J-04-310
DROIT COMMERCIAL GENERAL – BAIL COMMERCIAL – RUPTURE ABUSIVE D'UN CONTRAT DE BAIL – ACTE D'ASSIGNATION – ARTICLE 438 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – MENTIONS OBLIGATOIRES – ABSENCE D'UNE MENTION – NULLITE DE L'ACTE D'ASSIGNATION (Oui).
Conformément à l'article 438 du code de procédure civile, l'assignation doit contenir, entre autres mentions, "l'indication que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire". Cette mention est prévue à peine de nullité sans qu'il soit besoin de faire la preuve d'un quelconque préjudice subi. Son absence donc dans l'acte d'assignation constitue une violation de l'article 438 du code précité, et la sanction est la nullité de l'acte.
Article 438 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 138 ALINEA 1er CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Jugement n° 328 du 02 juillet 2003, KONE Henriette G. A. Carol c/ OUEDRAOGO Issa).
LE TRIBUNAL,
Faits, prétentions des parties et procédure
Par exploit d'huissier en date du 12 novembre 2002, KONE Henriette G. A. Carol, domiciliée à Ouagadougou, a donné assignation à Monsieur OUEDRAOGO Issa, domicilié à Ouagadougou devant le tribunal de céans à l'effet de :
– s'entendre condamner Monsieur OUEDRAOGO Issa à lui payer la somme principale d'un million six cent soixante douze mille trois cent soixante douze (1.672.372) F CFA outre les dommages et intérêts estimés à un million (1.000.000) F CFA;
– voir ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant opposition ou appel;
– s'entendre condamner le défendeur aux dépens;
En réplique Monsieur OUEDRAOGO Issa, par l'intermédiaire de son conseil a soulevé in limine litis une exception de nullité tendant à l'annulation de l'acte d'assignation à lui servi en date du 12 novembre 2002; il reproche à l'acte d'avoir omis des formalités prescrites par la loi à peine de nullité; il expose en premier lieu que l'acte d'assignation a omis d'évoquer les moyens qui servent de soutien à sa demande; qu'une telle demande nuit aux intérêts de la défense en ce qu'elle ne permet pas de déterminer la nature contractuelle ou délictuelle de l'action; en second lieu, il reproche à l'acte de ne pas contenir la mention ci-après intitulée : « faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'une décision soit rendue contre lui sur la base des seuls éléments fournis par son adversaire »;
Au soutien de sa prétention, Monsieur OUEDRAOGO Issa invoque les dispositions de l'article 438 du code de procédure civile;
Dame KONE Henriette G. A. Carol revient à la charge en réfutant dans ses écritures toutes les exceptions de nullité soulevées par le défendeur; elle soutient d'une part que les moyens ne sont autres que les faits, c'est-à-dire les éléments qui sont invoqués au soutien de la demande en justice et que ces faits sont suffisamment exposés dans l'acte d'assignation pour permettre de comprendre que Dame KONE Henriette G . A. Carol sollicite la réparation d'un dommage subi à la suite d'une rupture abusive d'un contrat de bail commercial; d'autre part, le demandeur explique que la « ratio legis » de la disposition « faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'une décision soit rendue contre lui sur la base des seuls éléments fournis par son adversaire » n'est autre que d'inciter le défendeur à se présenter devant le tribunal; que dans le cas d'espèce, l'omission de cette mention n'a aucunement empêcher le défendeur de se présenter devant le tribunal et de se constituer un conseil qui assure sa défense; Dame KONE soutient enfin qu'il est de principe qu'aucune nullité ne peut être invoquée sans griefs et que cela est corroboré par l'article 140 du code de procédure civile aux termes duquel « la nullité ne peut être prononcée qu'à charge par celui qui l'invoque de prouver le préjudice que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une nullité substantielle ou d'ordre public »; qu'elle affirme que dans le cas d'espèce, le défendeur se contente d'invoquer une nullité sans prouver le préjudice qu'il subit du fait de l'absence de la mention prescrite; qu'elle qu'il existe une jurisprudence abondante sur ce principe;
MOTIFS DE LA DECISION
Attendu qu'aux termes de l'article 438 du code de procédure civile « L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier :
– l'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ainsi que les date et heure de l'audience;
– l'objet de la demande avec un exposé des faits et moyens;
– l'indication que faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ... »; qu'au sens de l'article 138 alinéa 1er du même code, aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi sauf les cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public;
Attendu qu'il est constant que l'acte d'assignation servi à Monsieur OUEPRAOGO Issa en date du 12 novembre 2002 ne contient pas la mention suivante « faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'une décision soit rendue contre lui sur la base des seuls éléments fournis par son adversaire »; que cette mention étant expressément prescrite par la loi à peine de nullité, son omission entraîne l'annulation de l'acte;
Attendu qu'il y a lieu de préciser que la mention omise n'est pas simplement une formalité substantielle, mais une formalité expressément prescrite par la loi à peine de nullité; que contrairement à ce que prétend Dame KONE G. A. Carol, celui qui soulève une telle exception de nullité n'est pas tenu de préciser le préjudice qu'il subit du fait de l'irrégularité; que de tout ce qui précède, il y a lieu d'annuler l'exploit d'huissier fait par Dame KONE G. A. Carol;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement contradictoirement en matière civile et en premier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'acte d'assignation fait par Dame KONE G. A. Carol nul pour violation de l'article 438 du code de procédure civile;
Condamne Dame KONE G. A. Carol aux dépens.