J-04-377
PROCEDURES SIMPLIFIEES DE RECOUVREMENT – PROCEDURE SIMPLIFIEE TENDANT A LA RESTITUTION D'UN BIEN MEUBLE DETERMINE – ORDONNANCE PORTANT INJONCTION DE RESTITUER – OPPOSITION – DECISION PORTANT INJONCTION DE RESTITUER – APPEL – RECEVABILITE DE L'APPEL (OUI).
SOCIETE DE FAIT – PREUVE – ARTICLE 1834 ALINEA 1er CODE CIVIL BURKINABE – NECESSITE D'UN ECRIT – DEFAUT DE PREUVE DE L'APPELANT.
PROPRIETE DES BIENS – CHARGE DE LA PREUVE – ARTICLE 1315 CODE CIVIL BURKINABE – DEFAUT DE PREUVE DE L'APPELANT – REÇUS D'ACHAT DE L'INTIME – CONFIRMATION DU JUGEMENT QUERELLE – DEMANDE RECONVENTIONNELLE BIEN FONDEE.
Aux termes de l'article 1315 alinéa 1er du code civil, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ». D'autre part, selon la doctrine, il appartient au créancier ou demandeur de rapporter la preuve de l'existence de l'obligation dont il entend obtenir l'exécution. Enfin la jurisprudence est également unanime pour reconnaître que « l'incertitude et le doute subsistant à la suite de la production d'une preuve doivent nécessairement être retenus au détriment de celui qui avait la charge de la preuve ».
Faute pour les appelants d'apporter la preuve matérielle que les meubles leur appartiennent, leur opposition à restituer ne peut prospérer.
Article 1315 CODE CIVIL BURKINABE
Article 1834 ALINEA 1er CODE CIVIL BURKINABE
(COUR D'APPEL DE OUAGADOUGOU (BURKINA FASO), Chambre civile et commerciale, Arrêt n° 03 du 16 janvier 2004, BOUGOUMA Moumouni & BOUGOUMA Fati c/ OUEDRAOGO T François).
LA COUR,
– Vu le jugement n° 1009 du 04 décembre 2002;
– Vu l'appel de BOUGOUMA Moumouni du 18 décembre 2002;
– Vu les pièces du dossier;
– Ouï les parties en leurs conclusions, fins, moyens et observations;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
Faits ‑ Procédure ‑ Prétention et moyens des parties
Le 02 mai 2002, monsieur BOUGOUMA Moumouni et Dame BOUGOUMA Fati formaient opposition par exploit d'huissier de justice contre une ordonnance rendue au profit de monsieur OUEDRAOGO T François, enjoignant aux premiers de lui restituer le matériel composé de :
– un (01) photocopieur CANON NP 1550, n° série UBN 16003
– un (01) réfrigérateur de marque THOMSON
– une (01) glacière
– une (01) rame de papier
– un (01) tube à encre.
A l'audience du 04 décembre 2002, le tribunal de grande instance de Ouagadougou déclarait BOUGOUMA Moumouni et BOUGOUMA Fati recevables en leur opposition, mais la disait mal fondée et les condamnait en conséquence à restituer à OUEDRAOGO T. François le matériel ci‑dessus cité.
Contre cette décision, monsieur BOUGOUMA Moumouni et Mademoiselle BOUGOUMA Fati ont relevé appel le 18 décembre 2002 pour voir infirmer le jugement querellé.
Ils expliquent que OUEDRAOGO T. François et BOUGOUMA Fati vivaient en concubinage à Yako et que c'est ainsi qu'ils mirent en commun leurs moyens pour l'ouverture d'un secrétariat public et d'un télécentre.
Que Fati approchait alors son frère, BOUGOUMA Moumouni, électro‑mécanographe pour solliciter son service; que ce dernier leur vendit ainsi une photocopieuse d'une valeur de 800.000 F à crédit et mit à leur disposition une machine à écrire.
Que quant à elle, BOUGOUMA Fati, elle remettait à son concubin une somme de 50.000 F, une glacière et des fournitures d'une valeur de 260.000 F;
BOUGOUMA Fati sollicite donc l'annulation de l'ordonnance portant injonction de restituer et demande reconventionnellement la restitution de ses effets personnels confisqués par OUEDRAOGO T. François dont la liste est jointe.
En réplique, OUEDRAOGO T. François conclut à la confirmation pure et simple du jugement attaqué et au rejet de la demande de BOUGOUMA Fati comme étant mal fondée puisque c'est l'appelante elle‑même qui serait partie laissant ses effets personnels.
Il ajoute ne s'être jamais opposé à ce qu'elle entre en possession de ses habits.
Attendu que l'affaire a été enrôlée pour l'audience publique ordinaire de la Cour d'appel du 17 janvier 2003 et renvoyée au rôle général pour la mise en état;
Que l'ordonnance de clôture étant intervenu le 16 juillet 2003, l'affaire était appelée à nouveau à l'audience du 1er août 2003, date à laquelle elle a été retenue, débattue et mise en délibéré pour arrêt être rendu le 05 décembre 2003;
Qu'à cette date, le délibéré a été prorogé au 16 janvier 2004 où la Cour le vidant, a statué en ces termes;
DISCUSSION
EN LA FORME
Attendu que monsieur BOUGOUMA Moumouni et BOUGOUMA Fati ont interjeté appel le 18 décembre 2002 contre une jugement rendu contradictoirement le 04 décembre 2002; que cet appel remplit toutes les conditions de forme et de délai prévues par la loi et mérite d'être déclaré recevable.
