J-03-251
VOIES D’EXECUTION – SAISIE VENTE – VIOLATION DES CONDITIONS DE FORME VISEE PAR L’ARTICLE
100 AUPSRVE – ABSENCE DE PREJUDICE POUR LE SAISI – NULLITE DE LA SAISIE VENTE (NON).
S’il est exact que l’article 100 de l’acte uniforme sur les procédures simplifiées de recouvrement et les voies d’exécution prévoit des conditions de forme pour la saisie vente à peine de nullité et si la Cour commune de justice et d’arbitrage de l’OHADA en a déduit, dans son avis N° 1/99 JN du 07/07/1999 que le juge est tenu de prononcer la nullité de tout acte, dès « qu'il constate que les formalités exigées à son établissement ne sont pas accomplies, sans chercher à savoir, contrairement à l'arrêt N° 41 du 20/03/2002 de la Cour de céans, d'une part, si l'inobservation de ces formalités a pu ou non causer un préjudice à celui qui invoque la nullité de l'acte; d'autre part, à distinguer les nullités pour vice de forme des nullités pour irrégularité au fond; une telle distinction n'existe qu'en matière de saisie immobilière, ce qui n'est pas le cas d'espèce.
L'avis précité indique que « l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution a expressément prévu que l'inobservation de certaines formalités prescrites est sanctionnée par la nullité; toutefois, pour quelques-unes de ces formalités limitativement énumérées, cette nullité ne peut être prononcée que si l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l'invoque; hormis ces cas limitativement énumérés, le juge doit prononcer la nullité lorsqu'elle est invoquée, s'il constate que la formalité prescrite à peine de nullité n'a pas été observée, sans qu'il soit besoin de rechercher la preuve d'un quelconque préjudice »
Ainsi, il est aisé de conclure que le principe et l'exception dégagés par l'avis ne sont que l'application de ce régime de droit commun des nullités, que l'avis invite par-là même, à user de cette distinction pour déterminer les cas limitativement énumérés et qui en constituent l’exception. Il s’ensuit que le saisi ne justifiant d’aucun préjudice résultant de ces vices de forme, il n’y a pas lieu à annulation.
(Cour d’appel de Niamey, Chambre civile, arrêt n° 52 du 10 avril 2002, BCN c : Hamadi Ben Damma).
LA COUR,
EN LA FORME
Attendu que suivant exploit en date du 20/03/2002 de Me Louis BERNAZOU, Huissier de justice à Niamey, la Banque Commerciale du Niger, désignée sous le sigle BCN, représentée par son Directeur général, assisté de Me Marc LEBIHAN, Avocat à la Cour, a relevé appel de l’ordonnance N° 063 du 19/03/2002, rendue par le Président du Tribunal Régional de Niamey, juge des référés;
Attendu que cet appel intervenu dans les forme et délai de la loi, doit être déclaré recevable;
AU FOND :
Attendu que suivant exploit en date du 20/02/2002, la BCN (SA), représentée par son Directeur général, assisté de Me Marc LEBIHAN, Avocat à la Cour, a assigné Hamadi Ben Damma devant le juge des référés de Niamey, à l’effet de voir prononcer la nullité de la saisie vente par lui pratiquée et en ordonner la mainlevée;
Attendu que suivant ordonnance N° 060 du 19/03/2002, le juge des référés, après avoir reçu en la forme la requête de la BCN, l'a débouté au fond et l'a condamné aux dépens;
Attendu que la BCN, par la voie de son Conseil, demande à la Cour d'infirmer l'ordonnance attaquée et de déclarer nulles les saisies ventes pratiquées par Hamadi Ben Damma, pour inobservation dans l'acte de saisie, des formalités prévues à l'article 100 alinéa 1, 5e et 11e;
Attendu qu'au soutien de sa demande, la BCN fait valoir qu'il résulte d'une lecture attentive de l'acte de saisie, que nulle part il n'a été fait mention de l'article 100 alinéa 1, 5e et 11e, que ces formalités étant prescrites à peine de nullité, le juge, dès lors qu'il constate leur inobservation, doit prononcer la nullité de l'acte de saisie et par conséquent, celle de la saisie vente toute entière, conformément à l'avis N° 1/99 JN du 07/07/99 CCJA;
