J-03-39
HYPOTHEQUE JUDICIAIRE SUR LES PEINES ET IMPENSES D’UN IMMEUBLE POUR GARANTIR L’EXECUTION D’UNE PROMESSE DE VENTE – JUGEMENT INTERVENU POUR ORDONNER LA REALISATION ET LA PERFECTION DE LA VENTE – SAISINE ULTERIEUR2E DU MEME TRIBUNAL POUR VALIDER L’HYPOTHEQUE JUDICIAIRE – RANG DE L’HYPOTHEQUE A LA DATE DE SON INSCRIPTION – EXECUTION PROVISOIRE.
Article 136 AUPSRVE ET SUIVANTS
En l’état d’un jugement ordonnant la réalisation d’une promesse de vente, il y a lieu de valider l’hypothèque conservatoire prise par le bénéficiaire de cette promesse sur les peines et impenses édifiées par le promettant sur une parcelle et de dire qu’elle prendra rang à la date de son inscription. Compte tenu de l’urgence, il y lieu de prononcer l’exécution provisoire.
(Tribunal Régional de Thiès, jugement du 20 juin 2002. Léonard COLLUSI contre Macoumba SENE).
COUR D’APPEL DE DAKAR
TRIBUNAL RÉGIONAL DE THIÈS
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier;
Ouï le demandeur en ses demandes;
Nul (ne comparaissant) pour le défendeur défaillant;
Le Ministère Public entendu;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que par acte daté du 07 mai 2002 de Me Cheikh Tidiane TAMBADOU, Huissier de justice à Mbour, Leonard COLLUSI a assigné Macoumba SENE, en validation de l’hypothèque conservatoire prise sur les peines et soins édifiés sur la parcelle objet du lot N° 162/ASD, jusqu'à concurrence de 12.000.000 F, et ce à compter de sa date d’inscription, l’exécution provisoire et la condamnation du défendeur aux dépens étant en outre sollicitées;
EN LA FORME
Attendu que l’action a été introduite dans les forme et délai légaux; qu’il échet de la déclarer recevable;
Attendu que le sieur SENE, bien que régulièrement assigné, n’a pas comparu, ni été représenté; qu’il convient de statuer par défaut à son égard;
AU FOND
Attendu que dans son acte introductif d’instance et suivant conclusions en date du 13 mai 2001, le requérant expose avoir pratiqué une hypothèque sur les peines et soins édifiés sur la parcelle N° 162 ASD appartenant à Macoumba SENE, et ce, pour avoir sûreté de sa créance de 11.936.000 FCFA;
Qu’il soutient que par promesse unilatérale de vente consentie le 22 décembre 1998, le requis s’était engagé soit à s’acquitter de sa dette, soit à lui vendre ses impenses édifiées sur la parcelle N° 162 ASD; que n’ayant pas respecté ses engagements, le Tribunal de céans saisi alors d’une action en perfection de vente, a, par décision N° 157 en date du 24 août 2000, ordonné la réalisation de l’opération; que malgré tout, SENE n’a daigné exécuter ses engagements ni le jugement; que l’hypothèque est donc fondée, et qu’il sollicite en conséquence, sa validation;
Attendu que le défendeur n’ayant pas conclu, n’a plaidé aucune cause en sa faveur;
Attendu qu’il n’est pas discuté que Leonard COLLUSI avait prêté à Macoumba SENE la somme de 11.936.000 F; que par promesse de vente datée du 22 décembre 1998 versée aux débats, ce dernier s’était engagé à s’acquitter de sa dette par des versements de 150.000 F, à compter du 31 décembre 1998, à défaut, céder les impenses édifiées sur sa parcelle objet du lot N° 162/ASD à COLLUSI;
Attendu que devant la carence de SENE, la juridiction de céans a, suivant jugement N° 157 daté du 24 août 2000, ordonné la réalisation de la vente, sous astreinte de 30.000 F par jour de retard; que malgré tout, le requis ne s’est pas exécuté; que l’hypothèque conservatoire prise, en pareil cas, par COLLUSI sur les peines et soins édifiés sur la parcelle N° 162/ASD appartenant à SENE, apparaît régulière et fondée; qu’il échet de la valider et de dire qu’elle prendra rang en sa date d’inscription;
Attendu qu’il y a urgence, qu’il convient d’ordonner l’exécution provisoire;
Attendu que le défendeur ayant succombé, il incombe de le condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard de Leonard COLLUSI, par défaut à l’encontre de Macoumba SENE, en matière civile et en premier ressort;
– Reçoit en la forme l’action de Leonard COLLUSI;
AU FOND
– Déclare Macoumba SENE débiteur de Leonard COLLUSI, de la somme de 11.936.000 F;
– Ordonne la validation de l’hypothèque conservatoire prise par COLLUSI sur les peines et soins édifiés sur la parcelle objet du lot n° 162/ASD, appartenant à Macoumba SENE;
– Dit que cette hypothèque prendra rang à compter de sa date d’inscription;
– Ordonne l’exécution provisoire;
– Condamne Macoumba SENE aux dépens;
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus;
Et ont signé le Président et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA – SAYEGH, Professeur agrégé, Consultant
C…ayant avancé la somme de 11 936 000 FCFA à SM pour financer la construction de peines et impenses sur une parcelle, s’est fait consentir une promesse de vente de ces édifications. Devant l’inexécution de son obligation par le débiteur, le créancier obtint du tribunal une décision ordonnant la réalisation de l’opération de vente. Le débiteur se refusant à parfaire la vente, le créancier obtint une hypothèque conservatoire sur les peines et impenses, qui est validée par la présente décision qui contient plusieurs sujets d’étonnement.
Les ventes d’immeubles ainsi que les hypothèques ne peuvent porter que sur des biens et des droits immobiliers. Or, aucune indication ne nous est donnée par le Tribunal sur la nature juridique de la parcelle n° 162/ASD (titre foncier ? titre d’occupation précaire ?…) ni sur les peines et impenses (droit de superficie ?…bail à construction ?…) et il ne semble même pas qu’une telle question ait été posée.
En second lieu, puisque une précédente décision avait prononcé la perfection de la vente et ordonné sa réalisation, pourquoi C… n’a-t-il pas utilisé cette décision pour demander à la conservation foncière de procéder à l’inscription de son droit de propriété ? Cela eût été plus simple que de recourir à une hypothèque qu’il faut ensuite réaliser, à condition qu’on puisse intellectuellement imaginer qu’un propriétaire (ce que C… était devenu depuis le jugement déclarant la vente parfaite) puisse prendre hypothèque sur son propre immeuble .
S’agissant de l’hypothèque judiciaire (et non conservatoire pour respecter les termes de l’acte uniforme sur les sûretés) , par application de l’article 144 AUS, elle doit prendre rang au jour de l’inscription provisoire sauf si celle-ci n’avait pas été prise à sa date.
Enfin, on ne voit pas quel intérêt il y a avait à prononcer l’exécution provisoire puisque l’octroi d’une hypothèque judiciaire et son inscription peuvent toujours être prises immédiatement dès que le juge ou le tribunal l’autorise, étant entendu que ces mesures peuvent être rapportées par l’exercice des voies de recours ordinaires.