J-04-375
Voir Ohadata J-04-374
PROCEDURES COLLECTIVES D'APUREMENT DU PASSIF – LIQUIDATION DES BIENS – REQUETE DES CREANCIERS AUX FINS DE LIQUIDATION DES BIENS – DECISION D'OUVERTURE DE LA LIQUIDATION DES BIENS – APPEL.
EXCEPTION D'IRRECEVABILITE – ACTE D'APPEL – SIGNIFICATION DIRECTEMENT AUX INTIMES – DEFAUT DE QUALITE DES INTIMES – ARTICLES 52 ET 53 AUPCAP – DESSAISISSEMENT DU DEBITEUR ET NON DES CREANCIERS – NULLITE DE L'ACTE D'APPEL (NON).
LIQUIDATION DE LA SOCIETE – SUBSISTANCE DE LA PERSONNALITE MORALE – ARTICLE 205 AUSCGIE – PERTE DE LA PERSONNALITE MORALE (NON) – ADMINISTRATEUR ET ASSOCIE – CAPACITE ET INTERET POUR AGIR (OUI) – RECEVABILITE DE L'APPEL (OUI).
SYNDIC – INTERVENTION VOLONTAIRE DU SYNDIC – ORGANE LEGALEMENT PREVU – RECEVABILITE (OUI).
CONSTITUTION D'AVOCAT – AVOCATS DES DEUX PARTIES EXERCANT DANS UN MEME CABINET – VIOLATION DU SECRET PROFESSIONNEL – INDEPENDANCE DE L'AVOCAT – DEFAUT DE PREUVE – IRREGULARITE DE LA CONSTITUTION (NON).
EXCEPTION D'INCOMPETENCE DE LA COUR – CONVENTION DES PARTIES – CLAUSE COMPROMISSOIRE – NON OPPOSABLE AUX TIERS.
LIQUIDATION DES BIENS – CONDITIONS DE FOND ET DE FORME – SITUATION FINANCIERE DESESPEREE DE L'ENTREPRISE – NON‑PAIEMENT D'UNE OU DE PLUSIEURS CREANCES CERTAINES, LIQUIDES ET EXIGIBLES – DEFAUT DE PREUVE DE L'ETAT DE CESSATION DES PAIEMENTS DE L'ENTREPRISE – CESSATION DES PAIEMENTS (NON).
CARACTERES DES CREANCES PRODUITES A L'APPUI DES ASSIGNATIONS EN LIQUIDATION – CONDITIONS CUMULATIVES – ARTICLE 28 AUPCAP – CARACTERE CERTAIN, LIQUIDE ET EXIGIBLE – CONTENU DE L'ASSIGNATION – NECESSITE D'UN TITRE EXECUTOIRE – CONDITIONS NON REUNIES (OUI).
ANNULATION DU JUGEMENT QUERELLE – REJET DE LA REQUETE DES CREANCIERS AUX FINS DE LIQUIDATION DES BIENS.
La situation cessation des paiements se traduit matériellement par l'installation d'une situation financière désespérée de l'entreprise, caractérisée par le non‑paiement d'une ou de plusieurs créances certaines, liquides et exigibles. Les éléments sur lesquels se basent les créanciers pour déclarer que la société est en état de cessation des paiements effectif ont déjà été discutés dans l'arrêt n° 84 du 21 novembre 2003 (Voir Ohadata J-04-140) qui avait conclu « qu'au regard de l'analyse de la situation financière de la société qui avait été fournie, la preuve de la cessation de paiement n'était pas établie; qu'il existe, certes, des difficultés mais non insurmontables et qui, en aucun cas, ne s'apparentent à un état de cessation de paiement... »
Aucun élément nouveau n'a été rapporté par les créanciers pour prouver, ni une situation de cessation des paiements ouverte, ni celle de la cessation des paiements déguisée, 'il s'en suit qu'aucune preuve de l'état de cessation des paiements de la société n'a été rapportée pour permettre à la juridiction compétente de la constater. C'est donc à tort que le premier juge a prononcé la liquidation des biens de la société sur ce fondement.
