J-03-67
SAISIE MOBILIERE – SAISIE CONSERVATOIRE – VALIDATION – PROCEDURE NON PREVUE PAR L’ACTE UNIFORME PORTANT ORGANISATION DES PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT ET DES VOIES D’EXECUTION – ARTICLE 69 AUPSRVE.
Il n’y a pas lieu à ordonner la validation d’une saisie conservatoire, cette procédure n’étant pas prévue par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution qui prévoit plutôt la conversion de la saisie conservatoire en saisie vente.
Article 69 AUPSRVE
(Tribunal Régional Hors Classe de Dakar, jugement n 1435 du 18 juillet 2000, Ibrahima LO c/ Mme Denise NDIAYE).
LE TRIBUNAL
Vu les pièces du dossier;
Oui les Avocats des parties en leurs conclusions respectives;
Le Ministère Public entendu et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Attendu que par exploit en date du 7 octobre 1999, de Me Bernard SAMBOU, huissier de justice, Monsieur Ibrahima LO a assigné Madame Denise NDIAYE en paiement de la somme en principale de 1.541.085 frs, outre les frais et intérêts de droit et en validation de la saisie conservatoire pratiquée sur ses biens par procès-verbal du 1er octobre 1999, l’exécution provisoire du jugement et la condamnation de la défenderesse aux dépens étant également sollicitée;
Que par écritures du 28 mars 2000 il a porté à 2.014.125 frs le montant de la somme principale réclamée et a sollicité, en outre, la condamnation de la dame NDIAYE à lui payer la somme de 200.000 frs à titre de dommages et intérêts;
EN LA FORME :
Attendu que l’action a été régulièrement introduite, qu’il échet de la recevoir;
AU FOND :
Attendu qu’à l’appui de ses demandes, le sieur LO a expliqué qu’il avait donné en bail un local à usage d’habitation à la dame Denise NDIAYE moyennant un loyer mensuel de 100.000frs; que cette dernière reste lui devoir la somme de 1.800.000 frs représentant 18 mois de loyers et celle de 214.125 frs correspondant à des factures d’eau et d’électricité qu’il a été obligé de régler à la place de la dame NDIAYE; que la créance étant exigible et impayée malgré un commandement de payer servi à la débitrice, il est fondé à solliciter la somme de 200.000 frs à titre de dommages et intérêts ainsi que l’exécution provisoire du jugement;
Attendu que bien qu’ayant constitué conseil, la défenderesse n’a pas conclu pour opposer un quelconque moyen de défense à l’action du demandeur;
Attendu qu’aucune des écritures du demandeur ne donne une indication précise de la période pour laquelle les arriérés de loyers réclamés sont dus; qu’il résulte seulement des quittances produites que cette période s’étend de mai 1998 à septembre 1999 inclus soit au total 17 mois;
Attendu qu’il résulte du contrat versé aux débats que le loyer mensuel était fixé à 100.000 frs; que pour la période ci-dessus spécifiée, la défenderesse n’a pas contesté ni son occupation des locaux ni sa défaillance dans le règlement des loyers; qu’il échet, en conséquence, de la condamner au paiement de la somme de 1.700.000 frs outre les intérêts de droit;
Attendu qu’il résulte en outre des factures et reçus produits que le sieur LO a réglé à la SDE et à la SENELEC des factures d’eau et d’électricité faite (?) par la dame NDIAYE, pour un montant total de 214.125 frs; qu’il échet de condamner cette dernière au paiement de ladite somme;
Attendu, enfin, que la défenderesse, malgré un commandement de payer servi le 20 septembre 1999, ne s’est pas libérée de sa dette, qu’elle n’a, par la suite, fourni aucune justification à sa défaillance; que cette attitude est préjudiciable aux intérêts de son créancier; qu’il échet de le condamner à payer à ce dernier la somme de 150.000 frs à titre de dommages et intérêts;
Attendu, par contre, que la validation de la saisie conservatoire sollicitée n’est pas prévue par l’Acte uniforme portant organisation ds procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, lequel dispose, en son article 69, qu’il appartient au créancier muni d’un titre exécutoire de signifier au débiteur un acte de conversion de la saisie conservatoire en saisie vente; qu’il échet de dire n’y avoir lieu à validation de la saisie conservatoire;
Attendu que l’attitude de la débitrice met en péril le recouvrement de la créance; qu’il échet d’ordonner l’exécution provisoire du jugement jusqu’à hauteur de 500.000 frs;
Attendu que la défenderesse a succombé, qu’il échet de la condamner aux dépens;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort;
Reçoit l’action de Ibrahima LO;
Condamne Denise NDIAYE à payer à Ibrahima LO la somme principale de 1.914.125 frs outre les intérêts de droit à compter du jugement ainsi que celle de 150.000 frs à titre de dommages et intérêts;
Déboute Ibrahima LO du surplus de sa demande en paiement;
Dit n’y avoir lieu à validation de la saisie conservatoire par application de l’article 69 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
Ordonne l’exécution provisoire du jugement jusqu’à hauteur de la somme de 500.000frs;
Condamne Denise NDIAYE aux dépens.
Observations :
Par Ndiaw DIOUF, Agrégé des Facultés de Droit, Directeur du Centre de Recherche, d’Etude et de Documentation sur les Institutions et les Législations Africaines (CREDILA) de l’Université Cheikh Anta DIOP de Dakar
L’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution a complètement changé la physionomie des voies d’exécution. Les mesures qu’il prévoit sont radicalement différentes de celles qui étaient connues sous l’empire de la législation ancienne et auxquelles les praticiens étaient habitués (pour le Sénégal les dispositions des articles 362 à 533 du Code de Procédure civile). C’est ce qui explique que, dans les premières années ayant suivi son entrée en vigueur, il y ait eu beaucoup d’errements. Les plaideurs demandaient en effet, souvent, des mesures non prévues. C’était justement le cas du demandeur dans l’affaire qui a donné lieu au jugement ci-dessus reproduit. Celui-ci sollicitait la validation d’une saisie conservatoire qu’il avait pratiquée sur les biens de sa débitrice. Le tribunal a rejeté cette demande aux motifs que la validation de la saisie conservatoire n’est pas prévue par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution lequel dispose, en son article 69, qu’il appartient au créancier muni d’un titre exécutoire constatant sa créance de signifier au débiteur un acte de conversion de la saisie conservatoire en saisie-vente.