J-04-362
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT – PROCEDURE SIMPLIFIEE TENDANT A LA RESTITUTION D'UN BIEN MEUBLE DETERMINE – DECISION PORTANT INJONCTION DE RESTITUER – VOIES DE RECOURS – ARTICLES 26 ET 27 AUPSRVE – ABSENCE D'OPPOSITION DANS LE DELAI IMPARTI – FORCLUSION.
ACTION EN RESOLUTION DE VENTE – DECISION PORTANT RESOLUTION D'UNE VENTE – APPEL – RECEVABILITE DE L'APPEL (OUI) – RECEVABILITE DE L'ACTION EN RESOLUTION DE VENTE – IRRECEVABILITE POUR AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE – VIOLATION DU PRINCIPE DE L'AUTORITE DE LA CHOSE JUGEE – ANNULATION DU JUGEMENT PORTANT RESOLUTION DE LA VENTE – DEMANDE RECONVENTIONNELLE NON FONDEE.
Il est de doctrine et de jurisprudence constantes que toutes formes de contestations et d'irrégularités relatives à une ordonnance d'injonction de payer, de délivrer ou de restituer doivent être soulevées dans le cadre de l'opposition. Dès lors que celle‑ci n'a pas été exercée, la décision est définitivement revêtue de l'autorité de la chose jugée. les délais impartis pour former opposition dans la présente cause étant expirés, la société M.G.R. International est forclos et toute demande tendant à la remise en cause de la décision d'injonction de délivrer ou de restituer est irrecevable. C'est donc en violation flagrante des dispositions de la loi que le premier juge a déclaré l'action en résolution de vente recevable et a, en conséquence, prononcé la résolution de la vente.
Article 9 AUPSRVE ET SUIVANTS
Article 394 ALINEA 1 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 22 du 21 mars 2003, PATRUNO Sylvain c/ Société M.G.R. International).
LA COUR,
Vu le jugement n° 153 du 20 février 2002;
Vu l'acte d'appel de PATRUNO Sylvain en date du 21 février 2002;
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
FAITS – PROCEDURE ‑ PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par acte d'huissier de justice en date du treize février deux mil un (13/02/2001), la Société M.G.R. International, assignait monsieur PATRUNO Sylvain, pour voir :
– prononcer la résolution de la vente conclue entre elle et PATRUNO Sylvain;
– ordonner la restitution de l'ensemble des véhicules saisis, sous astreinte de deux cent cinquante mille francs (250.000 F) par jour de retard;
– assortir le jugement à intervenir de l'exécution provisoire et condamner monsieur PATRUNO Sylvain aux dépens de l'instance;
Elle expose avoir acquis un ensemble routier avec PATRUNO Sylvain dont un tracteur, immatriculé sous le numéro 11 L 6951 B.F. et un camion remorque, immatriculé 11 L 6252 B.F., en plus de deux autres véhicules à la somme de trente neuf millions de franc (39.000.000 F) C.F.A..
Que ne parvenant pas à le rentabiliser convenablement, elle sollicitait l'aide de monsieur PATRUNO Sylvain, son fournisseur, pour la revente en lui délivrant un acte de vente afin qu'il se comporte en véritable propriétaire dans la transaction avec les éventuels acquéreurs.
Que d'ailleurs, l'attestation de vente délivrée à monsieur PATRUNO Sylvain, ne contient ni la désignation de tout l'ensemble routier, ni le prix de vente convenu, encore moins les modalités de paiement, puisqu'elle n'a pas été payée.
La Société M.G.R. International sollicite également, par demandes additionnelles, que PATRUNO Sylvain soit condamné à lui payer la somme de trois millions neuf cent quatre vingt mille francs (3.980.000 F) C.F.A., représentant la valeur des pneus qu'elle a monté sur les véhicules et une somme de vingt cinq millions deux cent cinquante mille franc (25.250.000 F) C.F.A. comme gains manqués, soit un million cinq cent mille francs (1.500.000 F) par mois à compter du 03 novembre 1999.
En réplique, PATRUNO Sylvain soutient que la société M.G.R. International lui a cédé l'ensemble routier en question, en dation en paiement d'une dette de huit millions de francs (8.000.000 F) C.F.A. suivant attestation de vente en date du 05 mars 1999.
Que la remise du matériel tardant à venir, il a initié et obtenu une ordonnance d'injonction d'avoir à délivrer ou de restituer l'ensemble des véhicules en cause, conformément à l'article 23 de l'acte uniforme, le 20 juillet 1999.