AU FOND
Attendu qu'aux termes de l'article 1315 alinéa 1er du code civil, « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver »;
Que la doctrine vient de préciser qu'il appartient au créancier ou demandeur de rapporter la preuve de l'existence de l'obligation dont il entend obtenir l'exécution;
Que la jurisprudence est également unanime pour reconnaître que « l'incertitude et le doute subsistant à la suite de la production d'une preuve doivent nécessairement être retenus au détriment de celui qui avait la charge de la preuve » ( Civ. 1ère, 25 fév. 1997, Gaz.Pal. 1997. 1. 274; Soc. 31 janv. 1962, Bull. civ. IV, n° 105, p. 85, 15 oct. 1964, Bull. Civ. IV, n° 678, p. 556);
Que dans le cas d'espèce, les appelants allèguent qu'une société de fait aurait existée entre les parties, en l'occurrence entre BOUGOUMA Fati et OUEDRAOGO T. François sans pour autant en rapporter la moindre preuve conformément aux dispositions de l'alinéa 1er de l'article 1834 du code civil qui précise que : « toutes sociétés doivent être rédigées par écrit, lorsque leur objet est d'une valeur de plus de cinq cent francs »;
Qu'en ce qui concerne également leur opposition à restituer les biens, objet de l'ordonnance d'injonction de payer, les appelants font valoir que lesdits biens leur appartiennent sans en rapporter la preuve matérielle; qu'ils se contentent uniquement de simples affirmations et allégations laissant subsister le doute et l'incertitude;
Attendu par contre que OUEDRAOGO T. François a versé aux débats les reçus d'achat du photocopieur et du réfrigérateur ainsi que d'autres écrits prouvant qu'il a versé de l'argent entre les mains de BOUGOUMA Moumouni et de NOUNGOU H. Moussa, commerçant à Yako;
Qu'au regard de ce qui précède, monsieur OUEDRAOGO T. François a suffisamment rapporté la preuve de sa propriété sur lesdits meubles par la production des documents ci‑dessus cités;
Attendu par ailleurs que BOUGOUMA Fati sollicite que soit ordonné la restitution de ses effets personnels, détenus par OUEDRAOGO T. François suivant la liste en annexe dont :
– 01 natte à deux places
– 01 thermos
– 03 sacs contenant des habits, des chaussures
– 01 matelas à deux places, des plats
– 04 marmites avec couvercle dont 02 n° 1, 01 n° 2 et 01 n° 3
– 02 mortiers et 02 pilons
– 01 moustiquaire à deux places (blanche)
– 01 petit lit pour enfant avec un matelas (son matelas)
– 02 chaises en bois
– 02 sceaux en plastique
– 01 sceau en « zinc »
– 02 plats en aluminium
– 02 bancs métalliques
– 01 cuisinière à gaz
– 03 tabourets
– 01 savonnière
– 01 petite table
– 02 fourneaux dont 01 à bois et 01 à charbon
– 01 barrique à eau, 01 vitre pour les gâteaux, 02 chèvres
– 02 rideaux, 01 boîte de peinture de 30 kg vide
– 02 bouilloires, 03 vases de nuit
– 01 réchaud à pétrole, 01 couverture verte, une couverture blanche, des cuillères, des gobelets en plastique
– 02 petits fer
Attendu que OUEDRAOGO T. François ne conteste pas détenir des effets personnels de BOUGOUMA Fati; qu'il précise ne s'être jamais opposé à ce qu'elle entre en possession de ses effets, mais sollicite que sa demande soit rejetée comme étant mal fondée car elle serait partie d'elle‑même laissant lesdits effets;
Attendu que la demande reconventionnelle de BOUGOUMA Fati est régulière en la forme et juste au fond; qu'il y a lieu de déclarer sa demande recevable et y faire droit.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en dernier ressort;
EN LA FORME
Déclare l'appel de BOUGOUMA Moumouni et de BOUGOUMA Fati recevable;
AU FOND
Confirme le jugement querellé en ce qu'il a condamné les appelants à restituer le matériel suivant : 01 photocopieur, 01 réfrigérateur, 01 glacière, 01 rame de papier, et 01 tube d'encre à OUEDRAOGO T. François;
Reçoit BOUGOUMA Fati en sa demande reconventionnelle;
La déclare régulière et bien fondée; en conséquence, condamne OUEDRAOGO T. François à lui restituer le matériel énuméré dans les motifs de la décision et dont la liste est jointe en annexe;
Fait masse des dépens qui seront supportés de moitié par chaque partie.
Observation
S'agissant de l'existence d'une société de fait, on peut s'étonner que le juge n'ait pas fait application des dispositions des articles 864 à 868 AUSCGIE relatives aux sociétés de fait.