J-04-167
IMPENSES IMMOBILIERES – SAISIE CONSERVATOIRE – ADMISSION (NON).
L’acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution n’ayant pas prévu de saisie conservatoire d’impenses immobilières, il y a lieu de juger qu’en cette matière une saisie de cette nature ne peut être validée et que la mainlevée doit être ordonnée.
Article 54 AUPSRVE ET SUIVANTS
(TRIBUNAL REGIONAL HORS CLASSE DE DAKAR, JUGEMENT N° 179 DU 23 JANVIER 2001, B.H.S. c/ Cheikh NDIAYE).
LE TRIBUNAL
VU les pièces du dossier;
OUI l’Avocat de la demanderesse en ses conclusions;
NUL pour le demandeur défaillant;
LE Ministère public entendu et après en avoir délibéré conformément à la loi :
ATTENDU que par exploit en date du 5 septembre 2000, servi par Me Aloyse NDONG Huissier de justice à Dakar, la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS) a assigné le sieur Cheikh NDIAYE devant le tribunal de Céans en paiement de la somme de 4 703 884 FCFA outre les frais et intérêt de droit et en validation de saisie conservatoire, l’exécution provisoire étant en outre sollicitée;
Que par écritures en date du 2 octobre 2000, la BHS a sollicité additionnellement la condamnation de Cheikh NDIAYE à lui payer la somme de 2 500 000 FRS à titre de dommages intérêts pour résistance abusive;
EN LA FORME
ATTENDU que l’action est recevable pour avoir été introduite dans les formes et délais légaux; que la demande reconventionnelle étant ainsi régulière, il y a lieu de le valider;
AU FOND
SUR LE PAIEMENT
ATTENDU que la BHS a soutenu avoir accordé à Cheikh NDIAYE un prêt pour l’acquisition d’une villa n° 107 sise à la Cité SAFCO THIAROYE AZUR prêt remboursable en 106 mensualités de 85 392 FRS à compter de février 1995; Que devant les arriérés accumulés dans le remboursement du prêt par Cheikh NDIAYE, elle a prononcé la déchéance du terme conformément aux dispositions de l’article 10 de la convention les liant; qu’elle sollicite en conséquence du Tribunal condamner le défendeur à lui payer la somme de 4 703 884 FRS représentant le solde débiteur de son compte outre les intérêts de droit à compter du 2 mars 1999 date de la mise en demeure restée sans effet;
ATTENDU que Cheikh NDIAYE n’a pas soutenu sa défense;
ATTENDU que les affirmations de la BHS sont confortées par pièces par elle versées aux débats notamment les relevés du compte du défendeur qui laissent apparaître un solde débiteur de 4 703 884 FRS, le contrat de prêt n° 94080035 enregistré le 17 juillet 1995 qui a prévu en son article 10, qu’en cas de non paiement d’une échéance, la demanderesse peut prononcer la déchéance du terme et exiger le paiement immédiat de toutes les sommes dues; qu’il échet en conséquence de condamner Cheikh NDIAYE à lui payer la somme de 4 703 884 FRS outre le les intérêts de droit à compter du présent jugement;
SUR LA SAISIE
ATTENDU que la BHS a soutenu que suivant ordonnance n° 1003/00 en date du 22 août 2000, elle a été autorisée à pratiquer une saisie conservatoire sur les impenses immobilières objet de la villa n° 107 sis à la Cité SAFCO Thiaroye AZUR; que cette saisie ayant été pratiquée le 5 septembre 2000, elle sollicite en validation et sa transformation en saisie exécution avec toutes les conséquences de droit;
MAIS ATTENDU que la saisie conservatoire en l’espèce a été pratiquée après l’entrée en vigueur des Actes Uniformes de l’OHADA; que ces actes qui ont abrogé les dispositions du Code de procédure civile relatives aux saisies conservatoires (Art. 336) n’ont pas prévu de saisie conservatoire d’impenses immobilières mais plutôt une saisie exécution sur ce genre de biens en son titre VIII relatif à la saisie immobilière;
Que ce titre qui est d’ordre public a prévu en son article 247 que « la vente forcée d’un meuble ne peut être poursuivie qu’en vertu d’un titre exécutoire contenant une créance liquide et exigible; ce qui n’est pas encore le cas en l’espèce;
ATTENDU que compte tenu de tout ce qui précède, il échet de dire n’y avoir lieu à valider une sasie pratiquée sans aucun fondement légal et d’ordonner en conséquence sa main levée, déboutant ainsi la BHS de cette demande;
SUR LES DOMMAGES INTERETS
ATTENDU que la BHS a sollicité la condamnation de Cheikh NDIAYE à lui payer la somme de 2 500 000 FRS à titre de dommages intérêts pour résistance abusive;
MAIS ATTENDU que la résistance abusive reprochée au défenseur n’est nullement prouvée ni caractérisée; qu’il échet dès lors de débouter également la BHS de cette demande comme mal fondée;
SUR L’EXECUTION PROVISOIRE
ATTENDU qu’il y a suffisamment urgence caractérisée par l’attitude passive du débiteur; qu’il échet d’ordonner l’exécution provisoire du présent jugement à hauteur de 500 000 FRS;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par défaut contre Cheikh NDIAYE en matière civile et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclare l’action recevable
AU FOND
Condamne Cheikh NDIAYE à payer à la BHS la somme de 4 703 884 outre les intérêts de droit à compter du présent jugement;
Déboute la BHS du surplus de ses demandes;
Ordonne la main levée de la saisie pratiquée le 5 septembre 2000;
Condamne Cheikh NDIAYE aux dépens;
Ainsi fait jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus;
Et ont signé le Président et le GREFFIER. /.
OBSERVATIONS
Par Ndiaw DIOUF, agrégé des Facultés de droit, Directeur du CREDILA
Par le jugement ci-dessus reproduit, le Tribunal Régional Hors Classe de Dakar a mis un coup d’arrêt à une pratique qui était suivie sous l’empire du Code de Procédure civile. L’article 407 bis avait prévu la possibilité pour les créanciers de pratiquer une saisie conservatoire sur les impenses immobilières réalisées par leur débiteur sur les terrains dont ils n’étaient pas propriétaires, mais qui leur ont été affectés par décision administrative. C’est sur le fondement de ce texte que la BHS demandait la validation de la saisie conservatoire qu’elle avait pratiquée sur autorisation du Président du Tribunal. Le Tribunal Régional a fort justement rappelé que l’article 336 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution a abrogé les dispositions du Code de Procédure civile relatives aux saisies conservatoires et que les dispositions de dudit Acte Uniforme désormais applicables n’autorisent pas de saisie conservatoire sur de tels biens, mais seulement une saisie exécutoire précisément une saisie immobilière (art.247, al. 1er ); il en a déduit qu’il n’y a pas lieu à valider la saisie conservatoire pratiquée et que la mainlevée doit être ordonnée.