S'agissant des créances produites à l'appui des assignations en liquidation, il résulte de l'article 28 AUPCAP que le créancier qui entend recourir à l'ouverture d'une procédure collective doit tout d'abord établir de manière certaine sa créance et ensuite le défaut de paiement en présentant le titre qui consacre la créance; qu'il s'agit tout d'abord d'une créance certaine, c'est à dire une créance qui existe et qui ne soufre pas de contestation sérieuse; ensuite, la créance doit être liquide, c'est à dire, qu'elle doit être déterminée quant à son montant; enfin, elle doit être exigible, c'est à dire, à terme ou échue, le tout consacré par un titre.
Article 25 AUPCAP
Article 28 AUPCAP
Article 52 AUPCAP
Article 53 AUPCAP
Article 55 AUPSRVE
Article 205 AUSCGIE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 52 du 16 avril 2004, SOSACO c/ KABORE Henriette (BTM) & Bureau d'Assistance Technique et Economique (BATEC-­SARL) & Entreprise DAR‑ES‑Salam).
LA COUR,
Vu le jugement n° 45/04 du 18 février 2004;
Vu l'appel de la Société Sahel Compagnie (SOSACO) du 19 février 2004;
Vu les pièces du dossier;
Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Faits ‑ Procédure ‑ Prétentions et moyens des Parties
La Société Sahel Compagnie, en abrégé SOSACO, est une société anonyme de droit burkinabè créée courant année 2000 et qui a bénéficié d'un prêt de 10 millions de dollars US dont les premières échéances arrivent en 2005.
Ayant entrepris des investissements en vue de la promotion des ses activités commerciales, SOSACO a donc confié au Bureau d'Assistance Technique et Economique (BATEC‑SARL) suivant convention en date du 19 janvier 2001 la mission partielle de maîtrise d'oeuvre d'un complexe hôtelier à Ziniaré‑Laongo (Burkina Faso), à madame Henriette KABORE, directrice générale de BTM, la construction d'un centre commercial à Ouaga 2000 et de deux (02) résidences duplex également à Ouaga 2000 suivant conventions des 7 et 18 juin 2001. Enfin à l'entreprise DAR‑ES­SALAM, l'exécution de divers travaux au sein du complexe hôtelier de la Paix Agades (République du Niger).
Les 24 et 26 novembre 2003, madame Henriette KABORE, directrice générale de BTM, le Bureau d'Assistance Technique et Economique (BATEC‑SARL) et l'entreprise DAR‑ES‑SALAM, représentée par son directeur général Aboubacar Amma ont, par exploits d'huissier de justice, donné assignation à la Société Sahel Compagnie d'avoir à comparaître par devant le tribunal de grande instance de Ouagadougou pour voir :
– constater la cessation des paiements de la Société Sahel Compagnie S.A;
– en conséquence, prononcer sa liquidation des biens;
– fixer provisoirement la date de cessation des paiements;
– nommer tel juge commissaire et tels syndics qu'il plaira au tribunal de désigner;
– ordonner l'accomplissement de toutes les formalités prescrites par l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif du traité Ohada;
– ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir nonobstant appel ou opposition.
La SOSACO conclut à l'irrecevabilité de l'action des demandeurs pour non-respect de l'enquête préliminaire préalable telle que prévue par les articles 29 et 22 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif et au motif que la créance de BTM et de B.A.T.E.C‑SARL n'est ni certaine, ni liquide et exigible.
Elle conclut enfin au débouté des demandeurs de toutes leurs prétentions.
