J-03-30
PROCÉDURES COLLECTIVES D’APUREMENT DU PASSIF – LIQUIDATION AMIABLE – APPLICABLE DE L’ACTE UNIFORME SUR LES PROCÉDURES COLLECTIVES D’APUREMENT DU PASSIF (NON) – SUSPENSION DES POURSUITES (NON) – ARTICLE 75 AUPCAP.
Les dispositions relatives aux procédures collectives d’apurement du passif ne s’appliquent pas aux liquidations amiables de société. Les effets suspensifs des décisions d’ouverture de ces procédures collectives ne peuvent donc leur profiter.
Cour d’Appel d’Abidjan. Arrêt N° 872 du 9 juillet 2002. WEHBE Fady et société SOTEM Plus (Me Abel KASSI) c/ BELO Afoussata (Me COULIBALY Georges).
Cour d’Appel d’Abidjan (Côte d’Ivoire)
Chambre civile et commerciale
Audience du mardi 09 juillet 2002
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ensemble les faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES.
Suivant exploit d’huissier en date du 19 février 2002 comportant ajournement au 26 février 2002, Monsieur WEHBE Fady et la Société des Travaux Electro-Mécaniques dite SOTEM, ayant pour Conseils la SCPA ABEL KASSI et Associés, Avocats à la Cour, ont relevé appel de l’ordonnance de référé n° 614 rendue la 05 février 2002 par la juridiction présidentielle du tribunal d’Abidjan qui, en la cause, a statué ainsi qu’il suit :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en premier ressort;
Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent vu l’urgence et par provision;
– Recevons les demandeurs en leur action;
– Les y disons mal fondés;
– Les en déboutons;
– Les condamnons aux dépens »;
Il ressort des énonciations de l’ordonnance querellée que, par exploit d’huissier daté du 14 janvier 2002, Mr WEHBE Fady et la société SOTEM PLUS ont fait servir à Mlle BELO Afoussata, assignation à comparaître par-devant le Juge des référés, pour entendre prononcer la nullité de la saisie attribution;
Les demandeurs, au soutien de leur action, ont exposé que par décision mixte du 20 octobre 2000, la société SOTEM PLUS a fait l’objet d’une dissolution anticipée, et Mr WEHBE Fady a été nommé en qualité de liquidateur;
Cette décision, qui a été suivie des formalités d’usage et de la publication dans un journal d’annonces légales, entraîne la suspension des poursuites individuelles tendant à faire reconnaître des droits et des créances, ainsi que toutes les voies d’exécution tendant à en obtenir le paiement, conformément à l’article 75 du Traité de l’OHADA sur le redressement et la liquidation judiciaire;
En dépit de cette situation, Mlle BELO Afoussata a , par exploit d’huissier daté du 7 janvier 2002, fait pratiquer une saisie attribution sur les comptes de la liquidation SOTEM PLUS;
Cette mesure d’exécution étant mal venue, ils ont saisi le Juge des référés pour son annulation;
Les moyens de la défenderesse, représentée par son Conseil Maître COULIBALY Georges, n’ont pas été énoncés dans la décision attaquée;
Pour les débouter de leur demande, le Juge des référés a relevé que les demandeurs fondent leur action sur les dispositions de l’article 75 de l’Acte Uniforme relatif aux procédures collectives, qui ne peuvent s’appliquer en l’espèce, en raison du fait qu’elles ne concernent pas la dissolution amiable des sociétés;
A l’appui de leur appel, Monsieur WEHBE Fady et la société SOTEM PLUS font valoir que l’exploit de dénonciation de la saisie attribution de créance est nulle de nullité absolue, pour avoir été établi en violation des dispositions de l’article 160 du Traité de l’OHADA sur les voies d’exécution, en ce qu’il ne contient pas de mention indiquant au débiteur saisi le délai dans lequel les contestations doivent être soulevées; ils soulèvent également la nullité de l’exploit de dénonciation de la saisie, en articulant que Mlle BELO Afoussata a indiqué dans ledit exploit, le Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau comme étant la juridiction compétente pour connaître de l’instance de contestation, et ce au mépris des dispositions de l’article 49 de l’Acte Uniforme, qui prévoit la Juridiction Présidentielle statuant en matière d’urgence et non le Président du Tribunal, compétent pour connaître de l’instance au fond;
