J-03-302
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – DELAI DE CONTESTATION – TEXTE APPLICABLE.
Le texte applicable au délai de contestation d’une saisie attribution est l’article 172 de l’AUPSRVE et non l’article 49 dudit acte. L’article 172 apparaît comme un texte spécial qui, en tant que tel, déroge à l’article 49 qui est un texte général en matière de voies d’exécution.
(Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt N°1104 du 29 Octobre 2002, Société HYJAZY SAMIH et HASSAN dite INDUSCHIMIE C/ Mme KHOURI Marie et SGBCI).
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Ouï le Ministère Public;
Ensemble l'exposé des faite, procédure, prétentions des parties et motifs ci-après;
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière et en dernier ressort sur l'appel relevé le 18 Avril 2002 avant ajournement au 25 Avril 2002 par la Société HYJAZY SAMIH dit INDUSCHIMIE ayant pour conseil Maître N'GUETTA Gérard, de 1'ordonnance de référé N°5296 rendue le 14 Décembre 2001 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan, signifiée le 10 Avril 2002 et dont le dispositif est ainsi libellé :
" Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé en premier ressort,
– Renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elle aviseront, mais dès à présent, vu l'urgence et par provision;
– Nous déclarons compétent;
– Recevons KHOURY Marie en son action;
– Recevons INDUSCHIMIE en comparution volontaire;
– Disons KHOURY Marie bien fondée;
– Déclarons sans effet la mainlevée faite par 1a SGBCI sur le compte de INDUS-CHIMIE;
– Ordonnons que le compte de INDUS-CHIMIE soit de la somme de 28.910.515 F montant de la saisie de KHOURY;
– Condamnons SGBCI et INDUS-CHIMIE aux dépens ";
Considérant que l'appelante rappelant les faits expose que par arrêt social N°447 du 17 Mai 2001, la Cour d'Appel de céans a confirmé le jugement N°497/CSI/2000 du 28 Mars 2000 du Tribunal du Travail d'Abidjan l'ayant condamnée à payer à dame KHOURI Marie les sommes suivantes :
– 447.000 F/CFA à titre de rappel de primes de transport pour la période allant du 1er Avril 1998 au 18 Février 1999;
– 2.929.444 F/CFA à titre d'indemnité de licenciement;
– 4.916.250 F/CFA à titre d'indemnité compensatrice de préavis;
– l8.000.000 F/CFA à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif;
qu'ayant reçu signification de cet arrêt, elle (l'appelante) a formé un pourvoi en cassation le 15 Octobre 2001;
que par ordonnance N°258/CS/JP/2001 rendue le 22 Octobre 2001 par Monsieur le Président de la Cour Suprême, il a été sursis à l'exécution de cet décision;
qu'elle a alors sollicité du Juge des référés du Tribunal d'Abidjan la mainlevée de la saisie attribution de créance pratiquée auparavant par dame KHOURI Marie sur son compte ouvert à la SGBCI, en exécution de l'arrêt social;
que par ordonnance N°4375 rendue le 25 Octobre 2001, la Juridiction saisie a ordonné 1a mainlevée de la saisie pratiquée;
que cette décision a été signifiée le 29 Octobre 2001 à la créancière saisissante ainsi qu'à la tierce saisie, la SGBCI;
que cette ordonnance de mainlevée a été frappée d'appel le 30 Octobre 2001 par dame KHOURI Marie;
que cette dernière se fondant sur l'effet suspensif de ce recours, s'agissant d'une matière ressortissant de la saisie-attribution de créances pu obtenir par 1'ordonnance N°5296 du 14/12/2001 le maintien de la saisie;
qu'il a même été fait injonction à la SGBCI de recréditer le compte de la société de la somme 28.910.515 F/CFA, le montant de la saisie;
Considérant qu'après ce rappel la société INDUS-CHIMIE plaide l'infirmation de 1'ordonnance entreprise au motif qu'en vertu de l'arrêt de discontinuation de poursuites N°653/0l rendu le 22 Novembre par la formation sociale de la Chambre Judiciaire, la Cour Suprême, elle a été autorisée à payer seule la somme de 1.000.000 de francs qu'elle a réglée;
