J-04-09
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – BAIL D'UN IMMEUBLE A USAGE PROFESSIONNEL ET D'HABITATION – ARTICLES 69 ET SUIVANTS AUDCG – NOTIFICATION DU CONGE AU PRENEUR – ANNULATION VERBALE DU BAILLEUR – RUPTURE DU BAIL – ARTICLE 93 AL. 2 AUDCG – NECESSITE D'UNE OPPOSITION PAR ACTE EXTRAJUDICIAIRE – DROIT AU RENOUVELLEMENT (NON) – INDEMNITE D'EVICTION (NON).
Dans le contexte du bail commercial, le droit au renouvellement est acquis au preneur qui justifie avoir exploité conformément aux stipulations du bail l'activité prévue à celui-ci pendant une durée d'au moins deux ans. Mais, conformément à l'article 93 alinéa 2, pour avoir droit au renouvellement, le preneur doit s'opposer au congé, par acte extrajudiciaire, au plus tard à la date d'effet de celui-ci.
Le preneur ne peut donc se prévaloir d'une annulation verbale du congé pour bénéficier des dispositions favorables de la loi sur le droit au renouvellement du contrat de bail commercial.
Article 69 AUDCG ET SUIVANTS
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n° 128 du 13 février 2002, LALLOU Georges c/ SAWADOGO Pelga Boukary).
FAITS ET PROCEDURE
Par exploit de maître Rosine Bogoré ZONGO, Huissier de justice, LALLOU Georges a donné assignation à SAWADOGO Pelga Boukary d'avoir à comparaître devant le Tribunal de céans le 1er décembre 1999 pour s'entendre condamner celui-ci à lui payer la somme de 13.800 000 francs CFA au titre d'une indemnité d'éviction et de dommages intérêts;
A l'appui de sa demande, LALLOU Georges expose qu'il avait passé un contrat de bail depuis le 11 février 1994 portant sur un immeuble à usage professionnel et d'habitation, que le 14 juillet 1995 un avenant augmentait le loyer mensuel qui passait de 100.000 à 125.000 F; qu'à sa grande surprise il recevait le 21 juillet 1997 un congé d'avoir à libérer les lieux au plus tard le 31 janvier 1998 sans aucun motif que c'est ainsi qu'il a approché son bailleur qui, après discussions annulait verbalement sa décision de rupture, qu'il payait alors par avance les loyers jusqu'en février 1998; que le 3 mars 1988 une signification portant sur une ordonnance portant expulsion lui a été notifiée;
Que lors d'un référé à sa diligence, le Président du tribunal le déboutait de sa demande de rétractation de l'ordonnance, qu'un appel fut immédiatement interjeté à l'occasion duquel le Président de la Cour d’appel infirmait l'ordonnance d'expulsion du premier juge; que malgré ladite décision SAWADOGO Pelga Boukary l'expulsait abusivement le 16/04/1998 lui occasionnant un grave préjudice dont il demande réparation;
En réplique SAWADOGO P. Boukary explique que pour qu'il y ait réparation il faut une faute de la part de celui à qui elle est demandée, qu'il ajoute qu'aucune faute ne peut lui être reprochée dans la rupture de ses liens contractuels avec le demandeur; qu'il a régulièrement fait une notification de congé dans les formes et délais prescrits par la loi; que c'est après expiration dudit préavis que l'expulsion a été exécutée, qu'en tout état de cause tout contrat à durée indéterminée peut cesser à tout moment sur l'initiative d'une des parties que conformément à l'article 1739 du code civil, « lorsqu'il y a congé signifié, le preneur, quoiqu'il ait continué sa jouissance, ne peut invoquer la tacite reconduction », que l'expulsion de LALLOU Georges est basée sur une décision judiciaire; SAWADOGO Pelga Boukary ajoute par ailleurs que les sommes demandées par LALLOU Georges ne sont nullement justifiées et conclut qu'il soit débouté surtout que l'expulsion n'a entraîné aucune diminution de son chiffre d'affaire; que le remboursement de la somme de 300.000 Francs de caution demandé par LALLOU Georges ne se justifie pas non plus du fait qu'il s'agissait en réalité d'une avance de loyer que le demandeur a épongée dès les premiers mois du contrat;
La cause, appelée le 1er décembre 1999 devant le Tribunal a fait l'objet de plusieurs renvois pour être mis en délibéré le 6 décembre 2000 puis rabattu et renvoyé successivement à l'audience du 14 mars 2001, 4 avril, 6 juin 2001 où elle a été retenue pour délibéré être rendue le 13 février 2001;
Attendu qu'il est constant qu'un contrat de bail a été passé entre LALLOU Georges et SAWADOGO P. Boukary le 11 février 1994 portant sur un immeuble à usage professionnel et d'habitation qu'il n'est par ailleurs pas contesté qu'un congé a été notifié au preneur que le litige porte sur la validité de la rupture;
Attendu qu'au terme de l'article 69 de l'acte uniforme OHADA portant sur le droit commercial général, le bail commercial, s'étend sur les immeubles ou locaux à usage commercial industriel, artisanal ou professionnel; que le contrat dont s'agit se situe dans ce cadre; qu'il échet appliquer les dispositions des articles 69 et suivants de la loi précitée;
Attendu que dans le contexte du bail commercial, le droit au renouvellement est acquis au preneur qui justifie avoir exploité conformément aux stipulations du bail l'activité prévue à celui-ci pendant une durée d'au moins deux ans; qu'en l'espèce il ne fait aucun doute que LALLOU Georges a exploité plus de deux ans les locaux loués conformément au contrat, qu'il pouvait donc prétendre au renouvellement du bail ou à défaut, à une indemnité d'éviction.
Mais attendu que pour avoir droit au renouvellement, le preneur, conformément à l'article 93 alinéa 2 doit s'opposer au congé au plus tard à la date d'effet de celui-ci; que concernant le contrat dont s'agit, LALLOU Georges n'a produit aucun acte prouvant son opposition au congé; que l'annulation verbale du congé dont il se prévaut ne saurait prospérer dans la mesure où il est prévu à cet effet un acte extrajudiciaire, que n'ayant pas agit de cette manière LALLOU Georges ne saurait invoquer les dispositions favorables de la loi sur le droit au renouvellement du contrat de bail commercial, que dès lors, il échet le débouter de sa demande d'indemnité d'éviction;
Attendu que lors de la formation du contrat initial LALLOU Georges avait versé une somme de 300.000 F à titre de caution, que ladite somme est plutôt considérée comme avance par le bailleur, qu'à l'analyse des pièces du dossier, il ressort sans ambiguïté que dès le premier mois du contrat, LALLOU Georges avait commencé à payer le loyer qu'il va sans dire qu'à l’expiration ladite somme devra lui être restituée; tous les loyers ayant été régulièrement payés
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
En la forme : reçoit LALLOU Georges en sa demande;
Au fond : Déboute LALLOU Georges de sa demande d'indemnité d'éviction.
Condamne SAWADOGO Pelga Boukary à lui payer la somme de 300.000 F représentant la caution versée au moment de la conclusion du contrat.
Laisse les dépens à la charge des Parties.