J-04-443
VOIES D’EXECUTION – SAISIE ATTRIBUTION – APPOSITION DE LA FORMUE EXECUTOIRE – APPEL – CERTIFICAT DE NON APPEL – ANTÉRIORITÉ AU CERTIFICAT D’APPEL – ERREUR DU SERVICE DU GREFFE – NULLITE DE LA FORMULE EXECUTOIRE – MAINLEVÉE DES SAISIES.
Lorsque pour cause d’erreur du service du Greffe, alors qu’un appel a été interjeté, qu’un certificat d’appel a été délivré alors qu’un premier certificat de non appel avait déjà été délivré, il y a lieu d’annuler la formule exécutoire qui ne peut être apposé sur l’injonction de payer qui fonde la saisi -attribution des créances en vertu de l’effet suspensif de l’appel. La mainlevée de la saisie attribution effectuée doit dès lors être ordonnée.
(Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif – ordonnance de référé n° 103/C du 13 novembre 2003, Société Mobil Oil Cameroun c/ OWONA François).
Affaire : Société MOBIL OIL Cameroun
contre
OWONA François.
Nature de l’affaire : Contestation de saisie attribution.
Faits : La société Mobil Oil Cameroun contestait la saisie attribution pratiquée sur ses comptes, à la requête de M. OWONA François. En effet, elle arguait de ce que la formule exécutoire apposée sur l’ordonnance d’injonction de payer avait été obtenue de manière frauduleuse, étant donné qu’elle avait interjeté appel et que le sieur OWONA n’avait pas fourni un certificat de non appel, conformément à l’article 34 de l’Acte Uniforme portant voies d’exécution.
Solution du juge : Le juge a reçu la société Mobil Oil en sa demande. En effet, il a constaté qu’il y avait eu une erreur administrative du secrétariat du Président de la Cour d’Appel, qui n’avait pas relevé dans ses registres, l’appel fait par cette société. Ce qui avait eu pour conséquence la délivrance de deux certificats. Mais le certificat d’appel étant antérieur au certificat de non appel, et du fait de l’effet suspensif de l’appel, le juge a annulé la forme exécutoire et ordonné la mainlevée de la saisie pratiquée.
Ordonnance de référé.
L'an deux mil trois, et le treize novembre;
Devant Nous, Madame FOTSO Elise, Juge au Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif, tenant audience publique des référés en notre Cabinet sis au Palais de Justice de ladite ville;
Assistée de Maître NTA Marguerite, Greffier;
A comparu Maître Eugène L.R. BALEMAKE, Avocat au Barreau du Cameroun, pour le compte de la société MOBIL OIL Cameroun, demanderesse, dont le siège est à Douala; lequel nous a exposé que suivant exploit en date du 30 mai 2003, non encore enregistré, de Me BIYICK Thomas, Huissier de Justice à Yaoundé;
Son client a fait donner assignation en référé à sieur OWONA François, à Me Jeannette Irène KEDI, à la Société Générale de Banques au Cameroun (SGBC), au Crédit Lyonnais Cameroun S.A., à la Standard Chartered Bank Cameroun S.A., d'avoir à se trouver et à comparaître 1e 12 juin 2003, par-devant Monsieur le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif statuant en matière d’urgence, comme Juge du contentieux de l’exécution, pour les motifs énoncés en l’exploit ainsi produit au dossier;
A également comparu Maître Guy NOAH, Avocat au Barreau du Cameroun, pour le compte du défendeur; lequel a été entendu en ses explications;
L'affaire a été appelée pour la première fois à l'audience du 12 juin 2003; après quelques renvois utiles, les débats ont été déclarés clos, et l’affaire a été mise en délibéré pour l'ordonnance être rendue le 13 novembre 2003;
Advenue cette audience, la juridiction des référés, vidant son délibéré, a, par l'organe de son Président, rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
Nous, Juge de l’exécution;
Vu l’exploit introductif d’instance;
Vu les pièces du dossier de la procédure;
Après en avoir délibéré, conformément à la loi;
Attendu que par exploit de Me BIYICK Thomas, Huissier de justice à Yaoundé, non enregistré, la société MOBIL OIL Cameroun S.A., a fait donner assignation à sieur ONOWA François, Me Jeannette Irène KEDI, Huissier de justice à Yaoundé, la Société Générale de Banques Cameroun S.A. et au Crédit Lyonnais Cameroun S.A., d'avoir à se trouver et comparaître le 13 juin 2003 par-devant le Président du Tribunal de Première Instance de Yaoundé Centre Administratif, statuant en matière d’urgence comme juge de l’exécution, pour, est-il écrit dans ledit acte :
– S’entendre ordonner la mainlevée de la saisie attribution pratiquée par Me Jeannette Irène KEDI, Huissier de justice à Yaoundé, par exploit en date des 13, 14 et 15 mars 2001, sous astreinte de 1.000.000 FCFA par jour de retard, à compter de la décision à intervenir;
