J-03-304
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – EXPLOIT DE DENONCIATION – COMPUTATION INEXACTE DES DELAIS – NULLITE (NON).
La computation erronée des délais dans un exploit de dénonciation d’une saisie attribution n’entraîne pas la nullité dudit exploit.
Article 160 AUPSRVE
(Cour d’Appel d’Abidjan, Arrêt N°1212 du 29 Octobre 2002, CIE C/ M. DANDAN Pierre).
LA COUR
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs demandes, fins et conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
EXPOSE DU LITIGE
Par exploit en date du 16 Octobre 2002 comportant ajournement au 29 Octobre 2002, la Compagnie Ivoirienne d'Electricité dite CIE, a relevé appel de l'ordonnance de référé N°4741 rendue le 11 Octobre 2002, par la juridic­tion présidentielle du Tribunal de première Instance d'Abidjan, qui a statué ainsi qu'il suit :
"..Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elles a viseront, mais dès à présent, vu l'urgence et par provision;
– Déclarons l'action en contestation de la saisie-attribution de créance irrecevable;
– Condamnons la CIE aux dépens ..";
De l'examen du dossier, il ressort que le 03 Octobre 2002, la CIE a saisi le juge des référés du Tribunal de Première Instance d'Abidjan, d'une demande tendant à voir ordonner la mainlevée de la saisie attribution de créance pratiquée à son encontre, le 27 Août 2002;
Devant le premier juge, la CIE a conclu à la nullité de ladite saisie-exécution et à sa mainlevée, motif pris de ce que l'exploit qui la concerne, n'a nullement fait mention du décompte distinct des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus;
En réponse,1e défendeur à l'action DANDAN Pierre, a, avant toute défense au fond, soulevé l'irrecevabilité de l'action initiée par la CIE, en raison du fait que celle-ci a été entreprise plus d’un mois après la dénonciation de ladite saisie;
Au reste, selon lui, à supposer que l'exploit de dénonciation en cause ait contenu en son sein des irrégu­larités, telles que soulevées par la CIE,1'article 246 du code de procédure civile, en ce cas, n'a édicté aucune sanction;
Dès lors, pour DANDAN Pierre, la CIE est mal venue à invoquer une nullité d'ordre public;
Pour statuer comme il a été mentionné le premier juge a, en la forme, considéré que les prescriptions de l'article 246 du code de procédure civile, ne sont pas sanctionnées par une nullité absolue en sorte que la CIE aurait dû démontrer en quoi l'omission de la profes­sion et de la nationalité de DANDAN Pierre lui avait causé un préjudice;
Par ailleurs, le premier juge a estimé que l'exploit de dénonciation dont la nullité a été sollicitée, a respecté les exigences légales, et qu'en tout état de cause, l'invalidité dudit exploit ne saurait entraîner celle de la saisie-attribution proprement dite;
Partant, la juridiction saisie a conclu à l'irrecevabilité du recours exercé par la CIE;
En cause d'appel, la CIE a reproché au premier juge d'avoir statué de la sorte, alors que manifestement, selon elle, le non respect des mentions de l'article 24 du code de procédure civile, donne lieu à une nullité de plein droit;
Au demeurant, selon l'appelante, le fait pour DANDAN Pierre de n'avoir pas indiqué sa nationalité dans l'exploit de dénonciation, lui a causé un préjudice;
En effet, pour la CIE ,une telle omission l'empêche de solliciter, le cas échéant, une caution judicatum solvi
Ce faisant, a-t-elle poursuivi c'est à tort que son action a été déclarée irrecevable, d'autant que l'exploit de dénonciation étant nul, le délai d'un mois à elle imparti en ce cas, n'avait donc pas commencé à courir;
Dès lors, elle a conclu à l'infirmation de l'or­donnance querellée;
En statuant à nouveau, elle prie la Cour de constater la nullité de l'exploit de saisie-attribution du 27 Août en raison de l'invalidité de l'acte de dénonciation à elle signifié le jour même, et qui, par ailleurs, comporte d'autres irrégularités;
En effet, selon la CIE, outre les omissions dont elle a fait état au début de son argumentation, ledit exploit de dénonciation n'a pas indiqué de manière précise, la juridiction devant connaître du recours en mainlevée, pas plus que la date exacte d'expiration du délai à elle imparti, ainsi que le décompte précis de la créance ré­clamée intérêts, de droit et frais;
Ainsi, selon elle, l'article 160 de l'acte uniforme sur les voies d'exécution a de la sorte, été violé;
