERCEE INDIVIDUELLEMENT – CONDITIONS DE MISE EN ŒUVRE – ACCORD DES COASSOCIES (NON).
L’action sociale peut être engagée par un associé agissant individuellement sans rechercher l’accord de ses coassociés.
Article 331 AUSCGIE
(COUR D’APPEL D’ABIDJAN, ARRET n°826 DU 20 JUIN 2003, (AIE JEAN – MARIE C/ Société INTERBAT).
LA COUR,
Vu les pièces du-dossier;
Oui les parties en leurs conclusions;
Par exploit en date du 16 Août 2002, monsieur AIE JEAN MARIE a relevé appel du jugement civil n°l40 rendu le 18 Juillet 2002 par le tribunal de 1ère instance d'Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
« -Reçoit monsieur AIE JEAN-MARIE en son opposition.
– L'y dit cependant mal fondé;
– Déclare la demande en recouvrement recevable et bien fondée;
Le condamne à payer à la société INTERBAT la somme de 165.005.555 francs »
Au soutien de son appel, monsieur AIE JEAN MARIE fait valoir tout d'abord que la requête aux fins d'injonction de payer présentée par INTERBAT est irrecevable pour les motifs suivants :.
Il est mentionné que la société INTERBAT est représentée par monsieur GRAND YOBOU son Directeur Général alors que s'agissant d'une société à Responsabilité limitée, l'organe dirigeant est un gérant;
Que la profession de l'intimé est erronée en ce sens qu'il aurait dû être mentionné co-gérant au lieu d'information (sic);
II soutient, par ailleurs, que l'action engagée contre lui est irrecevable parce que s'agissant d'une action entre co-associés, la décision d'agir aurait dû être prise à une majorité des associés représentant plue de la moitié du capital; qu'en l'espèce, il n'a été informé de la procédure judiciaire engagée contre lui que lors de ta signification de l'ordonnance unilatéralement obtenue;
L'appelant poursuit en faisant plaider que les conditions d'application de la procédure de recouvrement simplifié ne sont pas réunies en ce sens que la créance ne résulte pas de l'émission ou de l'acceptation d'un effet de commerce ou d'un chèque et qu'elle n'a pas une cause contractuelle puisqu'elle est fondée sur une réso­lution d'une assemblée générale.
Subsidiairement Mr. AIE JEAN MARIE indique que les associé de la société INTERBAT ont constitué des apports en compte-courant mais que le compte de monsieur Grand a été artificiellement gonflé par des écritures non conformes à la réalité;
Qu'ainsi le terrain apporté par Monsieur GRAND et évalué à l83.470.000 francs n'est pas en réalité la propriété de celui-ci mais plutôt celle d’ INTERBAT de sorte qu'il n'a pas pu l'avoir cédé à la société;
Qu'en plus des villas d'une valeur totale de 354.874.153 francs, normalement au débit de monsieur Grand, ont été sortis du compte de celui-ci pour se retrouver acquis par la SCI Grand et Maxim;
Qu'enfin, monsieur GRAND a perçu directement de certains clients la somme de 86.765.726 francs;
Relativement à la créance, il ne reconnaît devoir à la société que la somme de 56.142.168 francs au titre de son compte-courant d'associés;
Que s'agissant des villas dont le paiement lui est réclamé, il affirme n'avoir eu livraison que d'une seule et que la cession pour les autres n'est pas encore totale étant donné qu'elles ne sont pas encore achevées;
La société INTERBAT et monsieur GRAND YOBOU BESSIKOUA STEPHANE font plaider, pour leur part, que les associés ont apporté à la société en compte courant 225.108.608 francs pour monsieur GRAND et 109.649.056 francs pour monsieur AIE;
Qu'à ce jour, monsieur AIE a prélevé sur son compte la somme de 165.791.224 francs de sorte que ce compte est débiteur de 56.142.168 francs;
Ils ajoutent que cette créance de la société a été constatée par la résolution n°5 de l'assemblée générale du 6 Décembre 2001, résolution votée à l'unanimité des associés;
Que, de surcroît, les rapports du commissaire aux comptes de la société ont mis, toujours à la charge de monsieur AIE, une dette de 56.142.168 francs au titre de son compte courant;
Poursuivant, les intimés indiquent qu'à ce solde débiteur de monsieur AIE, il convient d'ajouter le prix des villas n° 75, 106, 101 acquises par lui et non encore payées pour une valeur totale de 108.864.585 francs;
En réponse au moyen d'appel tiré de l'irrecevabilité de la requête aux fins d'injonction de payer, ils expliquent que lors de l'assemblée générale du 29 Juin 2000, des associés ont décidé de se nommer respectivement Directeur Général et Directeur Général Adjoint;
Que monsieur AIE ne peut invoquer ce fait comme cause d'irrecevabilité de la requête, lui-même se prévalant de sa qualité de Directeur Général Adjoint;
Ils font observer par ailleurs que la requête mentionne bien la qualité d'associés de monsieur AIE et que celui-ci est bien informaticien de profession;
Que c'est encore à tort que monsieur AIE soutient que la décision de le poursuivre aurait dû être prise à la majorité des associés;
A cet effet, ils indiquent que la poursuite est fondée sur les dispositions de l'article 331 de l'acte uniforme relatif aux sociétés commerciales qui énoncent que les associés représentant le quart des associés et le quart des parts sociales peuvent soit individuellement, soit en se groupant, intenter l'action sociale en responsabilité contre le gérant;
Ils font valoir enfin que la créance a bien une cause contractuelle parce que fondée sur un contrat de société;
Ils sollicitent, en conséquence, la confirmation pure et simple du jugement déféré;
Le Ministère Public a conclu par écritures du 06 Mai 2005 et a demandé la confirmation du jugement.
DES MOTIFS
Sur la recevabilité de la requête
II résulte des productions que la fonction du représentant légal de la société INTERBAT a bien été indiquée;
Que, par ailleurs, s'agissant d'une personne morale, l'acte uniforme n'exige que l'indication de la forme, la dénomination et le siège social;
S'agissant du moyen tiré de l'absence d'accord préalable de monsieur AIE, l'article 331 de l'acte uniforme relatif aux sociétés commerciales autorise les associés représentant le quart des associés et le quart des parts sociales à intenter une action contre le gérant et cela, même individuellement;
De plus, ce texte dispose qu'est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l'exercice de l'action sociale à l'avis préalable ou à l'autorisation de l’assemblée ou qui comporterait par avance renonciation à l'exercice de cette action;
Dès lors, l'accord préalable du coassocié n'était pas une condition préalable à toute action judiciaire;
Enfin, la société résultant d'un contrat, il est manifeste que la créance a une cause contractuelle;
Sur le bien fondé de la créance
La créance résultant du solde du compte courant de monsieur AIE n'a jamais été contestée par celui-ci;
S'agissant des villas, les pièces, produites, notamment les factures attestent bien qu'il s'en est porté acquéreur et que le prix n'a pas encore été payé;
Il en résulte que c'est à bon droit que le premier juge a condamné AIE JEAN MARIE à payer à la société INTERBAT la somme de l65.005.555 francs. II convient de confirmer ce jugement;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
Reçoit monsieur AIE JEAN MARIE en son appel;
AU FOND
L'y dit mal fondé, l'en déboute;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement attaqué;
Le condamne aux dépens.