Que la dite ordonnance a été notifiée à la société M.G.R. International le 28 juillet et revêtue de la formule exécutoire le 19 août 1999.
Que sur la base de ce titre exécutoire, il procédait à la saisie des véhicules le 03 novembre 1999 après un commandement demeuré sans effet du 26 août 1999.
PATRUNO Sylvain poursuit en disant qu'à la suite de la saisie, la société M.G.R. International a saisi le juge des référés aux fins d'obtenir l'annulation et la mainlevée de ladite saisie, mais elle fut débouté de sa demande.
Que malgré cela, la société l'a encore assigné devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou en annulation de l'attestation de vente et par jugement en date du 27 décembre 2000, la société M.G.R. International était une fois de plus déboutée de son action comme étant mal fondée et condamnée à lui payer reconventionnellement la somme de cinq cent mille francs (500 000 F) C.F.A. à titre de dommages et intérêts.
PATRUNO Sylvain conclut en conséquence à l'irrecevabilité de l'action de la société M.G.R. International pour autorité de la chose jugée, le jugement du 27 décembre 2000 n'ayant fait l'objet d'aucune voie de recours.
Il demande donc que la société M.G.R. International soit condamnée à lui payer la somme de cinq millions (5.000.000) de francs C.F.A. à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire.
A l'audience du 20 février 2002, le tribunal rendait la décision contradictoire suivante :
– reçoit en la forme la demande de la société M.G.R. International;
– au fond, la déclare partiellement fondée;
– prononce la résolution de la vente de la remorque de marque FRUEHAUT, type FT 32, numéro de série 0385 N, immatriculé 11 L 6252 B.F. et du tracteur de marque RENAULT, type RG 04 AI, numéro de série REP 2152 A, immatriculé 11 L 6951 B.F., intervenue entre la société M.G.R. International et monsieur PATRUNO Sylvain le 05 mars 1998 pour défaut de paiement du prix;
– ordonne la restitution desdits véhicules saisis à la société M.G.R. International;
– condamne PATRUNO Sylvain à payer à la société M.G.R. International la somme de cinq millions (5.000.000) de francs C.F.A. à titre de dommages et intérêts;
– déboute la société M.G.R. International du surplus de ses demandes;
– déboute PATRUNO Sylvain de sa demande reconventionnelle;
– dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire;
– condamne PATRUNO Sylvain aux dépens.
Contre cette décision, PATRUNO Sylvain relevait appel le 21 février 2000 pour voir annuler le jugement attaqué pour violation de la loi.
Il soutient que l'action de la société M.G.R. International est irrecevable pour double autorité de la chose jugée.
Qu'en effet, l'ordonnance d'injonction de restituer ou de délivrer, notifiée à la société M.G.R. International le 28 juillet 1999 n'a pas fait l'objet d'opposition conformément aux dispositions des articles 16 et 25 de l'acte uniforme du 10 avril 1998 portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voles d'exécution.
Qu'en outre le jugement du 27 décembre 2000, initié par la société M.G.R. International en annulation d'une attestation de vente et qui l'a débouté de sa demande comme étant mal fondée, n'a pas non plus fait l'objet d'un quelconque recours.
PATRUNO Sylvain conclut enfin que l'assignation en résolution de vente et en paiement de dommages et intérêts porte sur les mêmes demandes, dans la même cause et entre les mêmes parties; que c'est donc à tort que le premier juge a déclaré l'action en résolution de vente recevable au motif que s'il y avait identité des parties, il n'y avait pas identité de cause et d'objet.
La société M.G.R. International conclut à la confirmation pure et simple du jugement attaqué en alléguant qu'il n'y a pas autorité de chose jugée puisque le jugement du 27 décembre 2000 a déclaré recevable l'action de M.G.R. International.
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel du 05 avril 2002 et renvoyée au rôle général pour la mise en état;
Que l'ordonnance de clôture étant intervenue le 17 juin 2002, l'affaire fut appelée à nouveau à l'audience du 19 juillet 2002, puis renvoyée à l'audience du 18 octobre, ensuite au 15 novembre 2002, date à laquelle elle fut retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 07 février 2003; qu'à cette date, le délibéré fut prorogé au 21 mars 2003;
Qu'advenue cette date, la Cour vidant son délibéré, a statué en ces termes;
EN LA FORME
Attendu que PATRUNO Sylvain a interjeté appel le 24 février 2002 contre un jugement rendu contradictoirement le 20 février 2002; que cet appel remplit toutes les conditions de forme et de délai prévues par la loi et doit être déclaré recevable.