A l'audience du 18 février 2004, le tribunal rendait la décision suivante :
Statuant publiquement après débats en chambre de conseil, en matière commerciale et en premier ressort :
– Constate que la société sahel compagnie S.A remplit les conditions d'ouverture de la procédure collective, conformément aux articles 25, 28 et 33 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives et d'apurement du passif;
– En conséquence prononce la liquidation des biens de la dite société;
– Fixe provisoirement la date de cessation de paiement au 1er août 2003;
– Nomme SOU Sami Evariste, juge au siège du tribunal de grande instance de Ouagadougou, juge commissaire;
– Désigne le cabinet d'audit financier et d'expertise comptable KOMBOÏGO et associés (CAFEC‑KA), maître SANON Sidi, maître SOME Mathieu, avocats à la Cour en qualité de syndics liquidateurs;
– Dit que présent le jugement sera mentionné sans délai au registre du commerce et du crédit mobilier (RCCM) du tribunal de grande instance de Ouagadougou;
– Dit qu'il sera publié dans un journal d'annonces légales du Burkina Faso à la diligence du greffier en chef du tribunal de grande instance de Ouagadougou;
– Ordonne l'exécution provisoire conformément à l'article 217 de l'acte uniforme sur l'organisation des procédures collectives et d'apurement du passif;
– Réserve les dépens.
Contre cette décision, la Société Sahel Compagnie relevait appel le 19 février 2004 pour voir annuler le jugement entrepris.
Elle demande tout d'abord à la Cour de rejeter l'intervention volontaire du syndic, représenté par maître SANON Sidi au motif qu'elle bénéficie d'un sursis à l'exécution du jugement attaqué et que par conséquent le syndic ne saurait valablement agir. Ensuite, que maître SOGODOGO Moussa n'aurait pas reçu mandat de BATEC pour agir dans le cadre de cette procédure et la constitution de maître SOME Bannitouo aux côtés de l'Entreprise, DAR‑ES‑SALAM est irrégulière parce que contraire aux dispositions des articles 60 et 61 de la loi n° 016‑2000/AN portant réglementation de la profession d'avocat et relatives à la déontologie du corps en ce que celui‑ci est dans le même cabinet que maître SOME B. Mathieu, conseil de la SOSACO.
Enfin, la Société Sahel Compagnie soulève l'exception d'incompétence de la Cour au motif qu'une clause compromissoire insérée dans la convention qui lie les parties précise qu'en cas de survenance d'un litige, celui‑ci sera réglé à l'amiable et à défaut par la procédure d'arbitrage.
En réplique, les conseils des créanciers font valoir que tout ce qui a été soulevé par la SOSACO constitue des demandes nouvelles qui doivent être rejetées conformément aux dispositions de l'article 545 du code de procédure civile. A leur tour, ils soulèvent l'exception d'irrecevabilité de l'acte d'appel au motif qu'il a été signifié directement aux intimés alors que ceux‑ci sont dessaisis au profit du syndic (art 53 et 216 A.U); qu'il y a donc irrégularité de fond entraînant la nullité de l'acte.
Au fond, la Société Sahel Compagnie conclut à la nullité de l'action de BTM, de BATEC et de l'entreprise DAR‑ES‑SALAM au motif que les conditions de forme et de fonds de la créance telles que décrites par l'article 28 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif ne sont pas remplies et que la cessation des paiements de la SOSACO n'a pas été prouvée par les demandeurs à la liquidation des biens.
Que s'agissant de la créance de BTM, précise‑t‑elle à titre d'exemple, les travaux ne sont pas achevés tel qu'il en résulte du constat d'huissier; qu'aux termes du contrat, les paiements s'effectuent au fur et à mesure de l'avancement des travaux après décompte; qu'elle a déjà perçu plus de 900.000.000 F sur un total de 1.250.000.000 F prévu à l'achèvement complet des travaux alors que le dernier décompte n'a pas été fait par rapport aux travaux déjà réalisés; d'où la créance ne revêt pas un caractère certain.
Que s'agissant de l'exigibilité de toutes les créances, il y a la clause compromissoire insérée dans la convention et qui exige le règlement de tout litige à l'amiable et à défaut par la procédure d'arbitrage.
