J-04-370
VOIES D'EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE DES CREANCES – SAISIE‑ARRET SUR LES COMPTES DU DEBITEUR – NON CONTESTATION DE LA CREANCE – PAIEMENT INTEGRAL – DECISION ORDONNANT MAINLEVEE DE LA SAISIE‑ARRET – APPEL.
EXCEPTION DE NULLITE POUR VICE DE FORME – ACTE D'APPEL – MENTIONS – ARTICLE 81 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – OMISSIONS – NULLITE DES ACTES POUR VICE DE FORME – ARTICLES 139 ET 140 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – ABSENCE DE NULLITE SANS GRIEF – ABSENCE DE PREUVE DU PREJUDICE – RECEVABILITE DE L'APPEL (Oui).
PREUVE DU PAIEMENT – ARTICLE 1315 CODE CIVIL BURKINABE – REÇUS DE PAIEMENT – PAIEMENT DE LA TOTALITE DE LA CREANCE PRINCIPALE (NON) – DECLARATION SUR L'HONNEUR – TITRE AUTHENTIQUE AVEC POUVOIR LIBERATOIRE (NON) – INFIRMEATION DU JUGEMENT ATTAQUE.
Aux termes de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit le prouver; et réciproquement, celui qui se prétend libéré d'une obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. Dès lors, débiteur qui ne conteste ni le principe de la créance, ni son montant, mais qui soutient avoir payé l'intégralité de la dite créance et même au-delà, doit apporter les preuves du paiement de la totalité de la créance principale. A défaut, il y a lieu de le condamner au paiement pour le reliquat de la créance.
Article 81, 139 ET 140 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 1315 CODE CIVIL BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 03 du 17 janvier 2003, OUEDRAOGO Sibiri Joseph c/ OUBDA Emmanuel).
LA COUR,
Vu le jugement n° 368 du 28 avril 1999;
Vu l'acte d'appel en date du 18 mai 1999;
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
FAITS – PROCEBURE ‑ PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Le 22 mai 1998, OUEDRAOGO Sibiri Joseph faisait pratiquer une saisie‑arrêt sur les comptes de OUBDA Emmanuel en vertu d'une ordonnance n° 178/98 du 31 mars 1998 pour avoir paiement de la somme de 800.000 FCFA;
La saisie fut suivie d'une dénonciation au débiteur, d'une contre dénonciation aux tiers saisis et d'une assignation en validité le 28 mai 1998 pour obtenir paiement de la créance suscitée;
Au soutien de son action, OUEDRAOGO Sibiri Joseph fait valoir que OUBDA Emmanuel lui reste redevable de la somme de 800.000 F sur un prêt d'un montant de 2.000.000 F comme l'atteste la reconnaissance de dette du 02 août 1995; que deux chèques d'un montant de 400.000 F chacun et émis respectivement les 27 avril 1996 et 27 mai 1996 sont revenus impayés pour défaut de provision et que toutes les tentatives entreprises pour recouvrer son dû s'étant avérées vaines, il sollicite que OUBDA Emmanuel soit condamné au paiement de la somme principale, outre les frais et les intérêts et que la saisie soit validée;
En réplique, OUBDA Emmanuel conteste le bien fondé de la demande et produit des pièces pour justifier le paiement;
A l'audience du 28 avril 1999 du tribunal de grande instance de Ouagadougou, séant en matière civile et commerciale, OUEDRAOGO Sibiri Joseph a été débouté de sa demande comme étant mal fondée;
– a été condamné à payer la somme de 25.000 F représentant un trop perçu au défendeur OUBDA Emmanuel,
– a ordonné la mainlevée de la saisie‑arrêt pratiquée en date du 22 mai 1998;
– a ordonné la restitution des deux chèques garantissant le paiement des 800.000 F;
– a débouté OUBDA Emmanuel de sa demande de dommages et intérêts.
Contre cette décision, OUEDRAOGO Sibiri Joseph relevait appel le 18 mai 1999 pour voir infirmer le jugement attaqué.
Il précise qu'un premier jugement du tribunal de grande instance de Ouagadougou, intervenu le 21 mai 1996 et enregistré sous le numéro 333, avait condamné OUBDA Emmanuel à lui payer la somme de 1.600.000 F représentant le montant de quatre (4) chèques émis respectivement les 27/12/95, 27/01/96, 27/02/96 et 27/03/96 et revenus impayés pour défaut de provision; que la somme de 800.000 F, objet de la présente décision dont appel, concerne uniquement le montant de deux (2) autres chèques, émis les 27 avril 1996 et 27 mai 1996 et qui demeurent impayés.
En réplique, OUBDA Emmanuel qui ne conteste pas les créances, soutient s'être libéré totalement et déclare avoir même payé au delà du montant dû; In limine litis, il allègue l'irrecevabilité de l'appel de OUEDRAOGO Sibiri Joseph pour violation des dispositions des articles 81 et 139 du code de procédure civile.
Enfin, il demande à titre reconventionnel que OUEDRAOGO Sibiri Joseph soit condamné à lui payer à titre de dommages et intérêts la somme de 600.000 F en réparation du préjudice subi du fait de la saisie‑arrêt sur son compte bancaire ayant occasionné la non prise en charge de la scolarité de ses enfants.
