J-04-125
Recouvrement de créance – Injonction de payer – Exploit de signification -Indication du montant des intérêts – Exigence d'ordre public – Inobservation – Nullité.
Recouvrement de créance – Injonction de payer – Cause de la créance -Accident de la circulation – Créance ayant une cause contractuelle ou résultant de l'émission ou l'acceptation d'effet de commerce (non) – Rétractation (Oui).
Doit être déclaré nul l’exploit de signification qui n’indique pas le montant des intérêts tel qu’exigé par l’article 8 de l’Acte Uniforme relatif au recouvrement simplifié de créance.
La procédure d’injonction de payer étant prévue pour le recouvrement d’une créance ayant une cause contractuelle ou résultant de l’omission ou de l’acceptation d’effet de commerce, il ne peut y être recouru pour une créance ayant sa cause dans un accident de la circulation.
Par conséquent, l’ordonnance d’injonction de payer doit être rétractée.
Article 8 AUPSRVE
(Cour d'Appel d'Abidjan, ARRET N° 221 du 20 février 2001, SAFA c/…, Le Juris-Ohada, n° 4/2003, octobre-décembre 2003, p. 42, note BROU Kouakou Mathurin).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions;
Ensemble l’exposé des faits, procédure et prétentions des parties et motifs ci-après ,
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Suivant exploit du 29 juin 2000, la Société Africaine d'Assurance dite SAFA a relevé appel du jugement N° 429 rendu le 29 mai 2000 par le Tribunal d'Abidjan, qui en la cause, a déclaré irrecevable son opposition;
La Société Africaine d'Assurances fait valoir que c'est à tort qu'une telle décision a été prise, l'acte de signification du 11 février 2000 étant nul;
Elle explique en effet, que sur cet acte, il est mentionné que l'ordonnance d'injonction de payer a été rendue par le Tribunal, alors qu'en réalité, elle ne peut être rendue que par une juridiction présidentielle;
Elle ajoute par ailleurs, que les émoluments ne figurent pas sur l'acte et que l'article 8 de la loi uniforme portant sur le recouvrement simplifié de créances a été violé, en ce que le Tribunal compétent pour statuer sur l'opposition n'a pas été indiqué;
Pour le surplus, l'appelante indique qu'aucun contrat, ni chèque n'a été produit, de sorte que la décision attaquée ne manque de surprendre;
Elle conclut à l'infirmation du jugement;
L'intimé, cité à mairie, n'a pas comparu et n'a pas conclu; il convient de statuer par défaut;
DES MOTIFS
SUR LA NULLITE DE LA SIGNIFICA TION DU 11 FEVRIER 2000
L'examen de l'exploit de signification du 11 Février 2000 révèle que celui-ci n'indique pas le montant des intérêts;
Il s'agit d'une exigence d'ordre public, dont l'inexistence entache l'acte de nullité, et cela, conformément à l'article 8 de l'Acte Uniforme relatif au recouvrement simplifié et voies d'exécution du Traité OHADA (sic);
Il convient en conséquence, de déclarer nul l'exploit de signification, et recevable l'opposition formée par la SAFA.
AU FOND
Il résulte des productions, que l'injonction de payer a pour cause le préjudice issu d'un accident de la circulation;
Il s'agit d'une matière régie par le Traité CIMA, entré en vigueur depuis le 15 février 1995;
Dès lors, c'est à tort que la SAFA a été condamnée à payer une provision par voie d'ordonnance d'injonction de payer, procédure prévue pour le recouvrement de créances certaines, liquides, exigibles, et ayant une cause contractuelle ou résultant de l'émission ou de l'acceptation d'effet de commerce;
Il y a lieu en conséquence, de rétracter l'ordonnance N° 1026/2000 du 3 février 2000;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement et par défaut en matière civile et commerciale et en dernier ressort :
EN LA FORME
– Reçoit la SAFA en son appel;
AU FOND
– L'y dit bien fondée;
– Infirme le jugement entrepris, et statuant à nouveau :
– Déclare nul l'acte de signification du 11 février 2000;
– Rétracte l'ordonnance d'injonction de payer N° 1026/2000 du 3 février 2000.
– Président : M SEKA ADON Jean-Baptiste.
Note
Deux problèmes étaient soumis à la Cour d'Appel d'Abidjan.
D’une part, quelle est la sanction d’un exploit de signification d’une ordonnance d'injonction de payer, qui n'indique pas le montant des intérêts, et d'autre part, la créance dont le recouvrement est poursuivi sur la base de l'injonction de payer, a-t-elle une cause contractuelle ou résulte-t-elle de l'émission ou de l'acceptation d'effet de commerce ?
A la première question, la Cour d'Appel d'Abidjan répond qu'un tel exploit est nul, pour n'être pas conforme à l'article 8 de l'Acte Uniforme portant recouvrement simplifié de créance, l'indication du montant des intérêts étant une exigence d'ordre public.
En ce qui concerne la deuxième question, la Cour d'Appel répond par la négative, en rétractant l'ordonnance d'injonction de payer. En effet, la procédure d'injonction de payer est prévue pour le recouvrement de créance ayant une cause contractuelle ou résultant de l'émission ou de l'acceptation d'effet de commerce. Or, en l’espèce, l'injonction de payer a pour cause le préjudice issu d'un accident de la circulation, qui est une matière régie par le Code CIMA.
C'est donc à tort que l'opposant a été condamné à payer une provision sur la base de la procédure d'injonction de payer.
La Cour d'Appel d'Abidjan rappelle ainsi, par cette décision, les créances dont le recouvrement peut être poursuivi sur la base de l'injonction de payer, et partant, les créances qui sont exclues du champ d'application de cette procédure (créance ayant une cause quasi-contractuelle, délictuelle ou quasi délictuelle ou résultant d'un acte unilatéral [voy. Anne-Marie Assi Esso et Ndiaw Diouf,op.cit.p.14 N° 15]).
BROU Kouakou Mathurin