J-04-142
VOIES D’EXECUTION – SAISIE REVENDICATION – ACTE DE SAISIE – MENTIONS – DESIGNATION DE LA JURIDICTION COMPETENTE – DEFAUT DE PRECISION – MAINLEVEE (Oui).
L’acte de saisie-revendication doit mentionner à peine de nullité la juridiction devant laquelle seront portées les contestations relatives à l’exécution de la saisie. L’AUPSRVE s’est abstenu de préciser ladite juridiction en raison de l’organisation judiciaire propre à chaque Etat-Partie, dès lors, cette juridiction doit être clairement et précisément désignée. Encourt donc la nullité, car ne répondant pas aux exigences légales, l’acte de saisie-revendication qui désigne le Tribunal de première instance » comme juridiction devant laquelle sera portée la contestation, désignation apparaissant plutôt comme institution judiciaire et non-conforme à l’esprit du législateur. Par suite, la mainlevée de la saisie pratiquée en vertu de cet acte doit être ordonnée.
(Tribunal de Première Instance de Libreville – Ordonnance de référé, Répertoire n° 294/ 2002-2003 du 20 mars 2003, Société FORET NEGOCE INDUSTRIE TRANSPORT c/ Société NORDISK).
REPUBLIQUE GABONAISE
UNION - TRAVAIL - JUSTICE
COUR D'APPEL JUDICIAIRE DE LIBREVILLE
TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE LIBREVILLE
REPERrOIRE N° 294 /2002-2003
ORDONNANCE DE REFERE DU 20 MARS 2003
AFFAIRE : STE FORET NEGOCE INDUSTRIE TRANSPORT (Mes NTOUTOUME & MEZHER)
CONTRE : STE NORDISK (Me OBAME ONDO)
L'AN DEUX MILLE TROIS ET LE TREIZE DU MOIS DE MARS;
Par devant Nous, Jacques LEBAMA, Président du Tribunal de Première Instance de Libreville, JUge des .Urgences, tenant audience en la salle des audiences civiles et commerciales dudit Tribunal; ,
Assistée de Maître Michelle Sandra BETOE, GREFFIER CIVIL; COMPARAIT :
La société FORET NEGOCE INDUSTRIE TRANSPORT (FONIT) SARL, ayant son siège social à LIbreville, représentée par son Conseil Maître NTOUTOUME du cabinet d'Avocats NTOUTOUME ET MEZHER, Avocats associés au barreau du Gabon,
DEMANDERESSE;
Qui expose qu'elle est en relation d'affaires avec la société NORDISK, spécialisée dans le négoce en bois divers;
Qu'elle a acquis auprès de la société NORDISK du matériel d'exploitation et des véhicules pour un montant global de 283.200.000 F CFA..
Qu'en remboursement de sa dette, elle a signé au profit de la société NORDISK des contrats de nantissements;
Qu'à ce jour, elle a réglé l'intégralité des sommes dues au titre des acquisitions suscitées;
Que cependant, elle est présentement l'objet d'une procédure en saisie revendication pratiqué~ par la société NORDISK, au motif qu'elle lui serait redevable de la somme de 203.083.049 F CFA;
Qu'elle élève les contestations ci-après relativement à ladite saisie :
La nullité de l'acte de saisie du 18 FEVRIER 2003;
Qu'elle invoque l'article 231 de l'AUPSRVE "L'Agent d'exécution dresse un acte de saisie qui contient à peine de nullité …7) La désignation de la juridiction devant laquelle seront portées les contestations relatives à l'exécution de la saisie;
Qu’elle prétend que cette indication est d’importance car elle permet au défendeur qui peut être un profane d’orienter sûrement son recours devant la Juridiction habilitée à le recevoir;
Que, or il ressort de l’acte d’huissier du 18 FEVRIER 2003 "que toutes les contestations notamment celles relatives à l’exécution de la saisie seront portées devant le Tribunal de Première Instance de Libreville";
Que non seulement, cette mention est évasive, mais surtout, elle est inexacte;
Qu’en effet, "la Juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le Président de la Juridiction
statuant en matière d’urgence ou le Magistrat délégué par lui" et ce en application de l’article 49 de l’AUPSRVE;
Qu’ainsi, la compétence est donc dévolue précisément au Juge des référés et non au Tribunal de première Instance ainsi que spécifié dans l’acte de saisie revendication de la société NOROISK;
Qu’il en résulte que l’acte de saisie dont s’agit a violé de manière flagrante les dispositions de l’article 231-7° de l'AUPSRVE;
Que, b i en plus, elle fait référence à 1’article 231 – 10°, 11 acte de saisie doit contenir la reproduction des textes pénaux relatifs au détournement d’objets saisis. . . . .";
Qu’elle indique qu’il s’agit, ici, de l’article 310 alinéas 1 et 2 du Code Pénal et non de l’article
190 évoqué par la société NORDISK Et qui ne concerne d4ailleurs en rien les procédures de
saisies, mais plutôt les évasions et tentatives d’évasion;
En vertu des articles 227 et 62 de l’AUPSRVE, la présente Juridiction constatera que la créance alléguée par NORDISK n’est ni certaine, liquide, ni exigible, mais plutôt totalement indue; Que les pièces qu’elle produit dans ladite instance montrent qu'elle a réglé les sommes dues au titre du paiement de son équipement forestier et des véhicules acquis auprès de NOROISK, soit 283.200.000 F CFA;
Qu’elle précise, en outre, que les sommes supplémentaires réclamées par la NORDISK sont relatives à un compte courant, mis en place entre elles et dont l’apurement s’effectue par prélèvement sur les recettes des bois livrés par elle à NOROISK;
