J-04-194
VOIES D'EXECUTION – SAISIE-REVENDICATION DES BIENS MEUBLES CORPORELS – REQUETE AFIN DE SAISIE-REVENDICATION ET EN VALIDITE – IRRECEVABLE POUR DEFAUT DE QUALITE – APPEL – PREUVES DE LA QUALITE DE L'APPELANTE – SAISIE ENTRE LES MAINS D'UN TIERS – ARTICLE 232 ALINEA 2 AUPRSVE – RESPECT DU DELAI DE SIGNIFICATION (OUI) – PRODUCTION ET VÉRIFICATION DES CRÉANCES – ARTICLE 78 AUPCAP – DELAI – FORCLUSION (NON) – REVENDICATIONS – ARTICLE 103 AUPCAP – OBJETS MOBILIERS REMIS AU DEBITEUR – REGULARITE DE LA SAISIE-REVENDICATION (OUI) – INFIRMATION DU JUGEMENT ATTAQUE.
Les biens revendiqués ne se trouvant plus entre les mains de la liquidation, la saisie-revendication opérée entre les mains d'un tiers détentrice du matériel et dénoncée le même jour à la liquidation conformément aux dispositions de l'article 232 alinéa 2 AUPRSVE, doit être déclarée régulière et fondée.
Article 232 AUPRSVE
Article 78 AUPCAP
Article 103 AUPCAP
(COUR D’APPEL DE BOBO-DIOULASSO, Chambre civile et commerciale (BURKINA FASO), Arrêt, n° 48 du 17 mars 2003, DAGRIS (ex CFDT) c/ Syndic liquidateur de l’EGCC).
FAITS, PROCEDURES, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d’huissier en date du 04 octobre 2002, la Société DAGRIS a assigné le syndic liquidateur de l’Entreprise Générale de Construction et de Commerce en abrégé EGCC à comparaître devant le tribunal de grande instance de Bobo-Dioulasso siégeant en matière civile et commerciale pour voir :
– constater sa propriété sur le matériel objet de la saisie-revendication pratiquée par elle;
– ordonner sa remise définitive;
– condamner EGCC aux dépens;
A l’appui de sa demande, elle expose par l’office de son conseil maître SAVADOGO Mamadou, que suivant contrat du 2 avril 1998, elle a mis à la disposition de EGCC, une rouleuse « lisse », une cisaille « Bombled », une agrafeuse « cock former », une moleteuse « Bombled », une presse « colly » pour une durée de deux ans renouvelable; que cette mise en disposition qui avait pour but de faciliter les travaux que EGCC exécutait pour les filiales de DAGRIS au Burkina (SOFITEX et SN-CITEC) ne pouvait s’analyser en aucune façon en vente ni en promesse de vente; que EGCC s’est simplement aménagé une option d’achat qu’elle n’a du reste jamais mis en œuvre, puisqu’elle n’a jamais offert d’acheter le matériel en cause; que ledit matériel n’ayant donc pas quitté son patrimoine, c’est avec surprise qu’elle a été informée par le syndic liquidateur que son matériel a été comptabilisé dans le patrimoine de EGCC; qu’à la suite d’une requête afin de saisie-revendication initiée par elle le 25 septembre 2002, le président du tribunal a, par ordonnance n° 258/2002 autorisé la saisie, laquelle a été opérée par exploit de maître KONE Mariam le 4 octobre 2002; que par le même acte, elle a assigné EGCC en validité de ladite saisie;
Par jugement contradictoire en date du 18 décembre 2002, le tribunal de céans, statuant en matière civile a déclaré la société DAGRIS irrecevable en son action pour défaut de qualité et condamné celle-ci aux dépens;
Le 18 décembre 2002, la société DAGRIS a interjeté appel dudit jugement;
La cause, inscrite au rôle de la Cour d'appel a été appelée à l’audience du 20 janvier 2003 et renvoyée au 03 février 2003 pour réplique de l’intimée, date à laquelle elle est débattue et mise en délibéré pour le 17 mars 2003; advenue cette date, la Cour vidant le délibéré a rendu l’arrêt dont la teneur suit :
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que la Société DAGRIS a interjeté appel le 18 décembre 2002 contre un jugement contradictoire rendu le même jour; que ledit appel, intervenu dans les forme et délai prescrits par les articles 536 et 550 du code de procédure civile mérite d’être déclaré recevable;
AU FOND
Attendu que l’appelante fait grief au jugement attaqué de l’avoir déclaré irrecevable en son action pour défaut de qualité alors même que la preuve qu’elle constitue une seule et même personne que l’ex-CFDT a été rapportée; qu’elle a notamment produit l’extrait K-bis publié au Journal officiel de la République Française des 21 et 22 juin 2001, ainsi que diverses pièces établissant que c’est la CFDT qui a changé de dénomination pour devenir la DAGRIS; qu’en outre l’intimée ne conteste ni en première instance, ni en appel que le matériel revendiqué est sa propriété; qu’elle n’a initié la procédure de saisie-revendication qu’à partir du moment où le syndic liquidateur a contesté sa propriété par lettre du 23 septembre 2002; que les biens revendiqués ne se trouvant plus entre les mains de la liquidation, la saisie-revendication a été opérée entre les mains de la SN-CITEC détentrice du matériel et dénoncée le même jour à la liquidation EGCC conformément aux dispositions de l'article 232 de l'acte uniforme portant procédure simplifiée de recouvrement et des voies d’exécution; que de même, l’article 78 de l'acte uniforme portant organisation des procédure collectives d’apurement du passif obligeant les titulaires d’un droit de revendication à produire titre dans les soixante (60) jours à compter de la publication du jugement de liquidation ne peut lui être applicable, puisque du propre aveu de EGCC, c’est bien avant le prononcé du jugement de liquidation que le matériel querellé a été librement remis à la SN-CITEC par EGCC qui n’était pas encore en liquidation;
