J-04-390
RECOUVREMENT DE CREANCE – INJONCTION DE PAYER – CREANCE – CAUSE – INEXISTENCE DE LIEN CONTRACTUEL – EXISTENCE D'ENGAGEMENT RESULTANT DE L'EMISSION OU DE L'ACCEPTATION D'UN EFFET DE COMMERCE OU D'UN CHEQUE (NON) – NULLITE DES ORDONNANCES (Oui).
Les ordonnances d'injonction de payer doivent être déclarées nulles dès lors qu'il n'existe aucun lien contractuel entre les parties et que l'engagement invoqué ne trouve sa cause ni dans l'émission ou dans l'acceptation d'un effet de commerce ou d'un chèque.
Article 2 AUPSRVE
Article 4 AUPSRVE
(TRIBUNAL DE 1 ERE INSTANCE DE DALOA JUGEMENT N°02 DU 09 JANVIER 2004 Affaire : D. ET AUTRES c/ E. ET 20 AUTRES, Le Juris Ohada, n° 3/2004, juillet-octobre 2004, p. 49, note BROU KOUAKOU MATHURIN).
LE TRIBUNAL,
Oui les parties en leurs demandes, moyens, fins et conclusions;
Vu les pièces du dossier de la procédure;
Après en avoir délibéré conformément à la loi;
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
Par ordonnances N° 454/2003 N° 456/2003 et 459/2003 toutes rendues le 20 Octobre 2003 par le président du Tribunal de ce siège, Madame D. et Messieurs D. , O. ET A. DANIEL ont été condamnés à payer, en ce qui concerne la première nommée la somme de deux millions de francs et en ce qui concerne les trois autres la somme de cinq cent mille francs chacun à un collectif de 283 personnes, créancières de l'entre prise "ETOILE DU SUD"
Lesdites ordonnances leur ont été respectivement signifiées par exploit en date du 11 Novembre 2003, de Maître ElOUO EHOUlODOU, Huissier de justice à Daloa;
Suivant exploits en date des 24 et 26 Novembre 2003 de Maître BAMBA AMADOU, DAH BAGUI LAMBERT et BOLI BI TRA MICHEL, Huissiers de Justice à Daloa, les susnommés ont formé opposition des susdites ordonnances;
Au soutien de leur opposition, ils expliquent qu'ils ont emprunté de l'argent avec une entreprise dénommée "Etoile du Sud" et ayant pour directeur Z.;
Qu'avant d'avoir pu rembourser leur dettes, le directeur de la susdite entreprise a disparu sans laisser la moindre trace;
Qu'étant dans cette situation, ils ont reçu signification d'une ordonnance d'injonction de payer les condamnant au payement de diverses sommes d'argent au profit d'un collectif de personnes se disant créancières de la société "Etoile du Sud";
Que cependant, in limine litis, l'action des prétendues créanciers est entachée de plusieurs vices de forme;
Que, notamment, d'une part la requête aux fins d'injonction de payer ne précisant pas l'identité desdits créanciers, en leur profession, ni leur domicile, la demande, la demande en payement doit être déclarée irrecevable conformément aux dispositions de l'article 4, alinéa 2 de l'Acte uniforme du traité OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution;
Que, d'autre part, l'acte de signification de l'ordonnance de condamnation doit être déclarée nulle conformément aux dispositions de l'article 122 du code de procédure civile pour non observation des formes prescrites par l'article 246 du susdit code;
Qu'enfin, les demandeurs à la procédure d'injonction de payer n'étant ni leur créanciers, ni les mandataires de la société "étoile du Sud", n'ont pas la qualité pour agir contre les débiteurs de ladite société et doivent en conséquence être déclarés irrecevables
en leur action;
Au fond, les demandeurs font valoir que l'ordonnance portant injonction de payer n'étant pas conforme aux dispositions de l'article 2 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d'exécution doit être déclarée nulle.