Considérant que pour sa part, dame KHOURI Marie intimée concluant par Maître Agnès OUANGUI, son Conseil plaide in limine litis l'irrecevabilité de l'action de la Société INDUSCHIMIE d'une part pour non respect de l'article 49 de l’acte uniforme portant voies d'exécution et d'autre part pour défaut d'intérêt à agir de la Société appelante;
que, s'agissant du non respect de l'article 49 précité, l'intimée fait valoir que cet article dispose que "la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le Président de la Juridiction statuant en matière d'urgence ou le Magistrat délégué par lui;
Sa décision est susceptible d'appel dans un délai de quinze jours à compter de son prononcé ..";
qu'elle estime que son action initiée devait le Juge des référés est relative à une mesure d'exécution forcée, de sorte que l'appel de la décision rendue doit intervenir dans les quinze jours qui suivent le prononcé de la décision;
que l'appel intervenu le 18 Avril 2001 de l'ordonnance rendue le 14 Décembre 2001 est largement hors délai, donc irrecevable;
que par ailleurs la Société INDUSCHIMIE n'a pas intérêt à agir, la décision querellée ne lui imposant aucune obligation, ni l'exécution de ladite décision ne pouvant lui porter aucun préjudice;
que subsidiairement au fond dame KHOURI Marie reprenant les faits explique qu'elle a obtenu par l'arrêt social N°447 du 17 Mai 2001, la condamnation de son ex-employeur, la Société INDUSCHIMIE à lui payer la somme de 26.525.094 F CFA en principal, outre les intérêts de droit et les frais;
qu'en exécution de cette décision, elle a fait pratiquer une saisie attribution de créances entre les mains de la SGBCI - Vridi le 08 Octobre 2001;
que ladite saisie a permis l'immobilisation de la somme totale de 28.910.515 F représentant le montant en principal de la condamnation en sus des intérêts de droit et des frais de procédure;
que ladite saisie a été régulièrement dénoncée le 10/10/2001 à la Société INDUSCHIMIE qui a sollicité le 23 Octobre 2001 du Juge des référés la mainlevée;
que par 1'ordonnance de référé N°4357/2001 du 25 Octobre 2001, le Juge des référés a fait droit à la demande;
qu'alors, elle (l’intimée) releva appel de cette décision par exploit d'Huissier en date du 30 Octobre 2001;
que contre toute attente et nonobstant l'appel interjeté, la SGBCI - Vridi a débloqué le montant des sommes saisies arrêtées entre ses mains au profit de la Société INDUSCHIMIE ce, en violation des dispositions de l'article 172 de l'Acte Uniforme portant voies d'exécution;
qu'en raison du préjudice que lui cause ce comportement injustifié, elle a assigné la Société SGBCI devant le Juge des référés aux fins de la voir condamner à recréditer le compte N°116 331 457 24 de 1a Société INDUSCHIMIE du montant des causes de la saisie attribution de créance du 08 Octobre 2001;
que la Société INDUSCHIMIE est intervenue volontairement à l'instance par requête du 23 Octobre 2001;
que par l'ordonnance N°5296 du 14 Décembre 2002 le Juge des référés du Tribunal d'Abidjan a fait droit à la demande en ordonnant à la SGBCI de recréditer le compte d'INDUSCHIMIE de la somme de 28.910.515 F CFA;
que la Société INDUSCHIMIE a relevé appel de cette ordonnance;
Considérant qu'après ce rappel, dame KHOURI Marie demande la confirmation de l'ordonnance de référé N°5296 du 14 Décembre 2001;
que pour ce faire, elle fait valoir que l’arrêt N°653/2001 du 22 Novembre 2001 par lequel la Cour d'Appel a ordonné la discontinuation des poursuites ne peut remettre en cause l'exécution de l'ordonnance de référé N°5296 entreprise;