En réponse, en cause d'appel, l’intimé DANDAN Pierre a pour sa part conclu à la confirmation de la décision attaquée;
Reprenant pour l'essentiel les moyens par lui développés devant le premier juge, l'intimé a indiqué que le recours en mainlevée de la saisie-attribution en cause, a été initiée par la CIE hors délai, en raison de la régularité de son exploit de dénonciation;
Par ailleurs a-t-il articulé, l'exploit en cause, en désignant comme juridiction compétente en la matière ,1e Tribunal de Première Instance d'Abidjan a respecté les exigences de l'article 160 suscité;
Relativement à l'indication de la date d'expiration du recours ouvert à la CIE, l'intimé considère qu'en raison du caractère franc des délais de procédure, celui en cause courait du 28 AOUT 2002 au 29 Septembre 2002;
Enfin, DANDAN Pierre a fait valoir en ce qui concerne le décompte des sommes réclamées, que cette exigence a par lui été respectée, dans la mesure où, à aucun moment ledit acte uniforme n'a fait de la réalité ou la fausseté du dé­compte présenté, une condition de validité de l'exploit en cause;
SUR CE
L'intimé ayant conclu, il y a lieu de statuer contradictoirement;
EN LA FORME
L'appel de la CIE est conforme aux prescriptions légales; Il doit, en conséquence être déclaré recevable;
AU FOND
II est acquis au débat, que par exploit en date du 27 Août 2002, DANDAN Pierre a fait dénoncer à la CIE,la saisie-attribution de créance qu'elle a fait pratiquer au détri­ment de celui-ci, le jour même;
De l'examen dudit exploit de dénonciation il ressort qu'il n'y a pas été mentionné la provision et la nationa­lité de DANDAN Pierre,
Cependant, bien qu'en cela, les prescriptions de l'article 246 du code de procédure civile n'aient pas été respectées, les omissions sus-visées ne sauraient entacher de nullité l'exploit en cause;
En effet, la profession et la nationalité du requérant ne touchant pas à la substance même de l'exploit servi, la CIE est mal venue à invoquer un cas de nullité d'ordre public;
La CIE ne peut invoquer en l'espèce une quelconque nullité qu'en faisant la preuve d'un préjudice par elle subi; ce qui n'est pas le cas;
En effet, la caution "judicatum soivi " dont la CIE prétend avoir été lésée, du fait de l'absence d'indication de la nationalité de DANDAN Pierre, ne peut constituer en soi un préjudice certain, dans la mesure où ladite caution relève de la décision souveraine de la juridic­tion saisie;
Ainsi, c'est donc à bon droit, que le premier juge a rejeté comme mal fondés les moyens de la CIE sur ce point.
Par ailleurs, c'est de manière vaine que la CIE invo­que la violation par son créancier saisissant, des dispo­sitions de l'article 160 de l'acte uniforme sur les voies d'exécution;
De fait, contrairement à l'opinion de la CIE, il n'existe pas à l'heure actuelle de tribunal de première instance d'Abidjan-Yopougon, le Tribunal de Yopougon étant connu sous l'appellation officielle de " Tribunal de Première Instance de Yopougon ";
Ce faisant, l'huissier instrumentaire en indiquant dans l'exploit de dénonciation que la juridiction compé­tente pour connaître des contestations est celle d'Abidjan s'est conformé aux exigences du texte de loi sus-visé;
De même , l'huissier instrumentaire, en mentionnant que la date buttoir pour l'exercice du recours de la CIE est le 29 Septembre 2002, a respecté les prescriptions de l'article 160 précité, quand bien même le jour ainsi indiqué est un dimanche;
En effet, à aucun moment l'acte uniforme sur les voies d'exécution, n'a exigé sur ce point comme condition de validité de l'exploit en cause, la conformité de la date mentionnée avec les règles applicables en matière de computation des délais
Partant l'exploit de dénonciation notifié à CIE le 27 Août 2002, étant régulier, c'est donc à bon droit que le premier .juge a considéré comme initié hors délai, le recours que celle-ci a exercé le 03 Octobre 2002;
Aussi,1'ordonnance querellée mérite-t-elle d'être confirmée en toutes ses dispositions;
L'appelante ayant succombé, il lui faut supporter les dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort;
– déclare recevable, mais mal fondé, et le rejette comme tel, l'appel interjeté par la CIE de l'ordonnance N° 4741 rendue le 11 Octobre 2002, par la juridiction Présidentielle du Tribunal de Première Instance d'Abi­djan;
– Confirme ladite ordonnance en toutes ses dispositions
– Met les dépens à la charge de l'appelante.