J-04-373
VOIES D'EXECUTION – SAISIE CONSERVATOIRE – SAISIE CONSERVATOIRE DE VEHICULES DU DEBITEUR – ORDONNANCE DE REFERE – MAINLEVEE DE LA SAISIE CONSERVATOIRE (OUI) – VALIDITION DE LA SAISIE ET CONVERSION PAR UN JUGEMENT – APPEL – ARTICLE 536 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE – APPEL RECEVABLE.
OPERATIONS DE SAISIE – PROCES-VERBAL DE SAISIE – ARTICLE 64 AUPSRVE – ABSENCE DE CERTAINES MENTIONS – NULLITE DU PROCES-VERBAL DE SAISIE (OUI) – ANNULATION DU JUGEMENT ATTAQUE.
MONTANT DE LA CREANCE – VENTE – FORMATION – ARTICLE 1583 CODE CIVIL BURKINABE – ACCORD SUR LA CHOSE ET LE PRIX – VALIDITE DU CONTRAT DE VENTE (NON) – RESTITUTION DU PRIX DE LA CHOSE (OUI).
DEMANDE RECONVENTIONNELLE – MONTANT DU PREJUDICE SUBI – ARTICLE 1315 CODE CIVIL BURKINABE – INSUFFISANCE DE PREUVES – DEMANDE PARTIELLEMENT FONDEE.
L'article 64 AUPSRVE prescrit que le procès-verbal de saisie contient, à peine de nullité, certaines mention dont notamment :
– la mention des noms, prénoms et domicile du saisi et du saisissant ou s'il s'agit de personnes morales, dénomination et siège social;
– la mention en caractères très apparents que les biens saisis sont indisponibles, qu'ils sont placés sous la garde du débiteur ou d'un tiers désigné d'accord parties ou à défaut par la juridiction statuant en matière d'urgence...
C'est en violation donc de cette prescription que le premier juge a validé la saisie conservatoire qui avait au préalable été déclaré nulle par le juge des référés.
Article 64 AUPSRVE
Article 536 CODE DE PROCEDURE CIVILE BURKINABE
Article 1583 CODE CIVIL BURKINABE
Article 1315 CODE CIVIL BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 50 du 06 juin 2003, WANGRAOUA Donacien c/ COMPAORE Georges).
LA COUR,
Vu le jugement n° 579 du 29 mai 2002;
Vu l'acte d'appel en date du 20 juin 2002;
Vu les pièces jointes;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Et après en avoir délibéré conformément à la loi;
Par exploit d'huissier de justice en date du 28 mars 2001, COMPAORE Georges, coordonnateur du Projet Medicus Médium Mundi Andalucia représenté par COMPAORE W. Evelyne Blandine son épouse, laquelle a élu domicile en l'étude de Me SOGODOGO Moussa, avocat à la Cour, a assigné WANGRAOUA Donacien vendeur de véhicules domicilié à Ouagadougou secteur 2 devant le tribunal de céans à l'effet de :
– Le voir condamner à lui payer la somme de 1.536.000 F;
– Voir déclarer bonne et valable la saisie conservatoire pratiquée sur ses biens et la transformer en saisie exécution;
– Voir assortir le jugement à intervenir de l'exécution provisoire et le condamner aux dépens.
Il exposait qu'il était créancier de WANGRAOUA Donacien de la somme sus indiquée, représentant le prix d'achat d'un véhicule. Que le débiteur ne s'étant pas exécuté il a fait pratiqué une saisie conservatoire sur ses biens meubles et demande sa validation.