Attendu que de son côté, Hamadi Ben Damma, par la voie de son Conseil Me Coulibaly, Avocat à la Cour, demande à la Cour la confirmation pure et simple de l'ordonnance attaquée; en ce que la BCN n'apporte pas la preuve d'un quelconque préjudice par elle subi du fait de l'inobservation de ces formalités, ainsi que la Cour de céans l'a jugé dans son arrêt N° 41 du 20/03/2002;
Attendu qu'il résulte des faits de la cause, qu'en vertu de la grosse de l'arrêt N° 146 du 30/06/2000 rendu par la chambre civile de la Cour d'Appel de Niamey, et de celle de l'arrêt N° 1/185C rendu le 08/11/2000 par la chambre judiciaire de la Cour Suprême du Niger, Hamadi Ben Damma a pratiqué saisie vente sur les biens mobiliers de la BCN, pour avoir paiement des condamnations à sa charge;
Attendu que BCN a élevé contestation sur la validité de ces saisies, a demandé au juge des référés de prononcer leurs nullités pour violation de l'article 100 alinéa 1, 5e et 11e, lequel l'a déboutée;
Attendu qu'aux termes de l'article 100 alinéa 5è de l'Acte Uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, l'acte de saisie vente doit contenir, à peine de nullité, « la déclaration du débiteur, s'il est présent au sujet d'une éventuelle saisie antérieure des mêmes biens », et au 11è du même article, « la reproduction intégrale des articles 143 à 146 ci-après »;
Attendu qu'effectivement, il ne résulte pas du procès-verbal de la saisie, que la mention prévue à l'article 100 al.1, 5è ait été portée; et que s'agissant de la reproduction des articles 143 à 146, le procès-verbal mentionne qu'une photocopie des dispositions de ces articles est
jointe sans jamais l'annexer; qu'il y a lieu de constater que les formalités prévues à l'article 100 al.1, 5è et 11è ne sont pas remplies;
Attendu que cet article prévoit que ces formalités sont prescrites à peine de nullité;
Attendu que la BCN produit l'avis N° 1/99 JN du 07/07/1999 de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage, et soutient qu'il résulte de ce document, que le juge est tenu de prononcer la nullité de tout acte, dès « qu'il constate que les formalités exigées à son établissement ne sont pas accomplies, sans chercher à savoir, contrairement à l'arrêt N° 41 du 20/03/2002 de la Cour de céans, d'une part, si l'inobservation de ces formalités a pu ou non causer un préjudice à celui qui invoque la nullité de l'acte; d'autre part, à distinguer les nullités pour vice de forme des nullités pour irrégularité au fond; une telle distinction n'existe qu'en matière de saisie immobilière, ce qui n'est pas le cas d'espèce;
Attendu que Hamadi Ben Damma ne conteste pas l'irrégularité de l'acte de saisie vente, mais fait valoir que cette irrégularité n'entame pas la validité de la saisie pratiquée en paiement d'une créance ancienne reconnue et dont l'exécution partielle a déjà été obtenue; que la BCN ne rapportant pas la preuve d'un préjudice par elle subi, il n'y a pas lieu à annuler la saisie;
Mais attendu que l'avis précité indique que « l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution a expressément prévu que l'inobservation de certaines formalités prescrites est sanctionnée par la nullité; toutefois, pour quelques-unes de ces formalités limitativement énumérées, cette nullité ne peut être prononcée que si l'irrégularité a eu pour effet de causer un préjudice aux intérêts de celui qui l'invoque; hormis ces cas limitativement énumérés, le juge doit prononcer la nullité lorsqu'elle est invoquée, s'il constate que la formalité prescrite à peine de nullité n'a pas été observée, sans qu'il soit besoin de rechercher la preuve d'un quelconque préjudice »;