Attendu qu’elle conclut à l’infirmation du jugement entrepris, et à la recevabilité de son action qui est fondée;
Attendu que la liquidation EGCC représentée par son syndic liquidateur et ayant pour conseil le cabinet d’Avocats associés maître Issif SAWADOGO et Constantin OUEDRAOGO sollicite la confirmation du jugement; qu’elle expose que lorsque le syndic liquidateur est entré en fonction, il lui a été donné de constater que du matériel avait été enlevé sans autre forme de procès par le directeur d’exploitation de la SN-CITEC, et déposé auprès de celle-ci comme gardienne alors même que la procédure sur la demande initiale de redressement judiciaire était pendante devant le tribunal; que c’est pour tenter de régulariser qu’une procédure de saisie-revendication a été engagée par l’appelante qui prétend qu’elle constitue une même personne morale avec la CFDT qui était en relation d’affaire avec elle; que la preuve de l’identité de personne morale faite par l’appelante ne modifie en rien l’irrégularité de la saisie-revendication;
Attendu qu’elle fait observer qu’aucune saisie n’a été opérée entre ses mains, puisque les biens avaient été auparavant enlevés et déposés auprès de la SN-CITEC;
Que la saisie opérée par la société DAGRIS a donc été faite en violation de l’article 232 de l'acte uniforme portant procédure simplifiée de recouvrement et des voies d’exécution, et 78 de l'acte uniforme portant organisation des procédure collectives d’apurement du passif;
MOTIVATION
Attendu que le jugement attaqué a déclaré la société DAGRIS irrecevable en son action pour défaut de qualité en ce qu’elle n’a pu rapporter la preuve qu’elle constitue une seule et même société que la ex-CFDT;
Attendu que des pièces produites par l’appelante il est constant que sa qualité se trouve établie et n’est même plus contestée par l’intimée; qu’il y a donc lieu de déclarer l’appelante recevable en son action;
Attendu que l’article 232 alinéa 2 de l'acte précité dispose que « si la saisie a été pratiquée entre les mains d’un tiers détenteur du bien, l’acte est également signifié dans un délai de huit (08) jours au plus tard à celui qui est tenu de le délivrer ou de le restituer »;
Attendu qu’il n’est pas contesté qu’au moment de la saisie, le matériel querellé n’était plus entre les mains de la EGCC, mais plutôt entre celles de la SN-CITEC qui est un tiers;
Attendu qu’il est également constant que la saisie dudit matériel a été opérée le 4 octobre 2002 et signifiée le même jour au syndic liquidateur de EGCC; que les prescriptions édictées à l’article 232 suscité ont donc été respectées;
Attendu qu’il est par ailleurs reproché à l’appelant d’avoir violé les dispositions de l’article 78 de l'acte uniforme portant organisation des procédure collectives d’apurement du passif;
Attendu qu’aux termes dudit article, il est fait obligation aux créanciers domiciliés hors du territoire national où la procédure collective a été ouverte, de produire sous peine de forclusion leurs créances dans un délai de 60 jours suivant la deuxième insertion dans un journal d’annonces légales;
Attendu qu’il a été versé au dossier l’extrait d’un journal d’annonces légales en date du 25 juillet 2002 portant deuxième insertion; qu’il a été également produit une correspondance de DAGRIS adressée au syndic liquidateur le 20 septembre 2002 attestant que celle-ci a réclamé son matériel dans le délai prescrit à l’article suscité;
Attendu que l’article 103 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement du passif dispose que « peuvent être revendiqués à condition qu’ils se retrouvent en nature, les marchandises consignées et les objets mobiliers remis au débiteur soit pour être vendus pour le compte du propriétaire, soit à titre de dépôt, de mandat ou de location ou de tout autre contrat à charge de restitution »;
Attendu qu’il résulte des articles suscités que la saisie-revendication pratiquée par l’appelante doit être déclarée régulière et fondée;
Que de ce qui précède, il convient d’infirmer le jugement querellé et de condamner EGCC aux dépens.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale et en dernier ressort :
EN LA FORME
Déclare l’appel recevable;
AU FOND
Infirme le jugement attaqué;
Evoquant déclare régulière la saisie-revendication pratiquée par DAGRIS et la dit fondée;
Condamne EGCC aux dépens.