J-04-434
VOIES D’EXECUTION – ASTREINTE – MESURE D’EXECUTION FORCEE – COMPETENCE DU JUGE DE L’URGENCE (Oui) – RESISTANCE DU TIERS-SAISI – AVIS A TIERS-DETENTEUR – MAUVAISE FOI (Non).
I - L’astreinte, qui est un moyen de coercition consistant à condamner le débiteur à payer au créancier une somme d’argent déterminée en général par jour ou par mois de retard tant qu’il refusera d’exécuter son obligation, est une mesure d’exécution forcée, donc, de la compétence du juge de contentieux. Dès lors, L’article 69 AUPSRVE fait du juge de l’urgence seul compétent à connaître des difficultés de l’exécution et par conséquent du fond, l’exception d’incompétence est non fondée.
II - Il n’y a pas mauvaise foi du tiers-saisi alors que la résistance invoquée pour solliciter la liquidation de l’astreinte trouve son fondement dans une cause juridiquement établie, notamment la saisie suivant avis à tiers-détenteur.
Article 49 AUPSRVE
(Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo – Ordonnance de contentieux d’exécution du 29 avril 2003, Ets PANTAMI représentés par ALHADJI MOHAMADOU PANTAMI c/ SOCOPAO CAMEROUN-SDV).
Affaire : Ets PANTAMI, représentés par Alhadji Mohamadou PANTAMI
(Me Taffou DJIMOUN)
contre
SOCOPAO CAMEROUN
SDV (Maître VIAZZI)
(Mes MOULOUWE et TCHANGA)
Nature de l’affaire : Modification de la nature de l’astreinte.
Faits : Les Etablissements PANTAMI sollicitaient du juge, la transformation de l’astreinte non comminatoire prononcée à l’égard de la SOCOPAD SDV, en une astreinte comminatoire. Il était question de modifier la nature de l’astreinte prononcée contre la SOCOPAO, parce que celle-ci, selon les demandeurs, manifestait une résistance abusive.
Solution du juge : Le juge des référés, en l’espèce, agissant en vertu de l’article 49 de l’Acte Uniforme OHADA sur les voies d’exécution, a estimé que cette résistance était fondée juridiquement. En effet, la faute revenait à la société de recouvrement des créances, qui avait servi à la SOCOPAO, un avis à tiers détenteur, qui n’était pas de nature à faire exécuter une astreinte, mais la suspendait plutôt. Il n’y avait donc aucune mauvaise foi de la part de la SOCOPAO.
– Ordonnance de contentieux d’exécution.
L’an deux mil trois et le vingt-neuf du mois d’avril;
Par-devant Nous, Monsieur SOCKENG Roger, Juge au Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, République du Cameroun, tenant audience en lieu et place du titulaire, empêché, en son Cabinet sis au Palais de Justice de ladite ville; Juge;
– Assisté de Maître EKOULE Max; Greffier;
VU l’exploit en date du 31 décembre 2002 du ministère de Maître TOWA Pierre, Huissier de justice près la Cour d’Appel du Littoral, non encore enregistré, mais qui le sera en temps utile, en vertu de l’ordonnance N° 410 rendue le 31 décembre 2002 par Monsieur le Président du Tribunal de céans, statuant en matière de contentieux d’exécution, les Ets PANTAMI, représentés par Monsieur Alhadji Mohamadou PANTAMI – BP 138 à Garoua, ayant pour Conseil Me Taffou DJIMOUN, Avocat au Barreau du Cameroun, ont fait donner assignation à :
1°- SOCOPAO CAMEROUN SDV, dont le siège social est à Douala – BP 215, représentée par ses dirigeants légaux, ayant pour Conseils Mes MOULOUWE et TCHANGA, Avocats à Douala;
VU un autre exploit daté du 11 décembre 2001 du ministère de Maître TCHAHA Jean-Marie, Huissier de justice à Douala, non encore enregistré, mais qui le sera en temps utile, les Ets PANTAMI, représentés par Monsieur Alhadji Mohamadou PANTAMI – BP 138 à Garoua, ayant pour Conseil Me Taffou DJIMOUN, Avocat à Douala, ont fait donner assignation à :
1°- SOCOPAO CAMEROUN SDV, dont le siège social est à Douala – BP 215, représentée par ses dirigeants légaux, d’avoir à se trouver et comparaître devant le Tribunal de céans, statuant en matière de référé et siégeant dans la salle ordinaire de ladite ville, pour, est-il dit dans cet exploit :
Attendu que les demandeurs ont attrait les défendeurs devant le Tribunal de céans, aux fins de modification de la nature de l’astreinte et transformation d’une astreinte comminatoire en astreinte non comminatoire;
A l’appel de la cause, toutes les parties ont été entendues en leurs moyens de défense, fins et conclusions, et après quelques renvois utiles, une ordonnance avant dire droit a été rendue par la juridiction de céans, conformément à la loi, en date du 26 janvier 2003, pour cause de connexité et dont le dispositif est ainsi conçu :
