J-04-157
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – OPPOSITION – QUANTUM DE LA CREANCE – ABSENCE DE PREUVE DE SA MODIFICATION – DEMANDE DE TERMES ET DELAIS – ARTICLE 400 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – BIENS DU DEBITEUR SAISIS POUR D'AUTRES CREANCES – DELAI DE GRACE (NON).
Le débiteur qui, tout en sollicitant des termes et délais, invoque pour se justifier, le fait que ses comptes font l'objet d'une saisie-arrêt, ne saurait bénéficier de délai de grâce sans être en contradiction flagrante avec les dispositions de l'article 400 du code de procédure civile qui stipule que : " le délai de grâce ne peut être accordé au débiteur dont les biens sont saisis pour d'autres créances... "
Article 400 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 08 du 7 février 2003, Société Générale d'Entreprise, Bâtiment, Génie - Civil (SOGEPER) c/ Société Commerciale d'Importation Azar et Salamé (SCIMAS)).
LA COUR,
Vu le jugement n° 1093 du 29 novembre 2000
Vu l'acte d'appel en date du 4 décembre 2000
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Faits - procédure - prétentions et moyens des parties
Le 21 décembre 1999, la SCIMAS a fait signifier à la SOGEPER une injonction d'avoir à payer la somme de treize millions trois cent quarante huit mille dix sept (13.348.017) Francs CFA en principal, outre les frais et intérêts de droits;
Contre cette ordonnance, la SOGEPER a formé opposition le 4 janvier 2000 et a assigné la SCIMAS par-devant le Tribunal de grande instance de Ouagadougou en son audience du 26 janvier 2000 en exposant que bien que ne contestant pas la créance dans son principe, elle serait excessive quant à son montant et que certains travaux d'un montant de un million neuf cent quinze mille quarante cinq (1.915.045) Francs CFA n'ont pu être exécutés;
Elle sollicite en outre le bénéfice des termes et délais afin d'apurer ses dettes, son activité économique étant en difficulté et qu'elle fait l'objet d'une saisie conservatoire pratiquée pour avoir paiement de la somme de cinquante millions (50.000.000) Francs CFA;
A l'audience publique ordinaire du 29 novembre 2000, le Tribunal a rendu la décision suivante :
– Reçoit l'opposition de la SOGEPER en la forme;
– Au fond, condamne la SOGEPER à payer à la SCIMAS la somme de treize millions trois cent quarante huit mille dix sept (13.348.017) Francs CFA en principal, outre celle de deux millions (2.000.000) Francs CFA à titre de dommages et intérêts;
– Dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire;
– Déboute les parties du surplus de leurs demandes;
Appel de cette décision a été relevé le 4 décembre 2000 par la SOGEPER pour voir ramener le montant de la créance à onze millions deux cent quatre vingt trois mille quatre vingt neuf (11.283.089) Francs CFA et lui octroyer des termes et délais de paiement de douze (12) mois;
La SCIMAS conclut pour sa part à la confirmation pure et simple du jugement attaqué et souligne qu'accorder des termes et délais à SOGEPER serait se mettre en contradiction flagrante avec l'esprit de la loi contenu dans les dispositions de l'article 400 du code de procédure civile;
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience du 5 janvier 2001 et renvoyée à la mise en état; qu'à l'intervention de l'ordonnance de clôture en date du 22 octobre 2002, elle était réenrôlée pour l'audience du 15 novembre 2002, date à laquelle elle fut retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 07 février 2003;
Qu'advenue cette date, la Cour vidant son délibéré a statué en ces termes;
EN LA FORME
Attendu qu'aux termes de la loi, l'appel est recevable pour les jugements contradictoires dans un délai de deux (2) mois et la déclaration d'appel déposée au greffe de la Cour dans les deux (2) mois qui précèdent sa notification sous peine de caducité;
Qu'en l'espèce, l'appel étant intervenu le 4 décembre 2000 contre une décision, rendue le 29 novembre 2000 et enrôlé pour le 05 janvier 2001, est recevable pour avoir respecté les formes et délais prescrits;