Le défendeur par la plume de son conseil Me TARNAGDA soulevait in limine litis la nullité du procès-verbal de saisie avec enlèvement immédiat pour violation de l'article 64 de l'acte uniforme Ohada portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution que le procès-verbal ne contient pas mention du domicile du saisissant qu'il n'y a pas eu non plus élection de domicile pour le saisissant qui réside à Fada N'Gourma. Qu'enfin les biens saisis devraient être placés sous la garde du débiteur ou d'un tiers désigné d'accord parties ou à défaut devant la juridiction statuant en matière d'urgence. Qu'au fond il demande la mainlevée de la saisie pratiquée pour violation de l'article 54 de l'acte susvisé. Reconventionnellement il demandait que son adversaire soit condamné à lui payer le reliquat du prix de la voiture, soit une somme de 500.000 F, outre 40.000 F pour l'achat de pneus, 230.000 F pour les frais de transit, 150.000 F représentant les frais de route, 16.000 F comme frais d'assurance, 1.500.000 F à titre de dommages intérêts et des intérêts de droit à compter du jour de sa demande.
Par jugement en date du 29 mai 2002, le tribunal de grande instance de Ouagadougou, statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort condamnait WANGRAOUA Donacien à payer à COMPAORE Georges la somme de 1.536.100 F, déclarait bonne et valable la saisie conservatoire pratiquée et la convertissait en saisie exécution, déboutait WANGRAOUA Donacien de ses demandes reconventionnelles et le condamnait aux dépens.
Contre cette décision WANGRAOUA Donacien interjetait appel le 20 juin 2002.
Attendu que l'appelant fait grief au tribunal d'avoir statué sur la validité de la saisie conservatoire alors qu'une ordonnance de référé la déclarait nulle et ordonnait sa mainlevée. Qu'il était dès lors impossible de la convertir en saisie exécution. Que l'article 54 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées et des voies d'exécution édicte que toute personne dont la créance n'est pas contestée peut solliciter l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire, que la créance invoquée doit paraître fondée en son principe. Or en l'espèce, il n'existe aucun droit de créance entre les deux parties.
Qu'à l'arrivée du véhicule, COMPAORE Evelyne a fait procéder à une vérification par un mécanicien. Qu'après leur course, elle a remis le véhicule à son voisin à charge pour lui de le lui rapporter. Que devant une attitude aussi déloyale, il a fait des propositions qui sont restées sans suite.
Qu'en réalité, la somme de 1.500.000 F constitue une avance remise au concluant par COMPAORE Georges par l'intermédiaire de ILBOUDO Kiswendsida Karim pour l'achat d'un véhicule Mercedes 190 Diesel climatisé sans autre précision. Que l'autre partie ne saurait alléguer un droit de créance que s'il n'avait pas reçu livraison du véhicule.
Que devant le premier juge, il s'est porté demandeur reconventionnel et a sollicité la condamnation de COMPAORE Georges à lui payer le reliquat dû sur le prix d'achat qui est de 500.000 F outre le remboursement du prix d'achat à Lomé de quatre pneus neufs d'une valeur de 40.000 F
– des frais de transit de 230.000 F
– des frais de route de 150.000 F
– des frais d'assurance 16.000 F
Soit un total de 936.000 F outre des dommages intérêts de 1.500 000 F.
Qu'il sollicite par conséquent :
– voir déclarer l'appel recevable;
– annuler ou infirmer le jugement querellé pour cause de nullité du procès-verbal de saisie;
– Renvoyer COMPAORE Georges à se pourvoir ainsi qu'il avisera.
Très subsidiairement Au fond :
– réformer le jugement entrepris;
– dire et juger que la créance alléguée n'a aucune réalité;
– condamner COMPAORE Georges à lui payer la somme de 936 000 F et des dommages intérêts de 1.500.000 F, le débouter de ses demandes.
COMPAORE Georges par la plume de son conseil argue que les juges au fond ne sont nullement liés par les ordonnances de référé sensées régler des situations provisoires. Que pour valider la saisie, ils ont souverainement constaté la réticence injustifiée du débiteur et le péril dans le recouvrement de la créance.
Que là créance du concluant est certaine, liquide, exigible. Qu'il est incontestable que le vendeur a reçu de lui la somme de 1.500.000 F représentant l'acompte du prix d'achat du véhicule. Qu'il avait en outre exigé et obtenu la somme de 36.100 F pour disait-il procéder au vidange soit la somme totale de 1.536.000 F. Que la saisie ainsi pratiquée est fondée.
