J-04-361
Voir Ohadata J-04-360
PROCEDURE SIMPLIFIEE DE RECOUVREMENT DES CREANCES – INJONCTION DE PAYER – ORDONNANCE D’INJONCTION DE PAYER – DECISION RENDUE SUR OPPOSITION – APPEL – RECEVABILITE (OUI) – CONTESTATION DE LA CREANCE – CREANCE DEJA PAYEE.
CHARGE DE LA PREUVE – ARTICLE 1315 CODE CIVIL BURKINABE – REÇUS – PREUVE MATERIELLE DU PAIEMENT – PREUVE DE L'EXISTENCE LA CREANCE CONTESTEE – POSSESSION DE CHEQUES IMPAYES – DEFAUT DE PREUVE DU DEMANDEUR – INFIRMATION DU JUGEMENT QUERELLE – DEMANDE RECONVENTIONNELLE NON FONDEE.
Il est constant que le chèque est un instrument, un titre de paiement et non un instrument de crédit ou autre pouvant servir à garantir le paiement d'une quelconque créance. C'est donc à tort que le premier juge s'est basé sur le simple et unique fait que le créancier détenait toujours des chèques émis par le débiteur pour déclarer que celui‑ci n'a pas entièrement libéré sa dette et l'a condamné au paiement.
Article 1315 CODE CIVIL BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 33 du 20 février 2004, BAYILI Daouda c/ BADO Dèma Raphaël).
LA COUR,
Vu le jugement n° 690/2002 du 26 juin 2002;
Vu l'appel de BAYELI Daouda en date du 08 juillet 2002;
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Faits ‑ Procédure ‑ Prétentions et moyens des parties
Le 18 octobre 2001, BADO Dèma Raphaël faisait notifier une ordonnance d'injonction à BAYILI Daouda d'avoir à payer la somme de six millions (6.000.000) francs CFA.
Le 31 octobre 2001, BAYILI Daouda formait opposition contre ladite ordonnance aux fins de la voir annuler et sollicite reconventionnellement que BADO Dèma Raphaël soit condamné à lui payer des dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
A d'audience du 26 juin 2002, le tribunal de grande instance de Ouagadougou rendait la décision contradictoire suivante :
– En la forme, reçoit BAYILI Daouda en son opposition;
– Au fond, la déclare mal fondée; en conséquence condamne BAYILI Daouda à payer à BADO Dèma Raphaël la somme de 6.000.000 F en principal.
– Déboute BAYILI Daouda de sa demande reconventionnelle.
Contre cette décision, BAYILI Daouda relevait appel le 08 juillet 2002 pour voir infirmer le jugement attaqué en soutenant avoir payé la créance de six millions en totalité; qu'il précise que sur une créance de onze millions cent mille, il a procédé à un paiement en deux tranches de six millions et cinq millions cent mille.
BAYILI Daouda demande à titre reconventionnelle que BADO Dèma Raphaël soit condamné à lui payer la somme de un million à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
BADO Dèma Raphaël conclut pour sa part à la confirmation du jugement entrepris au motif que le reçu de versement de 6.000.000 F produit aux débats concerne une autre créance, celle de son épouse et que BAYILI Daouda lui reste redevable de la somme de six millions (6.000.000) francs sur une créance de 11.100.000 F au total.
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel du 30 août 2002 et renvoyée au rôle général pour la mise en état;
Qu'à l'intervention de l'ordonnance de clôture en date du 29 septembre 2003, l'affaire était appelée à nouveau à l'audience du 17 octobre 2003, date à laquelle elle a été retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 19 décembre 2003; que le délibéré a été cependant prorogé successivement au 06 février 2004, ensuite au 20 février 2004 où il a été vidé en ces termes;
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que BAYILI Daouda a interjeté appel le 08 juillet 2002 contre un jugement rendu contradictoirement le 26 juin 2002 que cet appel remplit toutes les conditions de forme et de délai prévues par la loi et mérite d'être déclaré recevable.
AU FOND
Attendu qu'aux termes de l'article 1315 du code civil, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation »;
Qu'en l'espèce, la créance de monsieur BADO Dèma Raphaël est matérialisée par deux chèques, respectivement d'un montant de 6.700.000 F émis le 20 août 1996 l'un et l'autre de 4.400.000 F, émis le 31 décembre 1996;
Que BAYILI Daouda qui se prétend libéré de l'obligation de payer la créance verse aux débats un reçu manuscrit, émanant de BADO Dèma Raphaël en date du 12 août 1999 et signé de monsieur BADO, dans lequel il reconnaît lui même « avoir reçu ce jour, la somme de six millions (6.000.000) francs des mains de monsieur BAYILI Daouda, représentant le règlement partiel de sa dette »;
Qu'en outre, monsieur BAYILI Daouda produit aux débats un autre reçu d'un montant de cinq millions cent mille (5.100.000) francs, daté du 21 mars 2000 et émanant du cabinet de maître Benoît LOMPO, constatant un versement au profit de BADO Dèma Raphaël;
Qu'il en résulte que monsieur BAYILI Daouda a rapporté aux débats la preuve matérielle du paiement conformément aux dispositions de l'article ci‑dessus cité et qu'il ne reste plus devoir à monsieur BADO Dèma Raphaël;
Attendu cependant que monsieur BADO soutient que monsieur BAYILI lui reste redevable de la somme de 6.000.000 F au motif que le paiement effectué par ce dernier en date du 12 août 1999 concernerait une créance de son épouse; qu'il demeure néanmoins dans l'incapacité de prouver l'existence de cette créance qui est contestée par BAYILI Daouda;
Que se trouvant dans l'impossibilité de rapporter la preuve de cette créance alléguée conformément aux dispositions de l'article 1315 du code civil, il y a lieu de le débouter de cette demande;
Attendu enfin que contrairement à ce qui est soutenu par le premier juge à savoir « qu'il était convenu que le paiement intégral par BAYILI Daouda de sa dette impliquerait remise des chèques à son profit; que BADO Dèma Raphaël se trouve encore être en possession desdits chèques ... », il est constant que le chèque est un instrument, un titre de paiement et non un instrument de crédit ou autre pouvant servir à garantir le paiement d'une quelconque créance;
Que le défaut de paiement ouvre des voies de recours au profit du porteur; que c'est donc à tort que le premier juge s'est basé sur le simple et unique fait que BADO Dèma Raphaël détenait toujours des chèques émis par BAYILI Daouda pour déclarer que celui‑ci n'a pas entièrement libéré sa dette et l'a condamné au paiement;
Que de tout ce qui précède, il convient d'infirmer le jugement querellé et débouter BADO Dèma de sa demande comme étant mal fondée;
Attendu que BAYILI Daouda demande à titre reconventionnel que BADO Dèma Raphaël soit condamné à lui payer la somme de 1.000.000 F à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire; qu'il explique que s'étant totalement libéré de sa dette, c'est en toute mauvaise foi que l'action a été intentée contre lui et qu'elle lui cause un préjudice;
Attendu que cette demande est régulière en la forme mais non justifiée quant au fond; qu'il convient donc de l'en débouter.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de BAYILI Daouda recevable.
AU FOND
Infirme le jugement querellé;
Déboute BADO Dèma Raphaël de sa demande comme étant mal fondée;
Reçoit BAYILI Daouda en sa demande reconventionnelle; la déclare régulière en la forme mais non justifiée quant au fond; l'en déboute par conséquent;
Condamne BADO Dèma Raphaël aux dépens.