NOUS, Juge de l’urgence chargé du contentieux de l’exécution;
Statuant publiquement, contradictoirement à l’égard des parties et par ADD;
– Ordonnons la jonction des procédures N° 774/DR/2001-02 et N° 238/AGF/2002-2003 du rôle de ce jour, pour cause de connexité;
– Réservons les dépens;
De nouveau remise au rôle, cette cause a connu quelques renvois utiles, et après quelques moyens de défense, fins et conclusions, elle a été remise en délibéré le 04 avril 2003, et à cette date, ce délibéré a été prorogé au 16 avril 2003 à 14 heures, puis au 22 avril 2003 à 14 heures, et enfin, au 29 avril 2003 à 14 heures, pour ordonnance être rendue;
Advenue cette audience, la juridiction de céans, par l’organe de son juge, a, conformément à la loi, rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
NOUS, Juge de l’urgence chargé du contentieux de l’exécution;
Attendu que par exploits en date des 11 et 31 décembre 2001 de Maîtres TCHAHA Jean-Marie et TOWA Pierre, Huissiers de justice à Douala, les Ets PANTAMI, représentés par sieur Alhadji PANTAMI, ayant pour Conseil Me Laurent TAFFOU DJIMOUN, Avocat au Barreau du Cameroun – BP 2049 Douala, ont cité la SOCOPAO CAMEROUN – SDV, dont le siège social est à Douala – BP 215, et ayant pour Conseils Mes MOULOUWE et TCHANGA – VIAZZI – AUBRIET et autres, d’avoir à se trouver et comparaître devant Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Douala Bonanjo, statuant en matière de référé, puis en matière de contentieux de l’exécution, siégeant dans son Cabinet (Cabinet de Monsieur le Juge SOCKENG) sis au Palais de Justice de ladite ville, pour, est-il dit dans cet exploit :
VU les articles 38, 47, 48 et 49 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution;
– Constater que l’astreinte comminatoire décidée par l’ordonnance N° 103 du 28 octobre 1998 et confirmée par l’arrêt N° 38/Réf. Du 08 février 2000, n’a pas eu l’effet escompté;
– La dire désormais non comminatoire;
– Ordonner l’exécution sur minute, et ce, avant enregistrement de l’ordonnance à intervenir;
– Mettre les dépens à la charge de la requérante;
Attendu que pour faire triompher ses actions, le demandeur fait valoir que par ordonnance de référé N° 103 rendue le 28 octobre 1998, le juge de céans a condamné la SOCOPAO CAMEROUN à s’exécuter, sous astreinte de 300.000 FCFA par jour de retard;
Que cette décision a été confirmée par l’arrêt N° 38/Réf. du 09 février 2000 rendu par la Cour d’Appel du Littoral;
Que 2.518 jours après, et l’autorité de la chose jugée, elle s’entête à ne pas s’exécuter, malgré les différentes mesures d’exécution pratiquées;
Qu’il en résulte donc une résistance abusive;
Qu’il convient donc de transformer la première astreinte comminatoire décidée en une astreinte non comminatoire;
Attendu que pour faire échec à l’action du demandeur, la Société SOCOPAO - SDV CAMEROUN, sous la plume de Maîtres MOULOUWE et TCHANGA, conclut à l’irrecevabilité de la susdite action, motif pris de l’absence de la personnalité juridique des Etablissements PANTAMI, et sollicité son débouté avec suppression pure et simple de l’astreinte provisoire prononcée par ordonnance N° 103 susvisée, parce qu’il existe un empêchement à son exécution;
Qu’elle soulève à travers Maîtres VIAZZI – AUBRIET – BATIH NKOM et TROUCK, l’exception d’incompétence du juge de céans, à connaître de la liquidation de l’astreinte telle que voulue par le demandeur;
Qu’elle expose sur le premier moyen, que la qualité du demandeur n’existe pas dans le paysage juridique du Cameroun et ne peut être ni sujet de droit, ni objet d’obligations;
Que sur le second moyen tiré de l’exception d’incompétence, la demande de transformation dont s’agit vise plutôt à obtenir la liquidation de l’astreinte qui a été prononcée, ce qui n’est pas de la compétence du juge de céans;
Qu’en ce qui concerne l’existence d’une difficulté d’exécution, non seulement l’arrêt confirmatif du 09 février 2000 dont se prévalent les Etablissements PANTAMI fait l’objet d’un pourvoi en cassation, mais également, les sommes détenues ne pouvaient être reversées, en ce que la Société de Recouvrement de Créance leur a notifié un avis à tiers détenteur, lequel constitue un empêchement rédhibitoire à l’exécution de l’arrêt ayant servi de base aux poursuites des Etablissements PANTAMI;
Que cette difficulté semble être finalement perçue sur les demandeurs eux-mêmes, qui viennent de l’assigner, et la SRC, en mainlevée de l’avis à tiers détenteur;
