J-04-156
VOIES D'EXECUTION – SAISIE-VENTE – ACTION EN ANNULATION D'ACTES D'EXECUTION D'UN JUGEMENT DE DEFAUT – OPPOSITION – ACTE D'HUISSIER – ARTICLE 516 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – MENTIONS OBLIGATOIRES – OMISSION – NULLITE DE LA SIGNIFICATION COMMANDEMENT ET DU PROCES-VERBAL DE SAISIE-VENTE (Oui).
La nullité d'un acte d'exécution est amplement encourue en cas de violation d'une formalité substantielle de surcroît ainsi sanctionnée, lorsque le préjudice est établi et prouvé.
Article 516 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Ordonnance de référé n° 72 du 9 octobre 2003, DIANDE Hama c/ DJITANGA Mossidoa).
Attendu que par ordonnance n° 001-2003 du 02 juillet 2003, le juge des référés du Tribunal de grande instance de Fada-N'Gourma, déboute DIANDE Hama de sa demande comme étant mal fondée; que par acte du 16 juillet 2003, le succombant relève appel de la décision rendue; que la cause après renvoi à la demande des parties est régulièrement retenue à l'audience du 11 septembre 2003 puis mise en délibéré au 09 octobre 2003 où elle est vidée;
Attendu que l'appelant fait grief à l'ordonnance querellée d'avoir méconnu les dispositions de l'article 516 du code de procédure civile en se refusant de prononcer la nullité d'actes d'exécution, une signification commandement datée du 09 novembre 2001 et subséquemment un procès-verbal de saisie-vente du 30 novembre 2001, alors que le texte de loi visé prescrit qu'à peine de nullité de l'acte d'exécution, l'huissier de justice qui accomplit un acte comportant exécution d'un jugement ou d'un arrêt de défaut, est tenu d'avertir le défaillant qu'il a la possibilité de faire opposition dans les forme et délai de la loi et que passé ce délai, l'exécution sera continuée sans qu'il soit besoin de la faire ordonner; que c'est parce que l'absence de cette mention porte atteinte aux droits de la défense que le législateur sanctionne de nullité l'acte d'exécution d'un jugement de défaut ne la contenant pas; que par ailleurs c'est malicieusement que l'huissier de justice, exploitant l'ignorance et l'analphabétisme de DIANDE Hama, lui a remis en une seule fois et dans la même journée, le 30 novembre 2001, la signification-commandement datée du 9 novembre 2001, et le procès-verbal de saisie-vente daté du 30 novembre 2001; qu'au jugement d'opposition du 17 avril 2001 et à l'arrêt confirmatif d'opposition du 23 mai 2003, il a vainement soutenu avoir reçu le même jour les deux actes d'exécution cités pour asseoir la recevabilité de son acte d'opposition du 10 décembre 2001; qu'en tout état de cause, le rejet de son opposition en premier et deuxième ressort ne rend pas sans objet la critique dirigée contre les actes d'exécution diligentés sur le fondement du jugement de défaut;
Attendu que l'intimé conclut à la confirmation de l'ordonnance déférée en ce que le jugement de défaut étant non avenu en toutes ses dispositions par suite de l'opposition formée contre lui, les actes d'exécution fondés sur ledit jugement sont également non avenus, de sorte que la nullité invoquée contre lesdits actes est devenue sans objet (art 489 C.P.P.; 514 al. 2 C.P.C.);
MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que l'appel relevé le 16 juillet 2003 contre une ordonnance de référé contradictoirement rendue le 02 juillet 2003 remplit les conditions de forme et de délai de la loi et mérite en conséquence d'être déclaré recevable;
Attendu que le premier juge s'appuie sur les dispositions des articles 92 et 100 de l'acte uniforme OHADA relatifs aux procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution et sur l'exercice effectif de la voie de recours de l'opposition par DIANDE Hama pour estimer que l'allégation tenant au non-respect de la mention de l'article 516 du code de procédure civile ne saurait prospérer et débouter en conséquence DIANDE Hama de son action en annulation d'actes d'exécution, notamment le commandement du 09 novembre 2001 et le procès-verbal de saisie-vente du 30 novembre 2001;