AU FOND
Attendu qu'il résulte des débats et des pièces du dossier qu'un contrat de fourniture et de pose de menuiseries alu vitrées a été conclu entre la SOGEPER et la SCIMAS le 07 janvier 1998;
Qu'aux termes de ce contrat, la SOGEPER s'était engagée à payer à la SCIMAS la somme totale de dix-neuf millions cent quatre vingt dix huit mille cent trente quatre (19.198.134) Francs CFA représentant le prix des fournitures et des prestations de la SCIMAS;
Qu'une somme de six millions (6.000.000) Francs CFA a été versée par la SOGEPER le 23 juillet 1998, d'où un reliquat de treize millions cent quatre vingt dix huit mille cent trente quatre (13.198.134) francs CFA;
Que cependant, la SOGEPER qui ne conteste pas la créance dans son principe, allègue que des modifications intervenues au cours de l'exécution du marché ont entraîné une diminution du prix d'un montant de un million neuf cent quinze mille quarante cinq (1.915.045) Francs CFA et qu'en conséquence, il reste redevable de la somme de onze millions deux cent quatre vingt trois mille quatre vingt neuf (11.283.089) Francs CFA vis à vis de la SCIMAS;
Que malheureusement, aucune preuve matérielle ne vient étayer ces affirmations car une modification de cette importance devrait être constatée par un avenant en bonne et due forme;
Qu'étant dans l'impossibilité d'apporter la preuve de cette modification ayant entraînée la diminution du prix, la SOGEPER sera tenue au paiement de la somme de treize millions cent quatre vingt dix huit mille cent trente quatre (13.198.134) Francs CFA;
Attendu qu'aux termes de l'article 1147 du code civil, le débiteur d'une obligation peut être condamné au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de son obligation ou à raison du retard mis dans l'exécution; il ne peut s'en exonérer qu'en rapportant la preuve d'une cause étrangère ayant entravé le bon déroulement de l'exécution de l'obligation;
Qu'en l'espèce, la SOGEPER n'est pas à mesure de rapporter la preuve d'un cas fortuit ou d'une force majeure ayant été à la base de l'inexécution de l'obligation, qu'elle doit être donc condamnée au paiement de dommages et intérêts;
Attendu qu'au regard de l'ancienneté de la créance, de l'importance des sommes immobilisées du fait de la SOGEPER, la Cour estime avoir suffisamment d'éléments d'appréciation pour évaluer le préjudice subi par la SCIMAS à la somme de un million cinq cent mille (1.500.000) Francs CFA;
Qu'il convient en conséquence de réformer le jugement attaqué quant au quantum des dommages et intérêts et le confirmer en ce qu'il a condamné la SOGEPER à payer à la SCIMAS la somme de treize millions trois cent quarante huit mille dix sept (13.348.017) Francs CFA en principal;
Attendu qu'aux termes de l'article 400 du code de procédure civile, " le délai de grâce ne peut être accordé au débiteur dont les biens sont saisis pour d'autres créances ";
Qu'en l'espèce, la SOGEPER tout en sollicitant des termes et délais, invoque pour se justifier, le fait que ses comptes font l'objet d'une saisie–arrêt;
Qu'il s'en suit que des termes et délais ne lui sauraient être accordés sans être en contradiction flagrante avec les dispositions de la loi ci-dessus citée;
Que dès lors, il y a lieu de rejeter sa demande de grâce;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de la SOGEPER recevable pour avoir été interjeté dans les formes et délais prévus par la loi;
AU FOND
Confirme le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la SOGEPER à payer à la SCIMAS la somme de treize millions trois cent quarante huit mille dix sept (13.348.017) Francs CFA en principal;
Le reforme quant au quantum des dommages et intérêts;
Condamne la SOGEPER à payer à la SCIMAS la somme de un million cinq cent mille (1.500.000) francs CFA à titre de dommages et intérêts;
Le confirme en ses autres dispositions;
Condamne la SOGEPER aux dépens.