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Chambre civile et commerciale de la Cour d'appel du 04 juin 1999 et renvoyée à la mise en état;
Qu'après l'ordonnance de clôture intervenue le 10 juillet 2001, l'affaire fut enrôlée pour l'audience du 19 octobre 2001 et renvoyée successivement à celles des 21 décembre 2001, 1er février 2002, 1er mars 2002, 5 avril 2002 puis au 17 mai 2002, date à laquelle elle fut mise en délibérée pour l'audience du 4 juin 2002; qu'à cette date, le délibéré fut rabattu et le dossier renvoyé à l'audience du 4 octobre 2002, ensuite à celle du 18 octobre 2002 et enfin à celle du 15 novembre 2002 où l'affaire fut retenue, débattue et mise en délibérée pour arrêt être rendu le 17 janvier 2003;
Qu'advenue cette date, la Cour vidant son délibéré a statué en ces termes;
EN LA FORME
Sur l'exception de nullité
Attendu que s'il est constant qu'il résulte de l'acte d'appel l'omission des mentions telles la nationalité, la profession, la date et le lieu de naissance comme cela est prévu à l'article 81 du code de procédure civile, il est également constant aux termes de l'article 140 du même code que même « lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public, la nullité ne peut être prononcée qu'à charge par celui qui l'invoque de prouver le préjudice que lui cause l'irrégularité »;
Que dans le cas d'espèce, OUBDA Emmanuel n'apporte nullement la preuve de ce que les omissions ci‑dessus citées lui causent ou lui ont causé un quelconque préjudice;
Qu'il s'en suit donc que l'exception d'irrecevabilité soulevée sur le fondement des articles 81 et 139 du code de procédure civile doit être rejetée;
Attendu que l'appel de OUEDRAOGO Sibiri Joseph est intervenu dans les formes et délais prévus par la loi; qu'il y a lieu en conséquence de le déclarer recevable.
AU FOND
Attendu qu'aux termes de l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit le prouver; et réciproquement, celui qui se prétend libéré d'une obligation doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation;
Qu'en l'espèce, OUBDA Emmanuel qui ne conteste ni le principe de la créance, ni son montant, soutient avoir payé l'intégralité de la dite créance et même au delà;
Que pour se justifier, il produit des reçus de paiement aux débats; Mais attendu qu'il résulte des débats et des pièces versées au dossier, notamment celles devant justifier le paiement que tous les paiements effectués par chèques bancaires d'un montant total de 793.000 F environ l'ont été au cours de la période comprise entre août 1995 et mars 1996, soit bien avant les rejets des deux chèques concernés pour absence de provision respectivement le 8 mai 1996 pour le chèque n° 476‑977, émis le 27 avril 1996 et le 27 mai 1996 pour le chèque n° 476.978, émis le 27 mai 1996; exception faite d'un paiement effectué le 19 août 1996 par chèque d'un montant de 8.000 F;
Qu'en outre, les versements effectués entre les mains de l'huissier de justice l'ont été essentiellement au cours des mois d'octobre à novembre 1997 pour un montant de 220.000 F et une somme d'un montant de 40.000 F, perçue courant 1998 pour règlement des frais de procédure;
Que cependant, il convient de souligner que le jugement dont appel a été rendu le 28 avril 1999 sur opposition de OUBDA Emmanuel à la suite d'une saisie‑arrêt pratiquée le 22 mai 1998 en vertu d'une ordonnance n° 178/98 du 31 mars 1998 pour avoir paiement de la somme de 800.000 F;
Qu'il s'en suit que les sommes déjà perçues n'ont rien à voir avec le recouvrement des 800.000 F sollicité en vertu de l'ordonnance d'injonction de payer suscitée;
Que de surcroît, le montant total des sommes perçues par OUEDRAOGO Sibiri Joseph lui‑même et par le biais du ministère d'huissier de justice qui s'élève à 1.013.000 F environ est loin de la totalité de la créance principale qui est de 2.000.000 F,
Attendu enfin que « la déclaration sur l'honneur » de MINOUNGOU Pascal en date du 22 septembre 1998 selon laquelle le montant total des remboursements effectués par OUBDA Emmanuel s'élève à ce jour à 1.800.000 FCFA ne saurait à elle seule, en dehors de tous autres éléments et circonstances tangibles, être considérée comme étant une preuve matérielle irréfutable du paiement de la créance, puisque n'étant pas un titre authentique avec un pouvoir libératoire;
Que de tout ce qui précède, il convient d'infirmer le jugement attaqué et condamner OUBDA Emmanuel à payer à OUEDRAOGO Sibiri Joseph la somme de 800.000 F conformément aux dispositions de l'article 1315 alinéa 2 du code civil.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort
EN LA FORME
Rejette l'exception de nullité de l'acte d'appel soulevée par l'intimé,
AU FOND
Infirme le jugement attaqué.
Condamne OUBDA Emmanuel à payer à OUEDRAOGO Sibiri Joseph la somme de huit cent mille (800.000 F) francs en principal, outre les intérêts et les frais.
Condamne OUBDA Emmanuel aux dépens.