J-03-284
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – DECISION DU CONSEIL DES TELECOMMUNICATIONS – TITRE EXECUTOIRE (OUI).
La décision rendue par le Conseil des Télécommunications dans les litiges survenant entre les acteurs du secteur des télécommunications est un titre exécutoire susceptible, en tant que tel, de fonder une saisie-attribution.
(Cour d’Appel d’Abidjan, arrêt N°1119 du 08 Novembre 2002, Société LOTENY TELECOM C/ Société Côte d’Ivoire TELECOM).
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Oui les parties en leurs demandes, fins et conclusions;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Par acte du 23 Septembre 2002, la Société LOTENY TELECOM a relevé appel de l'ordonnance de référé N°1766 rendue le 16 Avril 2002 par la juridiction Présidentielle du Tribunal d'Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu'il suit :
« - Recevons la Société Côte d'Ivoire TELECOM en son action;
– L'y disons bien fondée;
– Ordonnons la mainlevée de la saisie critiquée;
– Condamnons la défenderesse aux dépens »;
L'appelante expose que par exploit du 5 Avril 2002, LOTENY TELECOM a fait pratiquer saisie attribution de créances entre les mains de plusieurs banques pour avoir paiement de la somme de 5.573.726.275 francs due par COTE D'IVOIRE TELECOM;
Elle explique que cette saisie a été pratiquée en vertu de la décision N°02/03/05/2001 rendue le 24 Décembre 2001 par le Conseil des Télécommunications de Côte d'Ivoire et signifiée le 21 Mars 2002;
La Société LOTENY TELECOM reproche au Juge des référés d'avoir estimé que le CTCI était sortie de ses attributions normales en exerçant une mission d'arbitrage à la demande de personnes de droit privé et cela en violation des dispositions de l'article 50 du code des Télécommunications;
Elle soutient qu'en réalité l'intervention du CTCI dans le litige est fondée sur l'article 22-1 de l'accord d'interconnexion signé le 9 Septembre 1997 entre les deux opérateurs;
Elle précise que CTCI a rendu sa décision en sa qualité de Haute Autorité Administrative de sorte que la décision litigieuse est une décision administrative;
Qu’ainsi, c'est à tort que le Premier Juge a estimé que la décision rendue par le CTCI s'apparentait à une sentence arbitrale;
La Société COTE D'IVOIRE TELECOM pour sa part conclut à la confirmation de l'ordonnance entreprise en faisant valoir que la décision du CTCI ne constitue pas un titre exécutoire au sens de l'article 35 de l'acte uniforme relatif aux voies d'exécutions;
En effet, fait-elle observer, le CTCI n' a compétence que pour les litiges, entre 1'Administration et les Opérateurs économiques de secteur des Télécommunications;
En l'espèce, poursuit-elle, le litige concerne deux personnes privées de sorte que la décision du CTCI apparaît comme une sentence arbitrale laquelle est dépourvue de toute force exécutoire;
En conséquence, elle sollicite la confirmation pure et simple, de l'ordonnance déférée;
DES MOTIFS
II résulte de l'article 22 de l'accord d'interconnexion entre les sociétés COTE D'IVOIRE TELECOM et LOTENY TELECOM S.A. que les parties ont entendu soumettre tout litige survenant entre elles dans l'exécution ou l'interprétation dudit accord, à l'arbitrage du Conseil des télécommunications ou à la conciliation;
II est certes exact que l'article 50 du code des Télécommunications stipule que le conseil des Télécommunications à compétence pour arbitrer les différends du secteur des Télécommunications, mais il n'en demeure pas moins vrai qu'en l'espèce, l'article 22 de l'accord d'interconnexion constituant la loi des parties a spécialement donné au CTCI d'arbitrer tout litige survenant entre elles;
Or, l'examen de l'article 1er du décret N°95-555 du 19 Juillet 1995 portant organisation et fonctionnement du Conseil des Télécommunications indique sans équivoque que ledit Conseil est une autorité Administrative;
Dès lors, il est manifeste que cet organe statue par décision administrative conformément à la volonté des parties et le caractère exécutoire d'une telle décision est avéré;
II en résulte que c'est à tort que le Premier Juge a estimé que la décision du CTCI "s'apparente" à une sentence arbitrale non susceptible de fonder une saisie-attribution;
II convient d'infirmer l'ordonnance attaquée et débouter la société COTE D'IVOIRE TELECOM de sa demande de mainlevée;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
– Vu l'arrêt avant – dire – droit N°1076/ADD du 11 Octobre 2002;
AU FOND
Déclare la Société LOTENY TELECOM bien fondée en son appel;
Infirme l'ordonnance entreprise et statuant à nouveau;
Déboute la Société COTE D’IVOIRE TELECOM de son action;
La condamne aux dépens.