Les défendeurs comparaissant par le canal de leur conseil ont demandé la jonction des différentes procédures introduites par les exploits sus évoqués
SUR CE EN LA FORME
SUR LA RECEV ABILITE DES OPPOSITIONS
Attendu que les oppositions ont été introduites dans les formes et délais prévus par les dispositions du code (sic) OHADA relatives aux procédures simplifiées de recouvrement;
Qu'il y a lieu en conséquence de la déclarer recevable;
SUR LES JONCTIONS DES PROCEDURES
Attendu qu'en égard aux rapports qui existent entre les différentes procédures introduites par les exploits sus évoqués il paraît nécessaire, dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, qu'une seule décision soit rendue sur toutes les demandes;
Qu'il y a lieu en conséquence d'ordonner la jonction desdites procédures pour cause de connexité, conformément aux dispositions de l'article 117 du code de procédure civile;
SUR LA NULLITE DES EXPLOITS DE SIGNIFICATION DES DIFFERENTES ORDONNANCES ENTREPRISES :
Attendu que les demandeurs invoquent la nullité des exploits de signification des ordonnances n° 454/2003 et 459/2003 les condamnations aux payement de diverses sommes au profit des défendeurs, au motif que lesdits exploits ne contiennent pas toutes les mentions requises par l'article 246 du code de procédure civile;
Qu'a l'examen de ladite pièce, il apparaît en effet que certains des demandeurs sont désignés uniquement par leur nom;
Qu'en outre, la majorité d'entre eux est désignée dans ledit acte par la mention "et les autres " de sorte qu'il n'y a aucune précision sur leur identité;
Mais attendu que si ces irrégularités constituent une violation des dispositions de l'article 246 sus évoqué, les demandeurs ne rapportent pas la preuve du préjudice qu'elles leur causent;
Qu'il y a lieu en conséquence de rejeter leur moyen pris du chef de la nullité des susdits exploits;
AU FOND
Attendu que les demandeurs plaident la nullité des ordonnances portant leur condamnation au payement de diverses sommes d'argent au profit des demandeurs;
Qu'ils font valoir que 1a procédure simplifiée de recouvrement prévue par le traité (sic) OHADA a été abusivement utilisée, les conditions d'introduction de ladite procédure prévues par l'article 2 de l'acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement n'étant pas réunies en l'espèce;
Attendu en effet, que la procédure susdite ne peut, aux termes de l'article 2 sus évoqué, être introduite que lorsque la créance a une cause contractuelle ou que lorsque l'engagement résulte de l'émission ou de l'acceptation de tout effet de commerce ou d'un chèque;
Qu'en l'espèce il n'existe aucun lien contractuel entre les demandeurs et les défendeurs;
Que l'engagement invoqué par les défendeurs contre les demandeurs ne trouve sa cause dans l'émission ou dans !'acceptation ni d'un effet de commerce, ni d'un chèque;
Qu'il apparaît ainsi que les ordonnances no454/2003, 455/2003 : 456/2003 et 459/2003 ont été rendues en violation des dispositions de !'article 2 sus évoqué;
Qu'il y a lieu en conséquence de déclarer nulles les dites ordonnances;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière civile et en premier ressort;
Déclare D. , née BEATICE, D. ,O. et A. DANIEL recevables en leur opposition;
Les y dit bien fondés;
Annule les ordonnances no454/2003, 455/2003, 456/2003 et 459/2003 du 20 octobre 2003 les condamnant au payement de diverses sommes d'argent au profit des défendeurs;
Président M. N'DRI Koffi Justin
Note
Ce jugement rappelle fort utilement les causes de la créance dont le recouvrement est poursuivi sur la base de la procédure d'injonction de payer.
En effet, la procédure d'injonction de payer ne peut être introduite que lorsque la créance a une cause contractuelle ou lorsqu'il s'agit des effets de commerce et de chèque (pour plus de détails :voir, Anne Marie ASSI ESSO et N'diaw DIOUF, OHADA, Recouvrement des créances, éd Bruylant, n° 14 et 55 page 14; BROU KOUAKOU Mathurin, La procédure d'injonction de payer en Droit Ivoirien : l'apport du Droit OHADA; in revue de la recherche juridique,/Droit prospectif, 2001-2 page 1143 et suivants)
Ces conditions relatives au maintien de la créance sont bien établies en jurisprudence (CCJA, arrêt n° 1 du 30 janvier 2003, Le Juris OHADA n° 1/2003 page 19 ( Ohadata J-03-109)
BROU Kouakou Mathurin