Par ailleurs, reprenant leurs arguments développés devant le premier Juge, ils déclarent que les dispositions de l’article 75 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif s’appliquent aussi bien à la dissolution amiable qu’à la dissolution judiciaire;
Tirant la conséquence de toutes les remarques qui précèdent, les appelants concluent à l’infirmation de l’ordonnance querellée et à la mainlevée de la saisie;
Mlle BELO Afoussata, en réplique, fait valoir que l’invocation par les appelants de la nullité de l’exploit de dénonciation de la saisie pour violation de l’article 160 de l’Acte Uniforme, constitue une demande nouvelle qui n’a pas été présentée devant le premier Juge et qui doit être, de ce fait, écartée des débats;
S’attachant au moyen tiré de la nullité de la saisie pour cause de liquidation de la société SOTEM PLUS, l’intimée souligne que l’article 75 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif fait allusion à une décision judiciaire d’ouverture de la procédure collective, de sorte que la dissolution amiable de la société SOTEM PLUS intervenue à l’amiable, suite à une décision de l’assemblée mixte des associés, ne peut entraîner la suspension des poursuites individuelles et de toutes les voies d’exécution;
Elle sollicite, par conséquent, la confirmation de l’ordonnance querellée;
Toutes les parties ayant conclu, il y a lieu de statuer contradictoirement;
DES MOTIFS
EN LA FORME
L’appel ayant été interjeté dans les forme et délai de la loi, il convient de le déclarer recevable;
AU FOND
SUR LA NULLITÉ DE L’EXPLOIT DE DÉNONCIATION DE LA SAISIE ATTRIBUTION DE CRÉANCE.
Les appelants ont soulevé la nullité de l’exploit de dénonciation de la saisie attribution de créance, pour omission de certaines mentions obligatoires prévue par l’article 160 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif ;
Cependant, invitées à produire ledit exploit, les parties ne se sont pas exécutées, de sorte que la Cour n’a pas été mise en mesure d’apprécier les violations invoquées, surtout que celles-ci n’ont pas été évoquées devant le premier Juge;
Il échet, dès lors, de rejeter ce moyen;
SUR LA NULLITÉ DE LA SAISIE POUR CAUSE DE LIQUIDATION DE LA SOCIÉTÉ SOTEM PLUS.
Les articles 25 et suivants de l’Acte Uniforme du Traité OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif, sont relatifs à la liquidation judiciaire des sociétés et ne font pas état des dissolutions ou liquidations conventionnelles des sociétés;
En effet, l’article 32 de l’Acte Uniforme précité mentionne que l’ouverture d’une procédure collective de redressement judiciaire ou de liquidation des biens, ne peut résulter que d’une décision de la juridiction compétente;
Il découle de ce qui précède, que les effets suspensifs de la décision d’ouverture à l’égard des créanciers, prévus par l’article 75 de l’Acte Uniforme sus-indiqué, ne sauraient concerner les liquidations amiables de société, comme c’est le cas en l’espèce;
C’est donc à bon droit que le premier Juge a écarté l’application de l’article 75 de l’Acte Uniforme à la société SOTEM PLUS et a débouté les demandeurs de leur action;
Il y a lieu de confirmer l’ordonnance entreprise;
SUR LES DÉPENS
Les appelants succombant en la cause, doivent être condamnés aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort;
– Déclare recevable, mais mal fondé et rejette comme tel l’appel de Mr WEHBE Fady et de la société SOTEM-PLUS relevé de l’ordonnance n° 614 rendue le 5 février 2002 par la juridiction présidentielle du Tribunal de Première Instance d’Abidjan Plateau;
– Confirme ladite ordonnance en toutes ses dispositions;
– Condamne les appelants aux dépens.
En foi de quoi, le présent arrêt prononcé publiquement, contradictoirement, en matière civile, commerciale et en dernier ressort par la Cour d’Appel d’Abidjan (5ème Chambre Civile B), a été signé par le Président et le Greffier.