J-04-04
SURETES – NANTISSEMENT – CONTRAT DE NANTISSEMENT D'UN MARCHE AU PROFIT D'UNE BANQUE – ARTICLE 1184 DU CODE CIVIL BURKINABE – INEXECUTION DES OBLIGATIONS PAR LA BANQUE – FAUTE DE LA BANQUE – RESOLUTION DU CONTRAT DE NANTISSEMENT (OUI) – ARTICLE 1147 DU CODE CIVIL BURKINABE – PAIEMENT DE DOMMAGES ET INTERETS (Oui).
En cas d'exécution d'un contrat synallagmatique par une partie qui ne satisfait pas à son engagement, l'autre « partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts ».
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), jugement n° 86 du 24 janvier 2001, Technique Moderne de Bâtiments et d'Etudes (TMBE) c/ Société Générale de Banques au Burkina (SGBB)).
LE TRIBUNAL,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties à l'audience du 28 avril 1999, date à laquelle l'affaire a été renvoyée à la mise en état et programmée ensuite pour l'audience du 19 juillet 2000;
Advenue cette date, le dossier a été renvoyé au 18 octobre 2000. A cette date, le dossier a été mis en délibéré pour jugement être rendu le 19 novembre 2000;
Advenue cette date, le délibéré à été prorogé au 24 janvier 2001. A cette date, le tribunal vidant son délibéré a statué en ces termes :
LE JUGEMENT
Par acte d'huissier en date du 07 avril 1999, la Technique Moderne de Bâtiments et d'Etudes (TMBE) laquelle a élu domicile en l'Etude de maître SANON Sidi, Avocat à la Cour, assignait la Société Générale de Banques au Burkina (SGBB) laquelle a pour conseil maître Bénéwendé S. SANKARA, Avocat à la Cour, à l'effet de voir :
- Prononcer la résolution du contrat de nantissement signé avec la SGBB pour inexécution par celle-ci de ses obligations;
- Déclarer la SGBB responsable de la résiliation du marché de la TMBE;
- Condamner par conséquence, la SGBB à lui payer des dommages et intérêts;
- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir;
- Condamner la SGBB aux dépens.
A l'appui de ses prétentions, la TMBE explique qu'elle a été attributaire d'un marché d'un montant de CENT CINQUANTE SIX MILLIONS NEUF CENT QUATRE VINGT MILLE NEUF CENT QUARANTE DEUX (156.980.942) F CFA auprès de l'Agence FASO BAARA pour la construction d'une cité universitaire à NASSO;
Que pour l'exécution dudit marché, elle s'est adressée à la SGBB pour lui solliciter son concours financier sous forme d'avance de démarrage de 20% sur le montant du marché;
Que lors d'une rencontre avec la SGBB, elles signèrent un contrat de nantissement dans lequel la SGBB s'est engagée à lui apporter son concours financier pour lui permettre d'exécuter ledit marché et elle, en garantie du remboursement du prêt à lui consentir par la SGBB, à nantir ledit marché au profit de la SGBB;
Que cependant, contrairement à ses obligations contractuelles, la SGBB n'a daigné mettre son concours financier à sa disposition depuis la signature du contrat de nantissement pour lui permettre d'exécuter le marché;
Que pire, elle procéda au blocage des décomptes payés consécutivement à l'exécution des travaux pré-financés par elle sur fonds propres;
Qu'au regard de l'importance du marché à exécuter, elle s'est vue bloquée en cours d'exécution pour faute de moyens financiers;
Que c'est ainsi que l'Agence FASO BAARA procéda à la résiliation du marché pour retard d'exécution;
Qu'il est constant que le marché n'allait pas être résilié si la SGBB lui avait apporté son concours financier comme promis dans le contrat de nantissement;
Que c'est donc la faute de la SGBB si le marché a été résilié;
Que face à cette inexécution, elle a procédé à la dénonciation du contrat de nantissement du marché;
Qu'elle sollicite du Tribunal de faire droit à sa demande;
En réplique la SGBB fait valoir qu'au titre de ses relations commerciales, elle a concédé à la TMBE divers concours financiers;
Que pour l'exécution d'un marché relatif à la construction d'une cité universitaire, la TMBE a sollicité courant juillet 1998, une avance de démarrage pour ledit marché alors même que celui-ci avait démarré depuis le 19 mars 1998 et était censé s'achever en août 1998;
Que cependant, à la même période, le compte de la TMBE présentait dans ses livres comptables, un solde débiteur dû au non-respect de ses engagements;
Qu'après maintes tractations, les parties convinrent d'un contrat de nantissement;
Que c'est dudit contrat sans ambages que la TMBE prétend tirer des obligations imaginaires non exécutées par la SGBB.
DISCUSSION
Attendu que selon l'article 1184 en cas d'exécution d'un contrat synallagmatique par une partie qui ne satisfait pas à son engagement, l'autre « partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts » :
Attendu que dans le cas d'espèce les parties s'étaient convenues d'un contrat de nantissement dans lequel la SGBB s'était engagée à apporter son concours financier à la TMBE pour la construction de la cité universitaire;
Que cependant la SGBB s'est abstenue d'exécuter son engagement mettant ainsi la TMBE dans l'impossibilité financière d'exécuter sa prestation envers l'Agence FASO BAARA;
Que la TMBE ne pouvant plus exécuter son obligation envers FASO BAARA, le marché a été résilié;
Attendu que la résiliation du marché de construction de la cité universitaire est due à la faute de la SGBB qui a refusé délibérément d'apporter son concours financier à la TMBE;
Qu'il convient de prononcer la résolution du contrat de nantissement signé le 03 août 1998 entre les deux (02) parties pour l'inexécution de ses obligations par la SGBB;
Attendu qu'aux termes de l'article 1147 du Code Civil « le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part »;
Attendu que dans le cas d'espèce, la SGBB s'est refusée délibérément d'exécuter son obligation;
Qu'elle n'apporte aucune preuve d'une cause étrangère l'ayant empêchée dans l'exécution de son obligation;
Que n'ayant pas exécuté son obligation causant ainsi un préjudice certain à la TMBE, il convient de la condamner à payer à la TMBE des dommages et intérêts;
Attendu que la TMBE évalue son préjudice aux CINQ CENT SEPT MILLIONS CENT VINGT UN MILLE SIX CENT SOIXANTE DIX SEPT (507.121.677) F CFA;
Que cette somme est excessive;
Qu'une somme de SOIXANTE MILLIONS (60.000.000) F CFA serait une juste réparation de ce préjudice.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière commerciale et en premier ressort :
Prononce la résolution du contrat de nantissement signé le 03 août 1998 entre la SGBB et la TMBE, en inexécution de ses obligations par la SGBB;
En conséquence condamne la SGBB à payer à la TMBE la somme de SOIXANTE MILLIONS (60.000.000) F CFA à tire de dommages et intérêts;
Déboute la TMBE du surplus de sa demande;
Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire;
Condamne la SGBB aux dépens.