Qu'il s'agit là de la condition sine qua non de l'exigibilité de la créance.
Qu'enfin, aucune des créances dont se prévalent les créanciers n'est constatée par un titre.
Pour terminer, la SOSACO indique qu'il ne résulte ni des débats, ni de l'acte d'assignation la preuve de la cessation des paiements ou d'un surendettement de la société qui se distingue d'ailleurs du refus de paiement et qui, enfin, doit sous-tendre la liquidation.
Quant aux intimés, ils concluent à la confirmation du jugement attaqué au motif que la Société Sahel Compagnie est en état de cessation de paiement effectif et qui est prouvé par les pièces versées au dossier, notamment la lettre du 14 novembre 2000 et le dépôt du bilan par le directeur général de la société; que de surcroît le montant des créances est estimé à 1 milliard six cent millions alors que le capital social de SOSACO est de 500.000.000 FCFA;
Qu'en outre, leurs créances sont compromises car il y a près d'une année qu'ils poursuivent le règlement en vain.
Enfin, maître Moussa SOGODOGO précise que son client, BATEC, souhaite le recouvrement de sa créance mais pas dans le cadre d'une procédure de liquidation;
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel du 19 mars 2004 et renvoyée à l'audience en chambre de conseil du 1er avril 2004, date à laquelle elle a été retenue; que les débats ont porté essentiellement sur les exceptions diverses soulevées par les parties et qui furent vidées à l'audience publique du 02 avril 2004
Qu'à cette date, l'affaire a été débattue sur le fond et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 16 avril 2004 où la Cour a statué en ces termes;
DISCUSSION
EN LA FORME
Sur l'exception d'irrecevabilité de l'appel
Attendu que les intimés soulèvent l'exception d'irrecevabilité de l'acte d'appel au motif qu'il a été signifié directement aux créanciers alors qu'aux termes de l'article 53 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif, il y a dessaisissement au profit du syndic dès la dissolution de la société; d'où un défaut de qualité constitutif d'une irrégularité de fond au sens des articles 141 et 145 du code de procédure civile entraînant ainsi la nullité de l'acte d'appel;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions des articles 52 et 53 de l'acte uniforme suscité que le dessaisissement s'opère à l'encontre du débiteur essentiellement et non à l'encontre des créanciers qui peuvent toujours agir aux côtés du syndic; qu'en outre, ce dessaisissement n'est pas total car le débiteur conserve des possibilités d'actions individuelles dans certains cas;
Que par ailleurs et, conformément aux dispositions de l'article 205 de l'acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du groupement d'intérêt économique, le président du conseil d'administration, dans le cas d'espèce, en sa double qualité d'administrateur, représentant la SOSACO et d'associé, a pleinement qualité et intérêt pour agir dans le sens de sauvegarder les intérêts de ladite société;
Que partant, la loi n'est nullement violée et l'appel interjeté dans les formes et délais prescrits par la loi est recevable
Sur l'intervention volontaire du syndic
Attendu que la Société Sahel Compagnie conclut au rejet de l'intervention du syndic, représenté par maître SANON Sidi au motif qu'il a été ordonné le sursis à l'exécution du jugement attaqué suivant ordonnance n° 03/2004 et que par conséquent, le syndic ne saurait valablement agir;
Mais attendu qu'en l'espèce, le problème qui se pose n'est pas celui de l'exécution de la décision juridictionnelle prononçant la liquidation des biens de la SOSACO, mais plutôt celui de l'existence d'organes légalement prévus dans le cadre de la présente procédure; que ces organes, bien que matérialisés par le jugement entrepris, existent parce que prévus d'avance par la loi et devant jouer un rôle bien déterminé;
Que représentant la masse des créanciers dans la présente procédure, le syndic se doit de défendre les intérêts de ceux‑ci indépendamment du fait que l'exécution intrinsèque du jugement, c'est à dire, la liquidation des biens de la SOSACO, ait été différée;
