J-04-433
VOIES D’EXECUTION – JUGE DES REFERES – SAISINE EN VERTU DE L’ARTICLE
49 AUPSRVE – DEMANDE DE DISCONTINUATION DES POURSUITES – DEMANDE D’ANNULATION DES PROCES VERBAUX DE SAISIE ET MAINLEVEE DE LA SAISIE – MELANGE DES COMPETENCES – REFUS DU JUGE DES REFERES DE CHOISIR ENTRE LES COMPETENCES – RENVOI DU DEMANDEUR A MIEUX SE POURVOIR.
Le demandeur sollicitait la rétractation d’une ordonnance, la discontinuation des poursuites et la mainlevée d’une saisie attribution qui avait été pratiquée contre elle par son créancier.
Le juge a considéré qu’il y avait un mélange de compétences, car il avait été saisi, en même temps, comme juge des référés pour rétracter l’ordonnance, examiner la discontinuation des poursuites, et comme juge du contentieux de l’exécution pour annuler les procès-verbaux de saisie attribution et en ordonner la mainlevée.
Estimant qu’il ne lui appartenait pas de déterminer à quel titre il avait été saisi, il s’est alors déclaré incompétent ratione materiae et a invité le demandeur à mieux se pourvoir.
(Tribunal de première instance de Douala, Ordonnance de référé N° 737 du 26 mars 2002, Société Matlec ETI c/ KENTSA Alain Magloire).
– Ordonnance de contentieux d’exécution.
L’an deux mil deux et le vingt-six du mois de mars;
Devant Nous, Monsieur SOCKENG Roger, Juge au Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, République du Cameroun, tenant audience des référés en matière d’urgence, en lieu et place du titulaire, empêché, en son Cabinet sis au Palais de Justice de ladite ville; Juge;
– Assisté de Maître EPOMBO Roger; Greffier;
VU l’exploit en date du 14 mars 2002 du ministère de Me Gabriel KAMWA, Huissier de justice à Douala, non encore enregistré, mais qui le sera en temps utile, en vertu de l’ordonnance N° 1434 rendue le 12 mars 2002 par Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de céans, la Société MATLEC ETI Sarl, dont le siège social est à Douala – BP 4500, agissant poursuites et diligences de son représentant légal et ayant pour Conseil Me VOUKENG Michel Janvier, Avocat – BP 4500, a fait donner assignation à :
1°- Monsieur KENTSA Alain Magloire, demeurant à Douala;
2°- Maître BALENG MAAH Célestin, Huissier de justice à Douala, ayant tous pour Conseils Mes TANKEU et NOUBISSI, Avocats à Douala;
d’avoir à se trouver et comparaître le 14 mars 2002 à 13 heures, à l’audience, et par-devant Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Bonanjo statuant en matière de référé, en son Cabinet sis au Palais de Justice de Douala Bonanjo, pour, est-il dit dans cet exploit :
Attendu que la demanderesse a attrait les défendeurs devant le Tribunal de céans, aux fins de mainlevée de saisie et discontinuation;
A l’appel de la cause, toutes les parties ont été entendues en leurs moyens, fins et conclusions, et après quelques renvois utiles, elle a été mise en délibéré le 26 mars 2002 à 13 heures, pour ordonnance être rendue;
Advenue cette audience, la juridiction de céans, par l’organe de son juge, et conformément à la loi, a rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
Nous, Juge délégué par le Président du Tribunal en matière d’urgence :
Attendu que par exploit en date du 14 mars 2002, non encore enregistré, mais qui le sera en temps utile, du ministère de Maître Gabriel KAMWA, Huissier de justice à Douala, et agissant en vertu d’une ordonnance N° 1434 rendue le 12 mars 2002 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo;
La Société MATLEC ETI Sarl, dont le siège social est à Douala – BP 4500, agissant poursuites et diligences de son représentant légal et ayant pour Conseil Me VOUKENG Michel Janvier, Avocat au Barreau du Cameroun, a fait donner assignation en référé d’heure à heure, à :
1°- KENTSA Alain Magloire, demeurant à Douala et ayant élu domicile à l’Etude de Me TANKEU et Me NOUBISSI, Avocats à Douala;
2°- Maître BALENG MAAH Célestin, Huissier de justice à Douala, pour s’entendre :
– Ordonner la rétractation de l’ordonnance N° 1353 du 21 février 2002;
– Annuler les procès-verbaux de saisie attribution du 05 mars 2002 et de dénonciation du 08 mars 2002;
– Ordonner la mainlevée de ladite saisie;
– Ordonner la discontinuation des poursuites sur la base du jugement N° 321 du 10 septembre 2001, jusqu’à ce qu’il soit visiblement statué sur les mérites de l’appel du 18 septembre 2001;
– Condamner les défendeurs aux dépens dont distraction au profit de Me VOUKENG, Avocat aux offres de droit;
Attendu qu’au soutien de sa demande, la Société MATLEC ETI Sarl, par le biais de son Conseil, expose qu’elle a été victime de plusieurs saisies attributions abusives sur ses comptes dans les établissements bancaires de la place, du fait du sieur KENTSA Alain;
Que la dernière, dont mainlevée est sollicitée, a été pratiquée les 05 et 06 mars 2002 et est truffée d’irrégularités;
Attendu qu’en réaction, le sieur KENTSA Alain, par le biais de ses Conseils, Mes TANKEU et NOUBISSI, soulève l’incompétence du juge des référés pour ordonner une mainlevée de saisie attribution;
Attendu qu’il n’est point besoin d’entrer dans les problèmes de fond pour constater que le demandeur nous a saisi comme juge des référés pour rétracter une ordonnance, examiner la discontinuation des poursuites, ensuite, comme juge du contentieux de l’exécution, pour annuler les procès-verbaux de saisie et donner mainlevée de ladite saisie;
Qu’il y a là un mélange de compétences matérielles relevant des juges distincts ou d’un même juge « janus », siégeant à plusieurs titres, mais jamais à la fois, et à la suite d’une demande unique;
Que face à ce mélange de compétences matérielles, il ne nous appartient pas de choisir à quel titre nous entendons statuer, sans dénaturer l’objet de la demande;
Qu’il est judicieux de nous déclarer incompétent ratione materiae;
Attendu que la partie qui succombe doit payer les dépens;
Qu’il convient de condamner la Société MATLEC ETI Sarl aux dépens;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties;
– Constatons que le demandeur nous a saisi pour la rétractation de l’ordonnance et la mainlevée de la saisie attribution;
– Constatons qu’il ne nous appartient pas de déterminer à quel titre statuer face à ce mélange de compétences matérielles relevant tantôt du juge des référés, tantôt du juge du contentieux de l’exécution;
EN CONSEQUENCE :
– Nous déclarons incompétent ratione materiae et renvoyons le demandeur à mieux se pourvoir;
– Condamnons le demandeur aux dépens dont distraction au profit de Maîtres TANKEU et NOUBISSI, Avocats aux offres de droit;
Ainsi jugé et prononcé en audience publique les mêmes jour, mois et an que dessus;
En foi de quoi, la présente ordonnance a été signée par le Juge, qui l’a rendue, et le Greffier.
Observations de Joseph ISSA-SAYEGH, Professeur, Consultant
Cette décision est étonnante. A supposer que le juge des référés soit compétent pour examiner les deux sortes de demandes dont il est saisi, il doit, sous peine de déni de justice, se prononcer sur l’une et l’autre, sous réserve d’examiner l’une puis l’autre, dans l’ordre logique et procédural dans lequel elles se présentent ou doivent être traitées.