Que, reconventionnellement, elle sollicite une expertise, afin de déterminer le manque à gagner dont elle est l’objet à l’occasion des relations d'affaires nées entre elles, eu égard aux différences entre les volumes portées sur les notes de crédit et ceux figurant sur les factures à l’attention des clients de NOROISK; Que c’est pourquoi, elle a fait assigner la société NORDISK aux fins de :
– Prononcer la nullité de la saisie revendication du 18 FEVRIER 2003;
– Dire et juger en outre sans fondement la créance dont se prévaut la société NOROISK;
– Ordonner en conséquence la mainlevée de la saisie revendication
pratiquée sur le matériel et l'équipement de la société FONIT;
A titre reconventionnel :
– Constater qu'il ressort des différences fort curieuses entre les volumes portés sur les notes de crédit et ceux figurant sur les factures dressées à l’attention des clients NORDISK;
– Constater que ces différences sont sources d'un important manque à gagner;
– Ordonner aux frais de la société NORDISK une expertise comptable à l'effet de déterminer le manque à gagner occasionné à la société FONIT;
– Condamner la société NORDISK aux dépens;
COMPARAIT EGALEMENT :
La société NORDISK ayant son siège social à Libreville, BP 18003 représentée par son Conseil Maître EYUE Gisèle, du Cabinet d'Avocats OBA)i1E ONDO, Avocat au barreau du Gabon,
DEFENDERESSE;
Laquelle en réponse plaide l'incompétence du Juge des référés;
Qu'elle prétend que la problématique soulevée dans le premier moyen sur la Juridiction compétente est de nature à ôter l'évidence qui caractérise le Juge des référés;
Que toutefois, elle soutient que le Juge des référés fait partie du Tribunal de Libreville;
Que, par ailleurs, elle prétend que le numéro de l'article visé par l'Huissier dans son acte procède d'une simple erreur, que d'ailleurs le contenu est exact;
Que quoi qu'il en soit l'objectif recherché dans ledit texte demeure;
,
Que dès lors, Il n'y a pas d'erreur substantielle;
Que, par ailleurs, s'agissant de sa créance, elle soutient que celle-ci est fondée et qu'elle dis
Pose des éléments pour établir son bien fondé;; ~
Qu'enfin, elle s'oppose à la mesure expertale sollicitée en raison de l'absence de preuve des
prétentions développées;
SUR QUOI :
Les débats étant clos, Nous avons mis l'affaire en délibéré au 18 MARS 2003;
Advenue cette date, l'avons prorogé au 20 MARS 2003, puis Nous avons rendu l'ordonnance dont la teneur suit :
l - SUR LA MAINLEVEE DE LA SAISIE REVENDICATION :
a) - SUR LE MOYEN FONDE SUR LA NULLITE DE L'ACTE DE SAISIE :
Attendu que selon l'article 231-7° de l'AUPSRVE, en cas de saisie revendication, l'huissier ou l'Agent d'exécution dresse un acte de saisie qui contient à peine de nullité : la désignation de la Juridiction devant laquelle seront portées les contestations relatives à l'exécution de la saisie;
Attendu qu'en la cause, le procès-verbal de saisie indique que le.,-.- Juridiction devant laquelle doit-être portée les contestations est le Tribunal de Libreville;
Attendu qu'il convient tout d'abord de relever que l'acte UNiforme s’est abstenu de préciser ladite Juridiction en raison de l'organisation judiciaire propre à chaque Etat-partie;
Attendu que dès lors, ladite juridiction doit être clairement et précisément désignée;
Qu'en la cause, la désignation du "Tribunal de Première Instance de Libreville" comme juridiction devant laquelle sera portée la contestation apparaît plutôt comme une désignation.en tant qu'institution judicIaire et n'est pas conforme à l'esprIt du légIslateur;
Attendu que cependant, selon l'article 49 de l'Acte Uniforme précité la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le Président de la Juridiction statuant en matière d'urgence ou le magistrat délégué par lui;
Qu'en droit interne et précisément en la cause, cette juridiction est le Juge des référés;
Attendu q’en conséquence, en raison des motifs qui précèdent, il y a lieu de dire et juger que la saisie revendication querellée est entachée de nullité, et d'ordonner par conséquent sa
mainlevée; ,
II - SUR LES AUTRES MOYENS :
Attendu qu'en raison des motifs développés précédemment, il devient sans objet d'examiner le surplus;
III - SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE :
Attendu que FORET NEGOCE INDUSTRIE TRANSPORT n'établit pas avec évidence le bien-fondé des moyens sous-tendant sa sollicitation;
Que dès lors, il y a lieu de la débouter simplement;
PAR CES MOTIFS :
LE JUGE DES URGENCES;
Statuant par ordonnance contradictoire en matière commerciale et en premier ressort;
AU PRINCIPAL :
Renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront;
MAIS DES A PRESENT : VU L'URGENCE :
– Disons et jugeons que l'acte de saisie revendication pratiqué par la socIété NORDISK est entaché de nullIté;
– En conséquence, ordonnons sa Mainlevée;
– Déboutons la demanderesse du surplus de sa demande;
– Ordonnons l'exécution sur minute de notre ordonnance et avant enregistrement;
– Condamnons la défenderesse aux dépens;
ET AVONS SIGNE AVEC LE GREFFIER./-