Qu'il y a lieu en conséquence de recevoir l'intervention volontaire du syndic;
Sur l'irrégularité de constitution de maître SOME
Attendu qu'il est fait grief au jugement attaqué d'avoir accueilli la constitution de maître SOME Bannitouo aux côtés de l'entreprise DAR­ES‑SALAM au mépris des dispositions des articles 60 et 61 de la loi n° 016‑2000/AN portant réglementation de la profession d'avocat;
Que cependant, il ne résulte ni des débats, ni des pièces du dossier la preuve de ce que cette constitution présente un risque de violation du secret professionnel ou celui de la perte de l'indépendance de l'avocat concerné;
Que faute de rapporter cette preuve, il y a lieu de maintenir la constitution de maître SOME Bannitouo car le simple fait d'exercer dans un même cabinet ne constitue pas en lui seul un obstacle majeur;
Sur l'exception d'incompétence de LA COUR
Attendu qu'il est reproché également au premier juge d'avoir déclaré la juridiction compétente pour connaître de l'affaire alors qu'il existe une clause compromissoire insérée dans la convention des parties et qui précise qu'en cas de litige, celui‑ci sera réglé à l'amiable et à défaut par la procédure d'arbitrage;
Qu'en raison de l'existence donc de cette clause, la Cour est incompétente pour connaître du litige;
Mais attendu que s'il est constant que dans les conventions, la volonté des parties est essentielle et crée la loi, il n'en demeure pas moins que les effets de ce consensualisme ne sont pas opposables aux tiers;
Qu'en effet, l'objet de cette procédure est d'organiser de façon collective toutes les procédures de règlement en vue de l'apurement du passif de l'entreprise; c'est pourquoi tous les créanciers sont constitués en une masse, représentée par le syndic; en outre, la procédure revêt un caractère d'ordre public, d'où l'intervention de plus en plus croissant du ministère public et aussi la possibilité offerte à la juridiction compétente de se saisir d'office; que dès lors, la clause compromissoire qui lie uniquement les parties à la convention ne saurait prospérer dans le cas d'espèce;
Attendu que de tout ce qui précède, il convient de déclarer l'appel de la Société Sahel Compagnie (SOSACO) recevable ainsi que le syndic en son intervention volontaire;
Qu'il y a lieu également de recevoir toutes les parties en leurs diverses exceptions soulevées, mais les rejeter comme étant mal fondées
AU FOND
Attendu qu'il est reproché au jugement attaqué d'avoir prononcé la liquidation des biens de la Société Sahel Compagnie (SOSACO) alors que les conditions de fond et de forme de la procédure ne sont pas réunies, notamment la cessation des paiements et les caractères de la créance
Que s'agissant de la cessation des paiements, l'article 25 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif la définit comme étant la situation dans laquelle le débiteur se trouve dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible; que cette situation se traduit matériellement par l'installation d'une situation financière désespérée de l'entreprise, caractérisée par le non‑paiement d'une ou de plusieurs créances certaines, liquides et exigibles
Qu'en l'espèce, les éléments sur lesquels se basent les créanciers pour déclarer que la SOSACO est en état de cessation des paiements effectif, à savoir la lettre du 14 novembre 2000 et le dépôt de bilan par le directeur général de la société, ont déjà été discutés dans l'arrêt n° 84 du 21 novembre 2003 et qui avait conclu « qu'au regard de l'analyse de la situation financière de la société qui avait été fournie, la preuve de la cessation de paiement n'était pas établie; qu'il existe, certes, des difficultés mais non insurmontables et qui, en aucun cas, ne s'apparentent à un état de cessation de paiement... »;
Qu'aucun élément nouveau n'a été rapporté par les créanciers de la SOSACO pour prouver, ni une situation de cessation des paiements ouverte, ni celle de la cessation des paiements déguisée; qu'il s'en suit qu'aucune preuve de l'état de cessation des paiements de la Société Sahel Compagnie n'a été rapportée pour permettre à la juridiction compétente de la constater; que c'est donc à tort que le premier juge a prononcé la liquidation des biens de la SOSACO sur ce fondement;