Qu'en ce qui concerne la demande reconventionnelle de WANGRAOUA Donacien, les sommes dont la partie adverse réclame paiement n'ont pas profité au concluant. Qu'il ne saurait être tenu d'assurer le remboursement. Que le préjudice allégué par la partie adverse n'étant pas réellement subi aucune faute ne pouvant lui être reproché qu'il y a lieu de le débouter.
Sur la recevabilité de l'appel
Attendu que l'appel interjeté le 20 juin 2002 contre le jugement contradictoire rendu le 29 mai 2002 est recevable pour avoir été interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi en l'occurrence l'article 536 du code de procédure civile.
Sur la nullité de la saisie conservatoire
Attendu que par ordonnance n° 120 du 09 octobre 2001, le juge des référés déclarait le procès-verbal de saisie conservatoire avec enlèvement immédiat en date du 28 mars 2001 nul.
Ordonnait la mainlevée de la saisie conservatoire pratiquée sur les véhicules :
– BMW 32 immatriculé 11 P 4050 BF;
– Mercedes 190 D immatriculé M.T 151 T.K.;
Motif pris de la violation des articles 64‑2 et 64‑6 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution.
Qu'en effet, les articles prescrivent à peine de nullité :
– la mention des noms, prénoms et domicile du saisi et du saisissant ou s'il s'agit de personnes morales, dénomination et siège social;
– la mention en caractères très apparents que les biens saisis sont indisponibles, qu'ils sont placés sous la garde du débiteur ou d'un tiers désigné d'accord parties ou à défaut par la juridiction statuant en matière d'urgence...
Attendu que c'est à tort que le premier juge a validé la saisie qui avait au préalable été déclaré nulle.
Sur le montant de la créance
Attendu qu'aux termes de l'article 1583 du code civil, la vente est parfaite dès qu'on s'accorde sur la chose et le prix.
Que dans le cas d'espèce, les caractéristiques du véhicule opposent les parties. Que COMPAORE Georges clame avoir commandé un véhicule comportant les options suivantes : climatisation, intérieur cuir, poste à bord, coque en parfait état, que l'autre soutient le contraire, que par conséquent il ne saurait y avoir vente.
Attendu qu'il est constant qu'une remise de la somme totale de 1.536.000 F a été effectuée entre les mains de WANGRAOUA Donacien. Qu'il est donc tenu de restituer la dite somme.
Sur la demande reconventionnelle
Attendu que WANGRAOUA Donacien sollicite la somme de 936.000 F représentant le montant total des frais exposés pour l'acheminement du véhicule du port de Lomé à Ouagadougou, plus la somme de 1.500.000 F à titre de dommages intérêts.
Attendu que l'article 1315 du code civil dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.
Attendu que la demande de WANGRAOUA n'est pas suffisamment prouvée. Que la Cour dispose suffisamment d'éléments pour ramener le montant du préjudice subi à de justes proportions soit la somme de 300.000 F.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et commerciale et en dernier ressort.
EN LA FORME
Déclare l'appel de WANGRAOUA Donacien recevable.
AU FOND
Annule le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré la saisie conservatoire bonne et valable et l'a converti en saisie exécution.
Dit qu'aucun contrat de vente n'a été valablement formé entre les parties.
En conséquence, condamne WANGRAOUA Donacien à payer à COMPAORE D. Georges la somme de 1.536.000 F.
Déclare la saisie conservatoire pratiquée le 28 mars 2001 nulle et de nul effet.
Reçoit WANGRAOUA Donacien en ses demandes reconventionnelles et les déclare partiellement fondées.
Condamne en conséquence COMPAORE Georges à lui payer la somme de 300.000 F à titre de dommages‑intérêts.
Déboute WANGRAOUA Donacien du surplus de sa demande.
Fait masse des dépens qui seront supportés de moitié par chaque partie.