– Constater que le jugement N° 115 du 21 novembre 2002 rendu par le Tribunal de Grande Instance de Yaoundé n’a pas force exécutoire, car ayant fait l’objet d’une voie de recours suspensive d’exécution;
– Constater que c’est en pure illégalité que l’ordonnance d’injonction de payer N° 72 du 11 avril 2001 a été revêtue de la formule exécutoire;
– Dès lors, déclarer nulle ladite formule exécutoire;
– Voir en outre, constater que contrairement aux dispositions de l’article 34 de l’Acte Uniforme OHADA portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution, la production du certificat de non appel préalable à toute mesure d’exécution, n’a pas été respectée;
– Subséquemment, déclarer nulle la saisie querellée et en ordonner mainlevée;
– Ordonner l’exécution de la décision à intervenir, nonobstant toute voie de recours;
– Condamner le sieur ONOWA François aux dépens distraits au profit de Me Eugène L.R. BALEMAKEN, Avocat aux offres de droit;
Attendu qu'au soutien de sa demande, la requérante expose que par jugement N° 145 rendu le 21 novembre 2002, le Tribunal de Grande Instance de céans a rejeté son opposition formée contre l’ordonnance d’injonction de payer obtenue contre elle par le sieur OWONA François;
Que le 28 novembre 2002, elle a interjeté appel de cette décision, suivant les articles 15 de l’Acte Uniforme précité et 191 du code de procédure civile et commerciale;
Que le sieur ONOWA François a, le 29 avril 2003 et par exploit de Me Jeannette Irènce KEDI, fait pratiquer une saisie attribution des créances sur les comptes de la requérante, domiciliés dans divers établissements bancaires, pour sûreté et avoir le paiement de la somme de 36.343.135 FCFA de l’injonction de payer;
Qu’en faisant pratiquer cette saisie attribution, le sieur ONOWA François n’a tenu compte ni de l’effet suspensif de l’appel qu’elle a interjeté, ni de la formalité de l’article 54 de l’Acte Uniforme précité, qui excipe que le procès-verbal de saisie attribution des créances soit assortie du certificat de non appel du jugement N° 145 du 21 novembre 2002;
Qu’il s’ensuit que c’est de façon frauduleuse que l’ordonnance d’injonction de payer N° 78 du 11 avril 2001 a été revêtue de la formule exécutoire;
Que la fraude du requis « corrompt tout »;
Attendu que concluant, sieur OWONA François a soutenu que le juge ayant rejeté l’opposition de la requérante et ordonné l’apposition de la formule exécutoire sur l’ordonnance d’injonction de payer du 11 avril 2001, il s’est rendu le 21 mars 2003, au Greffe de la Cour d’Appel du Centre et y a obtenu, après vérification, un certificat de non appel;
Que par ailleurs, le 24 avril 2003, dans une instance en discontinuation des poursuites devant le Juge des référés, MOBIL OIL Cameroun n’a jamais produit son fameux certificat d’appel;
Que la fraude dont s’agit se trouve plutôt de son côté;
Que l’adage « prior tempore, potior juré », dans la mesure où il ne s’agit nullement d’un problème de rang, mais de deux actes délivrés par le Greffier en chef de la Cour d’Appel;
Mais attendu que la validité des deux certificats ne peut être mise en doute, dans la mesure où MOBIL OIL Cameroun S.A. a effectivement relevé appel le 28 novembre 2002, enregistré sous le numéro 475 dans un des registres d’appel;
Que le certificat de non appel n’a été délivré à ONOWA François qu’à cause d’une erreur du service du Greffe, car la mention dans le registre d’appel du secrétariat du Président de la Cour d’Appel du Centre à Yaoundé, où l’appel a été effectivement relevé, n’a pas été reportée dans le registre d’appel du Greffe, sur la base duquel le certificat de non appel a été délivré;
Que dès lors, le certificat d’appel étant antérieur au certificat de non appel, l’effet suspensif de l’appel ne permet pas l’apposition de la formule exécutoire sur l’injonction de payer litigieuse qui fonde la saisie attribution des créances de MOBIL OIL Cameroun;
Qu’il échet d’annuler ladite formule exécutoire et d’ordonner la mainlevée de la saisie attribution effectuée;
Attendu que selon l’article 50 du Code de Procédure Civile et Commerciale, les dépens sont mis à la charge de la partie qui succombe;
PAR CES MOTIFS
Nous, Juge du contentieux de l’exécution, statuant publiquement et contradictoirement à l’égard de toutes les parties, et en premier ressort :
– Recevons MOBIL OIL Cameroun S.A. en son action;
– La disons fondée;
– Disons nulle la saisie attribution des créances effectuée le 29 avril 2003 par le défendeur, au préjudice de la MOBIL OIL Cameroun, et ordonnons la mainlevée;
– Dépens à la charge;
Ainsi fait, jugé et prononcé en audience publique les mêmes jour, mois et an que dessus;
Et signent sur la minute le Président et le Greffier approuvant lignes et mots rayés nuls./