AU FOND
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir déclaré recevable l'action en résolution de vente de la société M.G.R. International et d'avoir fait droit partiellement à la demande de ladite société en prononçant la résolution de la vente pour défaut de paiement et en condamnant PATRUNO Sylvain à payer à la société M.G.R. International la somme de cinq millions de francs (5.000.000 F) C.F.A. à titre de dommages et intérêts;
Que l'appelant soutient cependant que la demande de la société était irrecevable pour autorité de la chose jugée car la décision d'injonction de délivrer ou de restituer est passée en force de chose jugée et la cause ne peut être portée à nouveau devant une juridiction
Attendu en effet que les articles 16 et 27 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution édictent qu'en l'absence d'opposition dans les délais impartis par la loi, la décision portant injonction de délivrer ou de restituer produit tous les effets d'une décision contradictoire et n'est pas susceptible d'appel;
Qu'en outre, l'article 26 du même acte précise que l'opposition contre la décision d'injonction de délivrer ou de restituer est soumise aux dispositions des articles 9 à 15 du présent acte uniforme tandis que l'article 9 de l'acte suscité stipule en son alinéa 1 que « le recours ordinaire de la décision d'injonction de payer est l'opposition »;
Que dans le cas d'espèce, PATRUNO Sylvain a introduit une requête tendant à la délivrance ou à la restitution de biens meubles dont un tracteur et une remorque et a obtenu une décision le 20 juillet 1999;
Que cette ordonnance d'injonction de restituer ou de délivrer a été notifiée à la société M.G.R. International le 28 juillet 1999 qui n'a pas daigné former opposition;
Que l'ordonnance a donc été revêtue de la formule exécutoire le 03 novembre 1999 et, de ce fait, est devenue définitive;
Que l'opposition étant la seule voie de recours ordinaire contre l'ordonnance de délivrer ou de restituer, dès lors que celle‑ci n'a pas été exercée, la décision est définitivement revêtue de l'autorité de la chose jugée (Civ, 1ère, 14 juin 1966, Bull. civ, n° 363; Com. 14 novembre 1989, JCP. 1990 . IV. 14);
Que dans le même ordre d'idées, la jurisprudence a admis ce principe même dans des cas de décisions irrégulières et à propos d'une ordonnance rendue par un auxiliaire de justice (Perrot, obs. RTD civ. 1976. 403);
Que de tout ce qui précède, c'est en violation flagrante des dispositions de la loi que le premier juge a déclaré l'action en résolution de vente introduite par la société M.G.R. International recevable et a, en conséquence, prononcé la résolution de la vente et condamné PATRUNO Sylvain;
Qu'il échet en conséquence d'annuler le jugement critiqué sur la base de l'exception tirée de l'autorité de la chose jugée;
Attendu qu'il est de doctrine et de jurisprudence constantes que toutes formes de contestations et d'irrégularités relatives à une ordonnance d'injonction de payer, de délivrer ou de restituer doivent être soulevées dans le cadre de l'opposition;
Que les délais impartis pour former opposition dans la présente cause étant expirés, la société M.G.R. International est forclos et toute demande tendant à la remise en cause de la décision d'injonction de délivrer ou de restituer est irrecevable
Attendu que par demande reconventionnelle, PATRUNO Sylvain sollicite la condamnation de la société M.G.R. International à lui payer la somme de cinq millions (5.000.000) de Francs C.F.A. pour procédure abusive et vexatoire;
Que cependant, il s'abstient de préciser à la Cour ce en quoi la procédure est abusive et vexatoire et la nature du préjudice qui lui est causé
Que de ce fait, il convient de l'en débouter comme étant mal fondée.
Attendu qu'aux termes de l'article 394 alinéa 1er du code de procédure civile, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens de l'instance; que la société M.G.R. International ayant succombé, il y a lieu de la condamner aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de PATRUNO Sylvain recevable pour avoir été interjeté dans les formes et délais prévus par la loi;
AU FOND
Annule le jugement querellé pour violation du principe de l'autorité de la chose jugée
Statuant à nouveau,
Rejette la demande de M.G.R. International pour forclusion
Reçoit par contre PATRUNO Sylvain en sa demande reconventionnelle portant sur l'allocation de dommages et intérêts, mais l'en déboute comme étant mal fondée.
Condamne M.G.R. International aux dépens.