J-04-141
Voir Ohadata J-04-143
VOIES D’EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – CONDITIONS – SAISINE DU JUGE DU FOND – CREANCE NON FONDEE EN SON PRINCIPE – MAINLEVEE (Oui).
Dès lors que le débiteur et le créancier ont tous deux saisis le juge du fond, chacun prétendant être créancier de l’autre, la créance objet du litige ne peut être considérée en l’état des choses comme fondée en son principe; la mainlevée de la saisie doit être ordonnée.
Article 55 AUPSRVE
(Tribunal de Première Instance de Libreville – Ordonnance de référé, Répertoire n° 278/ 2002-2003 du 11 mars 2003, Société MOBIL OIL GABON c/ SCI ABIALI).
REPUBLIQUE GABONAISE
UNION –TRAVAIL- JUSTICE
COUR DAPPEL JUDICIAIRE DE LIBREVILLE
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE LIBREVILLE
COMPARAIT
La société Mobil Oil Gabon ayant son siège social à Libreville, BP 145 représentée par son conseil, maître MEZHER MOULOUNGUI du cabinet d’avocats NTOUTOUME et MEZHER, Avocats associés au barreau du Gabon,
Demanderesse,
Qui expose que par acte en date du 18 février 2003, la société civile immobilière ABIALI a fait pratiquer saisie conservatoire de créances sur les avoirs bancaires sur le fondement de l’article 55 alinéa 2 de l’AUPSRVE;
Que, toutefois, elle élève les contestations ci-après;
Qu’elle prétend qu’en l’état actuel, la créance dont se prévaut la société ABIALI n’est ni certaine, ni liquide, ni exigible et même pas fondée en son principe;
Que, d’ailleurs, elle a introduit une procédure pendante au fond;
Que l’objet de la procédure dont s’agit est, notamment, l’allocation de la somme de 150 000 000 FCFA en réparation du préjudice qui lui a été occasionné, d’une part, du fait des perturbations subies dans son activité et, d’autre part, suite à son déménagement précipité eu égard à l’état de dégradation des lieux loués;
Qu’à ce jour, c’est la société ABIALI qui se trouve être débitrice à son égard en raison de la procédure suscitée et du remboursement de la somme de 200 000 000 FCFA qui s’effectue par déduction sur les loyers suivant protocole d’accord du 4 avril 2000;
Qu’en définitive, en vertu de ce qui précède, elle estime que la créance dont se prévaut la SCI ABIALI n’est pas entourée de circonstances menaçant son recouvrement;
Qu’en outre, elle plaide l’absence de circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance dont se prévaut la SCI ABIALI;
Qu’elle précise que pour la réalisation des travaux de ses anciens bureaux, elle avait fait une avance de 200 000 000 FCFA;
Que, toutefois, lesdits aménagements n’ont même pas été satisfaisants en raison des désagréments qu’elle a sans cesse subis;
Que, dès lors, elle ne voit pas en quoi il y a péril du recouvrement de la prétendue créance de la défenderesse;
Que c’est pourquoi, sur le fondement de l’article 62 de l’AUPSRVE, elle a fait assigner la SCI ABIALI aux fins de :
Dire et juger que la créance de la SCI ABIALI n’est ni certaine, ni exigible, ni liquide et même pas fondée en son principe;
Constater, en outre que le juge du fond est saisi au principal;
En conséquence, ordonner la mainlevée sollicitée.
COMPARAIT EGALEMENT
La SCI ABIALI ayant son siège social à Libreville, représentée par son conseil , Maître POATY TINDY du cabinet d’avocats PELLEGRIN, Avocats associés au barreau du Gabon,
Demanderesse,
Laquelle, en réponse, rappelle qu’elle est liée à Mobil Oil par un contrat de bail commercial;
Qu’au jour d’aujourd’hui, Mobil Oil n’a pas payé le loyer, que pour elle, le contrat se poursuit, même si elle n’occupe plus les locaux;
Que, dès lors, sa créance est fondée dans son principe;
Que, dans ce contexte, Mobil Oil a même initié une procédure de résiliation judiciaire du bail;
Qu’elle précise que le quantum de sa créance est certain, il est de 87 803 682 FCFA y compris les pénalités de retard contenues dans le protocole d’accord et les autres frais inhérents à ce différend;
Qu’elle indique, par ailleurs, qu’elle avait adressé sa facture de paiement à Mobil Oil qui a résisté de payer;
Que par ailleurs, elle prétend que le fait pour Mobil Oil de ne pas réagir postérieurement (est) constitutif d’un péril;
SUR QUOI :
Les débats étant clos, Nous avons mis l’affaire en délibéré pour notre ordonnance être rendue le 11 mars 2003; Advenue cette date, Nous avons rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
Attendu que, suivant une combinaison des articles 54 et 55 de l’AUPSRVE, toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut, par requête, solliciter l’autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur tous les biens mobiliers corporels ou incorporels de son débiteur sans commandement préalable si elle justifie de circonstances de nature à en menacer le recouvrement;
Qu’en outre, une autorisation préalable n’est pas nécessaire en cas d’un loyer impayé après commandement dès lors que celui-ci est dû en vertu d’un contrat de bail d’immeuble écrit;
Attendu que la combinaison des textes précités révèle, outre la nécessité d’établir l’existence d’une créance paraissant fondée en son principe, mais également celle d’établir les circonstances de nature à menacer le recouvrement de la créance dont on se prévaut;
Attendu qu’en l’état actuel des choses la créance dont se prévaut la SCI ABIALI ne peut être considérée comme paraissant fondée en son principe;
Qu’en effet, suite au fait générateur du litige opposant actuellement les deux parties, chacune a saisi la juridiction du fond, prétendant être créancière de l’autre à l’issue des difficultés survenues dans l’exécution de leur relation contractuelle;
Que, dans ce contexte, en l’état actuel de leur différend et sous réserve d’une décision y relative du juge du fond la créance dont s’est prévalue la SCI ABIALI pour recourir à la saisie conservatoire querellée ne nous paraît pas fondée en son principe eu égard aux prétentions réciproques développées lors des débats;
Qu’en définitive, eu égard aux motifs qui précèdent et dans qu’il soit utile d’examiner le second moyen, il y a lieu de constater que la créance de la SCI ABIALI ne paraît pas fondée en son principe et d’ordonner, par conséquent, la mainlevée de la saisie pratiquée;
PAR CES MOTIFS :
Le juge des urgences,
Statuant par ordonnance contradictoire en matière commerciale et en premier ressort :
AU PRINCIPAL :
Renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront;
Mais dès à présent, vu l’urgence :
Constatons que la créance dont s’est prévalue la SCI ABIALI ne paraît pas fondée;
En conséquence, ordonnons la mainlevée de la saisie conservatoire de créances grevant les avoirs bancaires de la société Mobil Oil;
Disons sans objet l’examen du surplus des moyens;
Ordonnons l’exécution, sur minute, de notre ordonnance et ce, avant enregistrement;
Condamnons la défenderesse aux dépens.