J-03-58
SAISIE VENTE – INTRODUCTION D’UNE PROCEDURE EN DISTRACTION D’OBJETS SAISIS – APPLICATION DE L’ARTICLE 139 AU/RVE – SUSPENSION DE LA PROCEDURE DE SAISIE JUSQU’A L’INTERVENTION DE LA DECISION SUR L’ACTION EN DISTRACTION – ARTICLE 139 AUPSRVE – ARTICLE 49 AUPSRVE.
Il y a lieu d’observer la suspension de la procédure de saisie, lorsqu’il y a une action en distraction d’objets saisis, jusqu’à la décision du tribunal devant lequel est portée cette action.
Article 139 AUPSRVE
Article 49 AUPSRVE
(Cour d’appel de Dakar ,chambre civile et commerciale 2, arrêt du 4 janvier 2001, Société AFRICARS c/ GIE AL ZAR et Mourtada CISSE).
LA COUR
Vu les pièces du dossier,
Oui les parties en toutes leurs demandes, fins et conclusions;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Considérant que par exploit d’huissier en date du 27/07/1999, la Société AFRICARS a interjeté appel de l’ordonnance de référé rendue le 26 juillet 1999 par le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar dont le dispositif est ainsi conçu :
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
Tous droits des parties étant réservés quant au fond;
EN LA FORME :
Rejetons toutes les exceptions soulevées;
Déclarons l’action recevable,
AU FOND
Ordonnons la discontinuation des poursuites jusqu’à l’intervention d’un jugement sur la procédure de distraction d’objet saisis initiée par le GIE AL AZAR;
Considérant que l’appel fait dans les formes et délai prescrits par loi est recevable en la forme;
LES FAITS
Considérant que par jugement de défaut en date du 1er juillet 1998 le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar a condamné Sérigne Mourtada MBACKE à payer à la société AFRCARS la somme de 1.107.460 F (un million cent sept mille quatre cent soixante) francs à titre de réparation; que ledit jugement a été signifié le 04/05/1999 à SICAP MERMOZ villa n°7675; que par des actes des 21 mai et 22 juin 1999, la société AFRICARS a procédé à la saisie exécution de divers mobiliers et matériels de bureau à Colobane à Dakar;
Considérant que Sérigne Mourtada MBACKE a formé opposition au jugement du 1er juillet 1998 et le 16 juin 1999 et initié une procédure de référé sur difficultés le 24 juin 1999; que le GIE AL AZAR a, le 25 juin 1999, assigné la Société AFRICARS et Sérigne Mourtada MBACKE en distraction d’objets saisis devant le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar,
Considérant que l’intimé a opposé que le GIE AL AZAR dont le mobilier est saisi, est naturellement fondé à s’y opposer;
Considérant que la saisie a été pratiquée à Colobane au siège du GIE AL AZAR; que ce dernier a introduit une procédure en distraction d’objets saisis devant le Tribunal Régional Hors Classe; qu’il échet, dans ces conditions, par application de l’article 139 de l’Acte Uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, ordonner la suspension de la procédure de saisie exécution jusqu’à l’intervention de la décision sur la demande en distraction d’objets saisis de GIE AL AZAR;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référés et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclarant l’appel recevable;
AU FOND
Infirmant partiellement,
Ordonne la suspension de la procédure de saisie jusqu’à intervention d’une décision sur la demande en distraction d’objets saisis;
Réserve les dépens.
Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement par la Cour d’appel de Dakar, Chambre Civile et Commerciale en son audience publique et ordinaire du 04/01/2001 séant au palais de justice de ladite ville Bloc des Madeleines à laquelle siégeaient Monsieur Abdoulaye NDIAYE, Président, Messieurs Doudou NDIAYE et Mamadou NDIAYE, Conseillers et avec l’assistance de Me Mame Penda NDOYE, Greffier.
Observations :
Par Ndiaw DIOUF, Agrégé des Facultés de Droit, Directeur du Centre de Recherche, d’Etudes et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA) de l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar
Il est rare que la procédure de saisie se déroule jusqu’à son terme sans donner lieu à des incidents. En matière de saisie – vente, il existe trois types d’incidents : d’abord, ceux qui sont soulevés par le débiteur lui-même, ensuite ceux qui sont soulevés par d’autres créanciers que le saisissant, enfin ceux qui sont soulevés par les tiers.
L’arrêt de la Cour d’appel de Dakar, ci-dessus reproduit, est rendu à propos de cette dernière catégorie d’incidents connue sous la dénomination d’action en distraction d’objets saisis. Cette décision est intervenue dans les circonstances suivantes : une personne condamnée par défaut a été l’objet d’une procédure de saisie – exécution consécutive à la décision de condamnation (il est curieux qu’une procédure de saisie-exécution soit initiée postérieurement à l’entrée en vigueur de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution; en effet, cet Acte remplace la saisie exécution par la saisie vente). Pour résister à l’action, elle a formé opposition du jugement de condamnation et initié une procédure de référé sur difficulté. A peu prés à la même période (plus exactement le lendemain), le groupement d’intérêt économique, au siège duquel la saisie a été pratiquée, a introduit devant le tribunal régional, une action en distraction d’objets saisis.
Le juge des référés ayant fait droit à la demande et ordonné la discontinuation des poursuites jusqu’à l’intervention d’un jugement sur la procédure de distraction, la Cour d’appel saisie d’un recours contre cette décision a infirmé partiellement la décision du juge des référés et ordonné la suspension de la procédure jusqu’à l’intervention d’une décision sur la demande en distraction.
On peut s’étonner que la Cour d’appel parle d’infirmation partielle alors que la mesure qu’elle a ordonnée (suspension de la procédure jusqu’à l’intervention de la décision sur l’action en distraction) est identique à celle retenue par le juge des référés (discontinuité des poursuites jusqu’à l’intervention d’un jugement) : il s’agit dans les deux cas, à notre avis, de suspendre le déroulement de la procédure en attendant que le juge compétent statue sur la demande en distraction.
C’est plutôt sur cette question de compétence que la Cour d’appel aurait dû porter son appréciation et, peut-être (on peut en douter cependant), fonder sa décision d’infirmation. L’action en distraction a, en effet, été portée devant le tribunal lui-même, alors que, d’après l’article 49 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, « La juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute autre demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou le magistrat délégué pal lui ». On peut aussi reprocher au juge des référés d’avoir ordonné la suspension des poursuites sur la base d’une action en distraction introduite par un tiers alors qu’il était saisi d’une demande émanant du débiteur saisi (qui fonde sa demande sur l’opposition formée contre le jugement servant de base à la saisie).