Attendu qu'il résulte de cet avis, que le régime des nullités des actes obéit à un principe général assorti d'une exception; que ce principe est que le juge a l'obligation, dès qu'on le lui demande, de prononcer la nullité de l'acte, s'il constate l'inobservation d'une formalité prescrite à peine de nullité, sauf dans quelques cas limitativement énumérés qui en constituent l'exception;
Attendu que quoique clair, l'avis n'énumère pas les cas et ne renvoie pas aux dispositions de l'acte uniforme les prévoyant;
Attendu que dans ces conditions, il revient au juge de les déterminer;
Attendu qu'en droit commun, les nullités d'un acte portent soit sur des vices de forme, soit sur des irrégularités de fond; que le prononcé des premières est conditionné par la preuve d'un préjudice subi par celui qui les invoque; alors que pour les secondes, le juge est tenu, même d'office, et donc sans aucune condition, dès lors qu'il constate leur existence de les prononcer;
Attendu qu'ainsi, il est aisé de conclure que le principe et l'exception dégagés par l'avis ne sont que l'application de ce régime de droit commun des nullités, que l'avis invite par-là même, à user de cette distinction pour déterminer les cas limitativement énumérés et qui en constituent l’exception;
Attendu par ailleurs, le texte des procédures de recouvrement simplifiées et voies d'exécution, en prévoyant en ses articles 144 sur la validité de la saisie vente, et 311 sur les demandes en annulation des saisies immobilières, une distinction entre nullités pour vice de forme et pour vice de fond, renvoie à l'application des conséquences de cette distinction en régime de droit commun des nullités; attendu qu'ainsi, il y a lieu de dire que les nullités prévues à la saisie immobilière ne constituent pas les seuls cas d'exception, contrairement à ce que soutient la BCN; attendu qu'en conséquence, c'est à bon droit que la Cour de céans, en son arrêt 41 du 20/03/2002 précité, a fait référence à la distinction des nullités prévues en droit commun pour asseoir sa décision;
SUR LA NULLITE DE L'ACTE DE SAISIE VENTE
Attendu qu'il est de jurisprudence constante que l'erreur de rédaction d'un acte est un vice de forme;
Attendu qu'en l'espèce, les omissions des mentions de l'article 100 al.1 5è et 11è constituent donc des erreurs de rédaction de l'acte de saisie; en effet, l'omission de la mention de l'article 100 al.1 5è peut signifier soit qu'il n'y a pas eu déclaration, soit qu'il y a eu déclaration mais absence de saisie antérieure, ce que la BCN ne conteste pas, et que pour celle du point 11 du même article, il n y a eu qu'oubli à annexer la photocopie des articles 143 à 146, d'autant plus que l'acte de saisie mentionne que la photocopie en sera jointe;
Attendu qu'en tout état de cause, la BCN n'apporte pas la preuve de l'existence d'une saisie antérieure, ni celle de la non présentation de sa demande en nullité, avant la vente, situations qui peuvent lui porter préjudice;
Attendu en outre, que la BCN ne prouve pas qu'au moment de la saisie vente, qu'elle a payé sa dette; ce qui constituerait une nullité pour vice de fond en présence de laquelle le juge est tenu de prononcer la nullité de la saisie;
Attendu que de tout ce qui précède il y a lieu de dire que le premier juge, en statuant comme il l'a fait, a fait une saine appréciation des faits et une exacte application de la loi; qu'il y a lieu de confirmer purement simplement la décision attaquée; qu'il y a lieu de rejeter la demande de nullité de la BCN;
Attendu qu'il convient de condamner BCN aux dépens;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
– Reçoit la BCN en son appel régulier en la forme;
AU FOND :
– Confirme purement et simplement l’ordonnance attaquée;
– Condamne la BCN aux dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’Appel de Niamey, les jour, mois et an que dessus.
Et ont signé le Président et le Greffier.