Attendu que muni du jugement de défaut revêtu de la formule exécutoire, DJITANGA Mossidoa a fait servir un commandement de payer et pratiquer une saisie-vente conformément aux dispositions de l'acte uniforme OHADA précité; qu'en son article 49 ledit acte donne compétence au juge des référés pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d'exécution forcée ou à une saisie conservatoire, qu'ainsi le juge des référés, véritable juge de l'exécution au sens du droit OHADA, est compétent pour apprécier la demande en nullité des actes pris en procédure d'exécution; qu'il s'agit de mesurer, la portée abrogatoire dans les Etats parties, dont le Burkina Faso, des dispositions antérieures relatives aux matières que concerne l'acte uniforme cité ainsi que la règle de supranationalité au Traité OHADA prévoyant l'application directe et obligatoire des actes uniformes (art 336 AUPSVE; 10 Traité);
Attendu qu'aux termes de l'avis n° 001/2001/EP du 30 avril 2001 de la Cour commune de justice et d'arbitrage de l'OHADA les lois contraires ou les dispositions contraires sont des terminologies équivalentes qui s'entendent de tout texte législatif ou réglementaire contredisant dans la forme, le fond et/ou l'esprit des dispositions d'un acte uniforme, la disposition pouvant désigner un article d'un texte, un alinéa de cet article ou une phrase de cet article; que nonobstant cette acception et malgré la jurisprudence de l'arrêt CCJA n° 002/2001 du 11 octobre 2001, Epoux Karnib C/ SGBCI, écartant l'application des dispositions de droit interne relative à l'arrêt de l'exécution provisoire de décisions par les présidents de Cour d'appel, des dispositions particulières de droit interne sur des procédures civiles d'exécution continuent de recevoir application (art 401 à 409 C.P.C. du Burkina Faso; 180 et 181 C.P.C. de la Côte-d'Ivoire; art 4 et 5 loi du 14 août 1992 in C.P.C.C. du Cameroun);
Attendu que la mention exigée à peine de nullité de l'acte d'exécution à l'article 516 du code de procédure civile concerne l'exécution d'un jugement de défaut et est destinée à informer le défaillant des délai et forme de la voie de recours à lui ouverte; qu'il est couramment admis en législation et en jurisprudence qu'une mention de cette teneur constitue une formalité substantielle dont l'omission entache la raison d'être de l'acte et l'empêche de remplir son objet d'où la sanction de nullité admise avec ou sans texte (art 100, 139 et 140 C.P.C.; 101 AUDCG; 254 AUPSVE; 25 D. français du 30 septembre 1953 sur les baux commerciaux; art 4 AUS); que c'est faute d'avoir indiqué au défaillant à l'acte du 9 novembre 2001, le délai d'opposition à lui ouvert, que ce recours a été tardivement exercé le 10 décembre 2001 ce qui a manifestement nuit à la défense de ses intérêts; que la nullité est amplement encourue en cas de violation d'une formalité substantielle de surcroît ainsi sanctionnée, lorsque le préjudice est établi et prouvé (art 99, 100, 139 et 140 C.P.C.); Attendu que même encourue, la nullité ne peut être prononcée lorsqu'elle est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun préjudice (art 140 al 2 C.P.C.); que ni le jugement rendu sur opposition, ni l'arrêt subséquent ne se substituent au jugement de défaut dont l'exécution était poursuivie, celui-ci étant par ailleurs anéantit du fait de l'opposition (art 489 C.P.P.; 514 al 2 et 522 C.P.C.); que l'anéantissement du jugement de défaut laisse subsister le préjudice causé par l'omission de porter la mention de l'article 516 du code de procédure civile et aucun acte de régularisation de la nullité ouverte n'est ni prétendu, ni versé au dossier; que le prononcé de la nullité n'est pas sans objet en ce que le créancier poursuivant peut s'appuyer sur les actes d'exécution critiqués pour la suite de sa procédure d'exécution;
PAR CES MOTIFS
EN LA FORME
Statuant contradictoirement en matière de référé et en dernier ressort;
Déclare recevable l'appel de MANDE Hama;
AU FOND
Infirme l'ordonnance querellée;
Prononce la nullité de la signification commandement du 9 novembre 2001 et du procès-verbal de saisie-vente du 30 novembre 2001;
Condamne DJITANGA Mossidoa aux dépens.