que par ailleurs, elle soutient que conformément aux dispositions de l'article 172 de l'Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution, l'ordonnance N°4357/2001 n'était pas définitive, le délai d'appel et l'appel étant suspensif d'exécution;
que le délai d'appel étant de quinze jours à compter de la signification de la décision, la SGBCI ne pouvait se libérer des causes de la saisie du 08 Octobre 2001 au profit de la Société INDUSCHIMIE seulement qu'après le délai de quinze jours à compter de la signification de l'ordonnance de mainlevée et ce, au vu d'un certificat de non appel délivré par le Greffe;
qu'aucune des conditions précitées n'était réunie pour justifier le comportement de la SGBCI;
qu'elle estime en conséquence, que c'est a juste titre que le Juge des référés a rendu l'ordonnance N°5296 entreprise;
qu'elle en conclut la confirmation;
Considérant que le Ministère Public à qui la procédure a été communiquée déclare s'en rapporter à Justice;
SUR CE
De la recevabilité de l'appel
Considérant que pour plaider l'irrecevabilité de l'appel relevé le 18 Avril 2002 par la Société INDUSCHIMIE, dame KHOURI Marie soulève la violation de l'article 49 de l'Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures de recouvrement et voies d'exécution en vertu duquel l'appel est de quinze jours à compter du prononcé de la décision attaquée;
Mais considérant que l'article 49 précité est un texte général relatif à toute action de saisie exécution ou saisie conservatoire tandis que l'article 172 de l'Acte Uniforme précité concerne les contestations notamment la mainlevée de la saisie comme en l'espèce;
qu'en présence d'un texte général, le texte spécial à vocation à s'appliquer;
qu'il s'en suit que c'est l'article 172 qui s'applique en l'espèce;
Or considérant qu'aux termes de cet article, le délai d'appel est de quinze jours à compter de la notification;
qu'en l'espèce la signification ayant été faite le 10 Avril 2002, l'appel intervenu le 18 Avril 2002 est recevable;
De l'intérêt pour agir
Considérant que la saisie du 08 Octobre 2001 pratiquée dame KHOURI Marie concerne le compte de la Société INDUSCHIMIE ouvert dans les livres de la SGBCI;
que dès lors c'est à tort que dame KHOURI Marie soulève le défaut d'intérêt de la Société INDUSCHIMIE pour agir;
De la confirmation de l'ordonnance de référé n°5296 du 14 décembre 2001
Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 172 de l'Acte Uniforme OHADA précité que le délai pour faire appel et la déclaration d'appel sont suspensifs d'appel;
que dès lors que l'ordonnance de référé N° 4357/2001 du 25 Octobre 2001 ordonnant la mainlevée de la saisie attribution du 08 Octobre 2001, n'est pas devenue définitive, la SGBCI ne peut débloquer les fonds objet de la saisie en l'absence d'un certificat de non appel dûment délivré par le Greffe de la Juridiction qui a rendu la décision de mainlevée de saisie alors même que l'ordonnance de mainlevée est frappée d'appel;
qu'en conséquence l'ordonnance de référé N°5296 du 14 Décembre 2001 faisait injonction à la SGBCI de recréditer le compte N°116 331 457 24 de la Société INDUSCHIMIE du montant de la saisie de dame KHOURI Marie procède d'une bonne appréciation et mérite d'être confirmée;
Des dépens
Considérant que l'appelante succombe, elle doit supporter les dépens;
PAR CES MOTIFS
– Rejette les exceptions soulevées par dame KHOURI Marie;
– Déclare recevable mais mal fondé l'appel relevé par la Société INDUSCHIMIE de l'ordonnance de référé N°5296 rendue le 14 Décembre 2001 par la Juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abidjan;
– Le rejette comme tel;
– Confirme ladite ordonnance;
– Condamne la Société INDUSCHIMIE aux dépens distraits au profit de Maître Agnès OUANGUI, Avocat aux offres de droit;