Attendu que s'agissant des créances produites à l'appui des assignations en liquidation de la SOSACO, il résulte des dispositions de l'article 28 de l'acte uniforme portant organisation des procédures collectives d'apurement du passif que : « la procédure peut être ouverte sur la demande d'un créancier, quelle que soit la nature de sa créance, pourvu qu'elle soit certaine, liquide et exigible. L'assignation du créancier doit préciser la nature et le montant de sa créance et viser le titre sur lequel elle se fonde »;
Qu'il en résulte que le créancier qui entend recourir à l'ouverture d'une procédure collective doit tout d'abord établir de manière certaine sa créance et ensuite le défaut de paiement en présentant le titre qui consacre la créance; qu'il s'agit tout d'abord d'une créance certaine, c'est à dire une créance qui existe et qui ne soufre pas de contestation sérieuse; ensuite, la créance doit être liquide, c'est à dire, qu'elle doit être déterminée quant à son montant; enfin, elle doit être exigible, c'est à dire, à terme ou échue, le tout consacré par un titre;
Attendu qu'en l'espèce, les créances produits par les intimés ne remplissent pas ces conditions cumulatives; qu'en effet, il ressort des débats et des pièces du dossier que l'entreprise KABORE Henriette BTM par exemple n'a pas achevé les travaux, objet de la convention signée entre elle et la SOSACO; que par ailleurs, le montant précis de la créance devrait être arrêté après décompte en fonction des travaux déjà exécutés avant paiement; d'où le caractère contestable de la créance;
Que de surcroît, une clause compromissoire a été insérée dans la convention qui lie les deux parties et indiquant que tout litige, né à l'occasion de l'exécution du contrat, doit être soumis à un règlement amiable et à défaut par la procédure d'arbitrage;
Que ce faisant, la créance ne devient exigible qu'après le règlement amiable ou une sentence arbitrale conformément à la volonté commune des parties exprimée à travers la clause compromissoire;
Qu'il en est de même pour BATEC qui sollicite d'ailleurs que la Cour lui donne acte de son désistement d'instance;
Attendu enfin que le traité Ohada exige que la créance soit consacrée par un titre sans autres précisions; que cependant, les caractères exigés de la créance, à savoir une créance certaine, liquide et exigible, fait croire qu'il s'agit bien des titres énumérés par l'article 55 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution qui fait état de créances non contestées et échues tel un chèque ou un quelconque effet de commerce revenu impayé et revêtu du protêt, ou encore, des loyers etc...; que la matière qui vise entre autres le recouvrement de créances et les caractères de la créance commandent que soient visés les titres prévus à l'article 55 de l'acte uniforme suscité;
Que dans le cas d'espèce, la créance de l'entreprise DAR‑ES‑SALAM qui n'a pas du tout été déterminée puisque l'on parle tantôt de 88.000.000 F, tantôt de 4.000.000 F n'est pas consacrée par un titre conforme;
Attendu au total que la loi a été violée par les premiers juges dans leur décision, les conditions de fond et de forme pour l'ouverture de la procédure collective n'étant pas remplies;
Qu'il y a lieu en conséquence d'annuler la décision attaquée et de rejeter l'action des sociétés BTM et DAR‑ES‑SALAM.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement après débats en chambre de conseil et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de la Société Sahel Compagnie (SOSACO) recevable;
Reçoit le syndic en son intervention volontaire;
Reçoit les parties en leurs diverses exceptions soulevées mais les rejette comme étant mal fondées;
AU FOND
Donne acte à BATEC de son désistement d'instance;
Annule le jugement querellé;
Statuant à nouveau, rejette l'action des sociétés BTM et DAR‑ES‑SALAM;
Condamne BATEC, BTM et DAR‑ES­SALAM aux dépens.