J-03-94
Voir Ohadata J-02-60
– Procédures collectives – Entreprise publique constituée sous forme de société commerciale – entreprise publique placée sous administration provisoire et en état de cessation des paiements – déclaration de cessation de paiement par l’administrateur provisoire – absence de propositions concordataires – liquidation des biens.
– Procédures collectives – date de cessation des paiements – fixation provisoire de la date.
Article 25 AUPCAP et suivants
Article 37 AUPCAP
Une entreprise publique constituée sous forme de société commerciale et placée sous administration provisoire, peut être déclarée en liquidation des biens, si elle est en cessation des paiements.
Il en est ainsi si son actif disponible (1.022.265.650 FCFA) est inférieur à son passif exigible (5.702.886.061 FCFA) et quelle ne peut, de ce fait, régler ledit passif.
En application d’une décision gouvernementale de mettre cette entreprise en liquidation des biens, et des articles 25 et suivants de l’Acte Uniforme sur les procédures collectives d’apurement du passif, il y a lieu de prononcer contre elle, la liquidation des biens, alors, au surplus, qu’elle n’a pas fait d’offres concordataires lors de sa déclaration de cessation des paiements.
L’administration provisoire ayant constaté, dans un rapport, que cette situation est constante depuis 1998, il y a lieu, conformément à l’article 37 AUPCAP, de fixer provisoirement la date de cessation des paiements au 17 octobre 1999.
[Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou. Jugement N° 423 du 25 avril 2001.].
Cour d’appel de Ouagadougou
Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou
25 Avril 2001
Vu la requête de l’Administrateur provisoire de la société FASO FANI, ayant pour Conseil Maître Franceline TOE-BOUDA, Avocate au barreau du Burkina, tendant à la liquidation des biens de ladite société;
Vu les pièces jointes, notamment le rapport final d’administration provisoire en date de janvier 2001;
Vu les dispositions de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif;
Ouï les réquisitions du Ministère Public;
Par requête en date du 17 avril 2001, l’Administrateur provisoire de la société FASO FANI a sollicité la liquidation des biens de ladite société;
Au soutien de sa requête, il explique que depuis l’année 1998, la situation financière de la société n’a cessé de se dégrader, pour aboutir dès mars 2000, à l’arrêt total de ses activités;
Qu’ainsi, en avril 2000, le conseil des ministres a décidé de placer la société sous administration provisoire,et l’a nommé à cette fonction;
Qu’un diagnostic de la société a permis de révéler qu’elle a absorbé plus de deux fois et demi son capital social, entraînant un déficit d’exploitation de quatre milliards trois cent quarante six millions trois cent trente un mille sept cent soixante un (4.346.331.761) FCFA;
Que l’entreprise est donc en cessation des paiements;
Que de ce fait, le gouvernement a décidé sa mise en liquidation des biens le 07 mars 2001;
SUR CE :
Attendu que l’article 02 alinéa 4 de l’Acte Uniforme ci-dessus visé prévoit que la liquidation des biens est applicable à toute entreprise publique ayant la forme d’une personne morale de droit privé, qui cesse ses paiements;
Que les articles 25 et suivants de cette loi donnent les conditions d’ouverture de la procédure;
Attendu que la société FASO FANI est une entreprise publique constituée sous forme de société commerciale et inscrite au registre du commerce sous le N° 35/B;
Qu’au 31 décembre 2000, son passif exigible s’évaluait à cinq milliards sept cent deux millions huit cent soixante six mille soixante un (5.702.866.061) FCFA contre un actif disponible de un milliard vingt deux millions deux cent soixante cinq mille six cent cinquante (1.022.265.650) FCFA;
Qu’il résulte de ce qui précède, que l’entreprise est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible par son actif disponible;
Qu’elle est donc en cessation des paiements;
Attendu que cette situation est au regard du rapport d’administration provisoire, constante depuis 1998;
Que conformément à l’article 34 de l’Acte Uniforme, il y a lieu de fixer provisoirement la date de la cessation des paiements au 17 octobre 1999;
Attendu que le 17 avril 2001, la société FASO FANI a procédé à la déclaration de cessation des paiements, comme l’atteste l’acte de dépôt N° 151/01 dressé par Maître ZOUNGRANA Félicité, Greffière en chef du Tribunal de Grande Instance de Ouagadougou, versé au dossier;
Que cette déclaration est conforme aux dispositions de l’article 26 de l’Acte Uniforme sus-évoqué;
Attendu que la société FASO FANI sollicite la liquidation de ses biens;
Qu’ainsi, elle n’a déposé aucune proposition de concordat de redressement;
Qu’il y a donc lieu de prononcer la liquidation des biens de cette société;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, après débats en Chambre du Conseil, sur requête en matière commerciale et en premier ressort;
EN LA FORME :
– Déclare l’administration provisoire de FASO FANI recevable en sa demande;
AU FOND :
Y faisant droit, constate que la société FASO FANI est en cessation des paiements;
– Fixe provisoirement la date de la cessation des paiements au 17 octobre 1999;
En conséquence, prononce la liquidation des biens de FASO FANI;
– Désigne Monsieur KAM Guy Hervé R., Juge au siège, juge commissaire chargé de suivre les opérations de liquidation;
– Nomme SANOU S. Michel, expert comptable agréé près les cours et tribunaux, et Maître Franceline TOE-BOUDA, Avocate à la Cour, syndics chargés de la liquidation de la société FASO FANI;
– Met les dépens à la charge de la liquidation.
Ainsi fait et jugé publiquement, et ont signé le Président et le Greffier, les jour, mois et an ci-dessus.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur agrégé, Consultant
Qu’une entreprise publique constituée sous forme de société commerciale, puisse être déclarée en liquidation des biens pour cause de cessation de paiement, ne fait aucun doute, surtout après une perte de plus de trois-quarts de son capital, comme le fait remarquer, au passage, le tribunal.
En effet, les autorités de tutelle auraient pu se contenter de décider la liquidation des biens et organiser cette liquidation en s’inspirant des règles du droit des sociétés et des procédures collectives, pour réaliser une liquidation aussi collective et égalitaire que possible.
L’intérêt d’une liquidation des biens prononcée judiciairement ne se serait avéré que si elle avait été demandée par des créanciers impayés craignant que la liquidation ne soit pas collective et égalitaire, ou espérant mettre tout ou partie du passif à la charge des administrateurs responsables de l’insuffisance d’actif ou coupables de délits assimilés à la banqueroute simple ou frauduleuse.
Autre sujet de curiosité : le tribunal a fixé la date de cessation des paiements à une date antérieure au jugement de 18 mois, comme le lui prescrit l’article 37 AUPCAP, pour le cas où les dettes impayées les plus anciennes seraient antérieures à cette période maximale de 18 mois. Mais pourquoi l’avoir fixée « provisoirement », alors qu’elle ne peut en aucun cas, être antérieure à cette période ? Le tribunal escomptait-il que l’on découvrirait, ultérieurement, une date de cessation des paiements plus proche du jugement déclaratif ? On peut douter d’une telle éventualité, face à un rapport de l’administration provisoire, qui constatait que cette situation (de cessation des paiements) durait depuis 1998.