J-04-304
VOIES D'EXECUTION – SAISIE VENTE – TITRE EXECUTOIRE – JUGEMENT NON ENCORE PASSE EN FORCE DE CHOSE JUGEE – JUGEMENT CONSTITUTIF DE TITRE EXECUTOIRE (NON) – NULLITE DE LA SAISIE.
N'est pas encore passé en force de chose jugée et ne peut constituer un titre exécutoire, un jugement pénal non assorti de l'exécution provisoire et frappé d'appel.
En conséquence est nulle la saisie vente pratiquée.
Article 91 AUPRSVE
(Cour d'appel d'Abidjan, Arrêt n°384 du 10 avril 2001, Société UNIMAT c / SODIREP, Le Juris Ohada n° 2/2004, juin-août 2004, p.57, note BROU Kouakou Mathurin).
LA COUR,
Vu les pièces du dossier;
Oui les parties en leurs demandes, fins et conclusions;
Ensemble l'exposé des faits, procédure, prétentions des parties et motifs ci­après;
DES FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Dame A. qui s'est portée caution pour le remboursement d'un prêt accordé à Monsieur E. par Monsieur G. a tiré au profit de celui-ci un chèque BICICI d'un montant de 300.000 F;
Présenté à l'encaissement, ce chèque est revenu impayé, induisant ainsi une procédure correctionnelle sanctionnée par la culpabilité de dame A., laquelle a été condamnée à trois mois d'emprisonnement ferme, 100.000 F d'amende et 400.000 F à titre de dommages-intérêts en faveur de Monsieur G.;
En exécution du jugement N° 5878 du 25 Mai 1999 rendu par le Tribunal Correctionnel d'Abidjan, Monsieur G. pratiquait saisie-vente sur les biens meubles de dame A. suivant procès-verbal en date du 08 Novembre 2000;
Pour faire échec à cette mesure d'exécution, dame A. a saisi d'une demande en main-levée le JUGE des référés qui a rendu l'ordonnance N° 73 du 05 Janvier 2001 dont le dispositif est le suivant
– Déclarons dame A. Mal fondée;
– La déboutons;
– La condamnons aux dépens";
Par acte d'Huissier du 19 Janvier 2001, Dame A. a relevé appel de l'ordonnance entreprise;
Au soutien de son recours, elle expose que la dette de 200.000 F pour laquelle elle s'est portée caution a été intégralement remboursée par Monsieur ESSOH NOEL, le débiteur principal, à concurrence de 395.000 F depuis 1998;
Elle indique cependant que Monsieur G., qui a toujours refusé de délivrer reçu en prenant pour prétexte le bon voisinage, s'est également permis de garder par dévers lui son chèque de 300.000 F pourtant donné à titre de simple garantie;
Elle fait aussi valoir que le jugement correctionnel, qui sert de fondement à la saisie - vente, est frappé d'appel; à cet effet, elle prétend n'avoir pas reçu la citation à comparaître devant le Tribunal Correctionnel et que le jugement n'est donc pas contradictoire;
En tout état de cause, elle relève que conformément à l'article 491, alinéa 2, du code de procédure pénale, le délai d'appel, qui est de 20 jours, ne court qu'à compter de la signification du jugement entrepris. Or, précise-t-elle, cette signification est intervenue le 03 Août 2000 et l'appel, relevé le 09 Août 2000, c'est-à-dire dans les délais légaux, est suspensif et empêche toute mesure d'exécution forcée;
Elle en déduit que la saisie - vente pratiquée le 08 Novembre 2000 est nulle et que le Juge des référés a tranché à tort en la déboutant de sa demande en main­levée;
En conséquence, elle sollicite l'infirmation de l'ordonnance querellée en toutes ses dispositions;
Monsieur G., cité en l'étude de Maître SONTE EMILE, Avocat à la cour, n'a pas comparu ni personne pour lui; il y a lieu de juger par défaut à son endroit;
MOTIFS DE LA DECISION EN LA FORME
Aucun acte d'huissier versé au dossier de la procédure n'atteste de la signification de l'ordonnance querellée N° 73 du 05/01/2001. En conséquence, l'appel du 19 Janvier 2001, comportant ajournement au 29 Janvier 2001, est recevable, conformément aux dispositions de l'article 228 nouveau, alinéa 2, du code de procédure civile;
AU FOND
SUR L'ABSENCE DE TITRE EXECUTOIRE
Pour débouter dame A. de sa demande en mainlevée, le Premier Juge a estimé que contrairement aux allégations de celle-ci, Monsieur G. dispose d'une décision devenue définitive représentée par le jugement correctionnel contradictoire N° 5878 du 25 Mai 1999;
Ce motif relève de l'erreur et ne peut porter. En effet, le jugement pénal susvisé non assorti de l'exécution provisoire et régulièrement frappé d'appel le 09 Août 2000 par Dame A. n'est pas encore passé en force de chose jugée et ne peut constituer un titre exécutoire;
En conséquence, la saisie vente du 08 Novembre 2000 pratiquée en violation de l'article 91, alinéa 1, de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution est nulle;
Il y a lieu d'en juger ainsi et d'en ordonner la main levée;
DES DEPENS
La présente instance est accessoire à l'instance correctionnelle principale pendante devant la Cour d'Appel d'Abidjan; il y a lieu de réserver les dépens conformément aux dispositions de l'article 230 du code de procédure civile;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, par défaut, en matière civile et en dernier ressort; Reçoit Dame A. en son appel;
L'y déclare bien fondée;
Infirme l'ordonnance N° 73 du 05 Janvier 2001 en toutes ses dispositions; Statuant à nouveau,
Déclare nulle la saisie - vente pratiquée le 08 Novembre 2000 par Monsieur G. En ordonne la mainlevée;
Président : M. SIOBLO Douai Jules
Note
La saisie vente peut être pratiquée, aux termes de l'article 91 al. 1 de l’Acte uniforme portant voies d'exécution par tout créancier muni d'un titre exécutoire.
Un jugement pénal non assorti de l'exécution provisoire et régulièrement frappé d'appel constitue-t-il un titre exécutoire ?
Non répond la Cour d'appel, car le jugement en cause n'est pas encore passé en force de chose jugée. C'est donc en violation de l'article 1 91 al1 précité que la saisie vente a été pratiquée. D'où la nullité de la saisie.
BROU Kouakou Mathurin