J-04-225
SAISIE – DEMANDE DE DISTRACTION DES BIENS SAISIS – COMPETENCE – JUGE DU FOND (NON) – ARTICLE 141 AUPSRVE – JUGE DES REFERES (OUI) – ARTICLE 49 AUPSRVE.
SAISIE – DEMANDE DE DISTRACTION DES BIENS SAISIS – QUALITE – PROPRIETAIRE (OUI) – DEBITEUR (NON) – ARTICLE 141 AUPSRVE.
Si l’article 141 AUPSRVE permet au tiers qui se prétend propriétaire des biens saisis de saisir la juridiction compétente aux fins d’obtenir la distraction des biens saisis, le juge compétent n’est pas, en l’espèce, le juge chargé de statuer sur la propriété des biens saisis, mais, conformément à l’article 49 AUPSRVE, le président de la juridiction statuant en matière d’urgence qui connaît des difficultés relatives aux mesures d’exécution.
Si l’action en mainlevée de la saisie appartient au débiteur, l’action en distraction des biens saisis appartient, quant à elle, au propriétaire.
Article 49 AUPSRVE
Article 141 AUPSRVE
(Cour d’Appel du Littoral, arrêt n° 122/REF du 25 septembre 2000, Affaire Société GEMAT SARL c/ Société MOBIL OIL CAM).
LA COUR
– Vu l’ordonnance de référé n° 547/CONT rendue le 15 février 1999 par le Tribunal de Première Instance de Douala;
– Vu l’appel interjeté le 11 mars 1999 par Maîtres TALLA et KENKO pour le compte de la Société GEMAT SARL contre ladite ordonnance;
– Vu l’arrêt n° 85/REF rendu le 14 juillet 1999 par la Cour d’Appel de Douala;
– Vu l’arrêt avant dire droit n° 72/REF/ADD rendu le 24 avril 2000 par ladite cour;
– Ouï Monsieur le Président en son rapport;
– Ouï les parties en leur conclusions;
– Vu les pièces du dossier de la procédure;
– Après en avoir délibéré conformément à la loi;
– Statuant sur l’opposition régulièrement formé le 7 octobre 1999 par Maître NGWE, avocat à Douala pour le compte de la Société MOBIL OIL Cameroun SA à l’encontre de l’arrêt n° 85/REF rendu le 14 juillet 1999 par la Cour d’Appel de céans dont le dispositif est reproduit dans les qualités de la présente décision;
– Considérant que cette opposition a été reçu par l’Arrêt n° 72/REF/ADD rendu le 24 avril 2000 par la Cour d’Appel de céans; Qu’il y a lieu d’en prendre acte;
– Considérant que toutes les parties ont été représentées par leurs conseils respectifs qui ont conclu; Qu’il y a lieu de statuer contradictoirement à leur encontre;
– Considérant que la Société MOBIL agissant par le canal de son conseil sollicite la rétractation de l’arrêt dont opposition en ce que d’une part le juge des référés était incompétent pour connaître d’une procédure de distraction de biens saisis et que d’autre part, la Société GEMAT n’avait pas qualité pour demander main levée de la saisie en tant que tiers au vu des dispositions de l’article 62 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution en OHADA;
I-Sur l’incompétence du juge des référés
– Considérant que s’agissant de l’incompétence du juge des référés, la Société MOBIL soutien que l’Article 141 de l’Acte sus-cité dispose que le tiers qui se prétend propriétaire des biens saisis peut demander à la juridiction compétente d’en ordonner la distraction; Que de l’esprit de ce texte il ressort que la juridiction compétente est celle susceptible de ses prononcer au préalable sur la propriété des biens en l’occurrence le juge du fond car le juge du provisoire des référés ne peut se prononcer sur la propriété d’un bien pour contestation sérieuse;
– Mais considérant que, contrairement à cette allégation, il résulte des dispositions de l’article 49 de l’Acte Uniforme sus-visé que la juridiction compétente pour statuer sur tout litige ou toute demande relative à une mesure d’exécution forcée ou à une saisie conservatoire est le président de la juridiction statuant en matière d’urgence ou les magistrat délégué par lui; Qu’au vu de ce qui précède, il échet d’infirmer l’ordonnance entreprise, l’opposition ayant anéanti l’arrêt attaqué, et de dire que le juge des référés, juge des urgences est compétent;
II- Sur le Défaut de qualité
– Considérant que la Société Mobil OIL a allégué qu’aux termes des dispositions de l’article 62 de l’Acte Uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement, la main levée d’une mesure conservatoire ne peut être ordonnée par la juridiction compétente que sur la demande du débiteur; Que le débiteur dans la procédure étant TAKOUGANG, la Société GEMAT n’avait par conséquent pas qualité pour demander la restitution des biens saisis;
– Mais considérant que si cette allégation est fondée en ce qui concerne le première action de la Société GEMAT quant à la main levée qu’elle a sollicité, elle demeure cependant on fondée en ce qui concerne la demande de restitution des effets saisis dont la Société GEMAT revendique la propriété;
– Qu’en effet, aux termes des dispositions de l’article 141 de l’ACte Uniforme sus-visé, le tiers qui se prétend propriétaire d’un bien saisi peut demander à la juridiction compétente d’en ordonner la distraction, autrement dit la restitution sollicitée;
– Considérant que c’est à tort que pour déclarer irrecevable cette demande, le premier juge a retenu que celle-ci ne comportait pas de précision quant aux éléments sur lesquels se fondait le droit de propriété invoqué;
– Qu’il résulte plutôt des pièces du dossier, notamment du procès verbal de saisi conservatoire avec enlèvement en date du 21 janvier 1999 de Maître Guy EFON, que les effets saisis l’ont été à la quincaillerie GEMAT dont le patrimoine est distinct de celui du saisi TAKOUGANG François; Que cette affirmation par acte authentique de l’huissier instrumentaire corroboré par les dispositions de l’article 2279 du Code Civil en vertu desquelles en fait de meubles possession vaut titre, démontre à suffire s’il en était encore besoin que les biens saisis par la MOBIL appartenaient plutôt à la Société GEMAT et non à TAKOUGANG François, exception faite du véhicule Peugeot 405 immatriculé sous le numéro LT 5009-I, lequel s’est avéré être la propriété de ce dernier;
– Considérant que compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de recevoir la demande de la société GEMAT et d’ordonner la distraction de tous biens saisis par Maître Guy EFON à l’exception du véhicule Peugeot 405 n° LT 5009 I appartenant au débiteur réel TAKOUGANG François;
– Considérant que la Société GEMAT a sollicité que ladite restitution soit assortie d’une astreinte de 1.000.000 de francs par jour de retard;
– Mais considérant que si cette demande est justifiée eu égard à la saisie abusive subie, elle s’avère cependant exagérée quant à son quantum; Qu’il y a lieu d’y faire droit en ramenant l’astreinte à 100.000 francs par jour de retard à compter de la signification;
– Considérant que la partie qui succombe au procès doit en supporter les dépens;
PAR CES MOTIFS
– Statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et commerciale, en appel et en dernier ressort;
En la forme
– Constate la recevabilité de l’opposition;
AU FOND
– Statuant à nouveau, se déclare compétente;
– Infirme l’ordonnance entreprise;
– Ordonne la distraction de tous les biens et effets mobiliers saisi appartenant à la GEMAT par Maître Guy EFON le 21 janvier 1999 à l’exception du véhicule Peugeot 405 n° LT 5009 I qui appartient à TAKOUGANG François sous astreinte de 100.000 francs par jour de retard à compter de la signification (…).