Qu’on ne peut, dès lors, en l’état de ces contestations et énonciations, commuer l’astreinte provisoire prononcée en une astreinte définitive;
Qu’il échet, au contraire, de la supprimer purement et simplement;
Attendu qu’en duplique, le demandeur soutient que l’intervention de la SRC a été déboutée dans la procédure ayant prononcé l’astreinte;
Que cette dernière n’a pas exercé de recours, ce qui ne l’a pas empêchée de s’associer à la défenderesse;
Qu’il y a lieu de constater l’autorité de la chose jugée, par le débouté de la Société de Recouvrement de Créances;
Attendu qu’il y a lieu de statuer au préalable sur les exceptions soulevées, avant d’analyser le fond du litige;
SUR LES EXCEPTIONS :
A.- DE L’EXCEPTION D’INCOMPETENCE :
– Déclarer nulle la mesure d’exécution engagée par TCHOUNKEU;
– Ordonner la discontinuation des poursuites engagées contre la société demanderesse sur la base de l’ordonnance N° 1644 qui a été frappée de caducité, et sur la base de la signification commandement de Maître BALENG MAAH Célestin, datée du 08 avril 2002;
– Ordonner l’exécution par provision, sur minute et avant enregistrement de notre ordonnance;
– Condamner le défendeur aux dépens distraits au profit de Maître NANDJOU Gaston, Avocat aux offres de droit;
Attendu que la défenderesse fait valoir que le juge de céans ne saurait connaître de la liquidation d’astreinte telle que sollicitée;
Attendu cependant, que l’astreinte, qui est un moyen de coercition consistant à condamner le débiteur à payer au créancier, une somme d’argent, déterminée en général par jour ou par mois de retard, tant qu’il refusera d’exécuter son obligation, est une mesure d’exécution forcée;
Que l’article 49 de l’Acte Uniforme OHADA N° 6 fait du juge de l’urgence seul compétent à connaître des difficultés de l’exécution, et par conséquent, du fond;
Que l’astreinte étant une mesure d’exécution, donc de la compétence propre du juge du contentieux; il échet de dire l’exception soulevée non fondée;
B.- DU DEFAUT DE QUALITE
Attendu que la SOCOPAO SDV allègue le défaut de qualité du demandeur, en ce que les demandeurs ne constituent aucune catégorie réglementée dans le paysage juridique camerounais;
Attendu cependant qu’il est établi que la défenderesse ne saurait invoquer le défaut de qualité des Ets PANTAMI, qui ne lui cause aucun grief, alors et surtout qu’elle a toujours traité avec ces Etablissements;
Que les demandeurs ont toujours usé la qualité qui leur est aujourd’hui méconnue; que c’est sous cette qualité que les différentes actions ayant abouti à la présente procédure ont été introduites;
Qu’il échet en conséquence, de dire le défaut de qualité invoqué non fondé;
AU FOND :
Attendu que réagissant à la demande, le défendeur fait répliquer que ni l’article 17 (2), ni le 34 de la législation susvisée n’est applicable en l’espèce;
Attendu qu’il ressort du dossier de la procédure et des débats, que par ordonnance N° 103 du 28 octobre 1998, le Président du Tribunal de céans a condamné la Société SOCOPAO par retard;
Que par arrêt N° 33 du 09 février 2001, la Cour d’Appel du Littoral a confirmé la susdite décision;
Que les susdites décisions ne s’étant prononcées aucunement sur l’attitude de la Société de Recouvrement des Créances, laquelle a servi en date du 07 août 1999, à la Société SOCOPAO CAMEROUN – SDV, un avis à tiers détenteur sur le demandeur, lequel a été dénoncé par acte de Gabriel ELLA MALLA, porteur de contrainte assermenté;
Que cet avis justifie à suffisance la suspension du cours des astreintes, en ce qu’il s’agit d’une saisie arrêt;
Que par ailleurs, les Etablissements PANTAMI ont saisi le juge du contentieux pour solliciter la mainlevée de cette saisie opérée par la Société de Recouvrement de Créances;
Qu’il en résulte que la résistance invoquée pour solliciter la liquidation d’astreinte est basée sur une cause juridiquement établie, notamment la saisie suivant avis à tiers détenteur sus évoquée;
Qu’en l’absence de toute mauvaise foi du tiers saisi, il y a lieu de débouter le demandeur de son action aux fins de liquidation d’astreinte comme non fondée;
Attendu que la partie qui succombe doit être condamnée aux dépens;
Ainsi jugé et prononcé en audience publique les mêmes jour, mois et an que dessus;
En foi de quoi, la présente ordonnance a été signée par le Juge, qui l’a rendue, et le Greffier.